HOT TUNA – Hoppkorv

Hot Tuna est le groupe créé par Jorma Kaukonen et Jack Casady, deux musiciens éminents du Jefferson Airplane, l’un des phares de l’acid-rock de San Francisco à la fin des années 60. Pourtant, le credo de Hot Tuna, ce n’est pas vraiment le psychédélisme mais le blues, avec une haute teneur en rock. Le groupe a englobé d’autres membres de l’Airplane à ses débuts (Marty Balin et Paul Kantner) et a réalisé une poignée d’albums à partir de 1970 (« Hot Tuna », « First pull up, then pull down », « Burgers », « Phosphorescent rat », « America’s choice »). En 1975, Hot Tuna est stabilisé autour de Jorma Kaukonen (guitare et chant), Jack Casady (basse) et Bob Steeler (batterie). Il sort l’excellent « Yellow fever », suivi l’année suivante de « Hoppkorv ».

Ce disque, qui est le dernier album studio de la première période de Hot Tuna, se veut être une continuation de « Yellow fever », avec son blues-rock bien puissant et néanmoins habité par une petite fibre West Coast. Effectivement, on retrouve la guitare tortueuse et énergique de Jorma Kaukonen, le phrasé caractéristique de son chant et quelques bons titres originaux. Il y a cependant moins de titres écrits par Jorma Kaukonen, qui privilégie davantage les reprises. Au nombre de deux sur « Yellow fever », elles passent à cinq et vont puiser dans un répertoire rock ‘n’ roll et blues bien classique (« I can’t be satisfied » de Muddy Waters, « Talkin’ ‘bout you » de Chuck Berry, « It’s so easy » de Buddy Holly, « I wish you would » de B.B. Arnold et « Bowlegged woman, knock kneed man » de B. Rush et C. Carter. Il y a un léger effet de remplissage, mais certaines de ces reprises ne déçoivent pas. C’est le cas de « I can’t be satisfied » et de « Talkin’ ‘bout you ».

Hot Tuna s’est également enrichi de nouveaux musiciens qui viennent donner un coup de main au trio de base. C’est ainsi que Nick Buck officie aux claviers et écrit le morceau « Drivin’ around », titre heavy rock sympathique qui vient concurrencer les excellentes compositions de Jorma Kaukonen. Ce dernier laisse déborder sa guitare à de nombreuses reprises sur le roboratif blues rock « Santa Claus retreat », menace de faire fondre les ampoules de ses amplis sur « Extrication love song », livre un solo assassin sur « Song from the stainless cymbal » et ferait pleurer un homme de main de la mafia sur la déchirante ballade « Watch the north wind rise ».

Au total, on récolte un autre album classique de Hot Tuna dans sa période power trio, un tout petit poil inférieur à « Yellow fever » mais ça se joue dans un mouchoir de poche. Le titre de l’album viendrait d’un souvenir de tournée en Suède où les musiciens auraient entendu un type hurler les mots « Jävla hoppkorv » devant un stand de hot-dogs, ce qui signifie « saloperie de hot-dog » (le type avait laissé tomber la saucisse de son bout de pain). Les Américains de Hot Tuna n’étant pas de fins linguistes, ils n’ont retenu que le second mot pour leur album. Il n’empêche qu’avec un nom imprononçable, « Hoppkorv » finit néanmoins 116e dans les charts américains, ce qui n’est pas si mal.

Peu après, Kaukonen et Casady décident de mettre un terme à Hot Tuna. Ils éditent le très bon live « Double dose » en 1978, suivi de la compilation d’adieux « Final vinyl » en 1979. Mais depuis, le groupe a eu l’occasion de se reformer et de refaire des albums à partir de 1984. Ainsi, Hot Tuna est toujours présent dans les bacs des disquaires et s’est même fendu d’un tout dernier album « Steady as she goes » pas plus tard qu’en avril 2011.

Tout comme « Yellow fever », « Hoppkorv » est réédité par le label Esoteric Recordings et l’on s’étonne que cette excellente maison n’ait pas été plus gourmande dans ses rééditions en se contentant simplement de deux albums, alors qu’il y a une bonne demi-douzaine de disques des années 70 qui ne demandent qu’à être redécouverts.

Pays: US
Esoteric Recordings ECLEC 2292
Sortie: 2011/09/26 (réédition, original 1976/10)