RUNDGREN, Todd – One long year
Durant sa longue carrière, Todd Rundgren a toujours eu du nez, pressentit les évolutions à venir et s’est souvent posé en authentique précurseur. Dès ses débuts avec son groupe Nazz en 1967-68, Todd Rundgren expérimentait déjà des sonorités préfigurant les années 80. Au cours de ses albums classiques des années 1970, il emporte son auditoire dans de longues circonvolutions lunaires et progressives. Et au moment où sonnent les années 90 et l’émergence de l’Internet, il perçoit immédiatement le potentiel qu’il y a à tirer de cet outil de communication révolutionnaire.
En effet, Todd Rundgren est l’un des premiers musiciens, dès 1997, à utiliser l’Internet comme outil de partage, des années avant Napster. Mais son système à lui, ce n’est pas l’échange de fichiers plus ou moins légaux, c’est un site qui permet aux musiciens de poster leurs œuvres et aux auditeurs de les écouter via un abonnement. Le site de Todd Rundgren, Patronet, sera l’un des tout premiers du genre, une prouesse quand on sait ce que le Net est devenu avec iTunes et compagnie. Dans les technologies de l’information, Todd Rundgren était une sorte de Galilée ayant tout compris avant tout le monde.
Mais la technologie a suivi la route que l’on sait et le site Patronet n’a pas trouvé sa place, sans doute trop en avance sur son temps. Todd Rundgren se tourne donc vers un nouveau concept à l’aube des années 2000 : créer un site qui lui permette de poster des chansons en cours d’écriture et de faire partager à l’internaute les différents stades de leur élaboration. Le but de Todd Rundgren était de fabriquer une douzaine de chansons en un an, à raison d’une par mois et d’en faire profiter l’internaute en temps réel. Ici, le génie visionnaire de Rundgren avait encore trop d’avance et la mise en œuvre s’est révélée plus difficile que prévu.
Todd Rundgren s’est donc rabattu sur une formule plus classique en rassemblant en un CD la douzaine de titres qu’il avait écrits durant cette année. Le résultat est donc logiquement cet album « One long year », qui photographie l’état de l’inspiration du maître de Philadelphie en 2000. À cette époque, l’homme s’est installé à Hawaii (où il a mis au point son album « With a twist« en 1997) après avoir élaboré une musique assez marquée par l’électronique, comme l’ont montré ses albums « No world order« et « The individualist« , commis en 1993 et 1995 sous le projet TR-i. « One long year » change notablement par rapport à ces œuvres précédentes, en assemblant des influences diverses, parfois électro (« Jerk »), rock FM (« Buffalo grass », un « Hit me like a train » rappelant Foreigner), dansantes (« Where the time go », dans une veine très Christopher Cross, ou « The surf talcs », cette fois teinté de Depeche Mode), folklorique hawaïen (« Bang on the ukulele daily ») ou bien puissantes (« I hate my frickin’ I.S.P. », un « Yer fats » assez punkifié).
L’ensemble est assez diversifié et sonne plutôt eighties, une rétrogradation étonnante pour un auteur qui a toujours cherché à prendre de l’avance. Mais la qualité des compositions et la marque de fabrique Todd Rundgren sont toujours au rendez-vous, ce qui permet de passer un bon moment. « One long year » sort sur le label Esoteric Recordings qui complète les rééditions déjà accomplies avec « With a twist », « No world order » et « The individualist », de quoi intéresser les amateurs de Todd Rundgren qui souhaitent augmenter leur collection.
Pays: US
Esoteric Recordings ECLEC 2303
Sortie: 2011/11/28 (réédition, original 2000)