SOUTH OF NO NORTH – Octopussies liquor store
Les origines du groupe belge South Of No North remontent à 2003, quand un malade de free jazz du nom de Cédric Stevens décide de plonger davantage dans ce créneau et monte un trio qui s’appelle d’abord Drifting Bears Collective. On y trouve également Jeanri Rigo (guitare), David Meunier (batterie), Cédric Stevens s’occupant de l’électronique, des claviers et de toute machine capable de créer des sons stroboscopiques, des vibrations mécaniques ondulatoires ou des infrasons célestes. Les trois garçons écrivent rapidement des morceaux, les testent sur scène et entament ainsi un processus créatif qui leur donne envie de réaliser un premier album. C’est avec l’arrivée de Loren Delforge à la basse que le groupe achève son premier album en 2007, intitulé « South of no north » et dont le titre est sans doute inspiré du recueil de nouvelles de Charles Bukowski.
Cet album est assez bien accueilli par la Web-critique et incite les gaillards à remettre le couvert et plancher sur leur deuxième album. Le nouveau disque est conçu sur une base radicalement différente du précédent, avec l’adjonction d’un cinquième musicien en la personne de Laurent Baudoux, une figure de l’avant-garde belge. L’approche est ici plus cohérente et assurée, bien que reposant sur de l’improvisation. Le groupe réalise deux sessions de travail, où il transfère en musique les idées qui sont échangées entre les membres. Après avoir lâché cette vague d’inspiration sur bande sonore, le groupe prend du recul, réécoute tranquillement les résultats et se trouve tellement impressionné par ceux-ci qu’il décide de sélectionner deux longs titres pour ce qui va devenir « Octopussies liquor store ».
Trouvant que le nom de Drifting Bears Collective est un peu téléphoné car plein de groupes ont ajouté le mot « bear » dans leur nom, le quintette décide d’opter pour South Of No North, reprenant ainsi le titre de leur premier album et estimant que cela fait plus original. Oui, sauf qu’il y avait déjà un groupe grec qui portait ce nom dans les années 80. C’est peut-être un peu raté pour le côté original du nom, mais South Of No North se rattrape allègrement du côté du contenu de sa musique.
Autant prévenir tout de suite : on se trouve ici dans l’avant-garde totale, dans l’expérimentation pure, dans l’improvisation érigée en système. South Of No North a composé deux morceaux qui occupent respectivement 35 et 25 minutes de temps. On retrouve en point commun sur ces titres de longues et lentes nappes d’effets sonores, électroniques, ponctués par une trame rythmique quasi invisible et qui propulsent l’auditeur dans un cosmos infini de sons vaporeux. On trouve dans cette musique la patte lointaine de pionniers de l’avant-garde électronique comme Edgar Varèse ou La Monte Young qui expérimentaient déjà ces expérimentations sonores dans les années 50 ou 60. Par conséquent, ceux qui aiment ou comprennent Edgar Varèse ou La Monte Young vont retrouver ici un terrain de connaissance. Ceux qui ne comprennent pas ce genre de choses peuvent utiliser le travail de South Of No North comme musique d’ambiance au cours de leurs séances de méditation transcendantale et ils pourront constater que ça aide. Ils risquent juste d’être un peu secoués vers la fin, où South Of No North bouscule ses rythmes et donne un aspect plus tourmenté au final de son album.
Pas de faux-fuyants, la musique de South Of No North est belle. On y sent l’émotion et l’attention des musiciens, qui transposent avec des sons la question mystique de l’homme confronté à l’univers. Ce disque est effectivement une invitation à la méditation et à la transcendance de la réalité matérielle vers la seule immatérialité de la pensée.
Pays: BE
Humpty Dumpty Records
Sortie: 2012/01/15