MOETAR – From these small seeds
Contrairement à ce que pourrait faire penser une première approche phonétique et/ou visuelle du nom de ce groupe, Moetar n’a rien à voir avec Manneken Pis. Basé à San Francisco, Moetar a été fondé par la chanteuse Moora Dickason (« Moe ») et le bassiste Tarik Ragab (« Tar »), après avoir joué auparavant ensemble dans un groupe de funky pop No Origin.
Dès la première écoute, on se rend très vite compte que Moetar propose un rock maîtrisé et touffu. Présenté par leur label comme du rock moderne progressif, le groupe brasse en effet des influences musicales inhabituelles et parvient à les digérer de telle manière que leurs compositions sonnent avec une réelle cohérence et une certaine originalité. En fait, Moetar joue en effet un rock direct moderne, les morceaux titrant presque tous entre les 4 et minutes mais la dimension prog vient de cette audace à mélanger des horizons musicaux improbables et à en densifier les titres.
« Dichotomy » ouvre l’album avec un ton résolument jazzy séduisant et déjà on sent cette science musicale dans le background des musiciens qui leur permet cette première réussite. Avec « Infinitesimal sky », on perçoit immédiatement le talent immense de la chanteuse, au timbre vocal puissant sans jamais paraître forcé ou exagéré, capable de visiter un registre vocal étendu. Il y a une approche dramatique et « comedia dell’arte » dans « Butchers of Baghdad », rappelant quelque part le traitement apporté au rock par Dakrya mais sans le côté burlesque de ce dernier. On y côtoie du jazz (« New world Chaos », « Never home » au final presque free jazz), du rock fusion (« Morning person », « From these small seeds »), des vocaux rappelant les sœurs Andrew (« Random tandem » et « New world Chaos »), bref bien des tessitures qui traversent et habillent avec bonheur le rock de Moetar, qui les rafraîchit avec modernité.
Il y a des réminiscences de Viktor Lazlo et Sade dans « Never home », titre cool qui termine pourtant dans du free fusion. Moora Dickason persiste sans peine à impressionner tout au long de l’album, rappelant au passage Lana Lane dans « Screed (part two) ». La plupart des compositions sont signées par Tarik Ragab, véritable maître d’œuvre de l’album et redoutable bassiste (« From these small seeds », « Friction »).
Moetar s’injecte du Beatles, du Frank Zappa, du XTC, du Andrew Sisters et bien d’autres influences, les malaxe et propose au final un rock audacieux, aventureux et personnel, belle gageure pour un 1er essai. On pense régulièrement à Zappa, capable de reculer les frontières du rock vers des horizons plus lointains et pas très courus. Album intéressant, pour amateurs avertis.
Musiciens :
- Moorea Dickason – chant
- Tarik Ragab – basse, choeurs
- Matthew Heulitt – guitare, choeurs
- Matt Lebofsky – claviers, choeurs
- David M. Flores – batterie
Liste des morceaux :
- Dichotomy (Part One) 3:57
- Infinitesimal sky 3:02
- Butchers of Baghdad 4:19
- Random tandem 4:12
- Ist or an ism 4:58
- Morning person 2:54
- New world chaos 5:40
- Screed (Part Two) 4:40
- Never home 4:50
- From these small seeds 5:20
- Friction 3:08
Pays: US
Magna Carta MA 9111-2
Sortie: 2012/02/28

