SOCRATES – Phos
Constitué en 1969 sous la forme d’un trio, Socrates Drank the Conium est au départ inspiré par le Jimi Hendrix Experience et Cream. Par la suite, à l’écoute d’une planète Rock britannique en pleine ébullition, il découvre d’autres nouvelles perles, spécialement Led Zeppelin et Black Sabbath.
Avec une excellente réputation acquise dans les clubs athéniens, le groupe trouve l’opportunité d’enregistrer. Trois albums sont publiés coup sur coup : « Socrates Drank the Conium » (1972), « Taste of Conium » (1972) et « On the Wings » (1973). Chacun d’eux montre l’évolution de leurs pôles d’intérêts, leurs talents d’instrumentiste, leur potentiel vocal, leur intérêt pour un Rock énergique et attrayant, leur capacité à composer, mais aussi leur difficulté à acquérir une vraie personnalité.
Après une remise en question artistique, un changement de label et l’opportunité d’enregistrer en Angleterre, Andonis Tourkogiorgis et Yannis Spathas, les deux piliers historiques du groupe, engagent une profonde mutation. Avec l’aide de leur compatriote Vangelis Papathanassiou, ex-Aphrodite’s Child, au début d’une flamboyante carrière en solo sous le nom de Vangelis, ils fixent cette volonté de changement dans leur quatrième album, « Phos », sorti en 1976 sous le nom simplifié de Socrates.
À l’écoute, l’album est indéniablement réussi. Il mêle les qualités et les forces de chacun. L’apport de Vangelis est important, autant dans la fonction d’instrumentiste que de producteur. D’abord, les claviers amènent une palette de sons et une finesse nouvelles. Ensuite, les atmosphères changent et portent une plénitude nouvelle. Enfin, le style est remodelé. Dans les faits, l’homme ne renie jamais Aphrodite’s Child, pas plus celui du premier album, « End of the World », que celui de « 666 ». Sa carrière solo est aussi représentée, plutôt via « Earth » (1973) que « Heaven and Hell » (1975). Les deux titres les plus sophistiqués, « Queen of the Universe » et « Every Dream Comes to an End », mettent idéalement en valeur sa performance personnelle.
Clairement, les deux leaders de Socrates ne semblent pas perturbés par cet univers qu’ils pénètrent et absorbent sans difficulté. L’origine grecque de chacun n’y est évidemment pas étrangère. Leur musique s’assagit, s’affine, s’aère et s’ouvre à d’autres horizons. La reprise de « Starvation », issu de leur premier album et un de leurs chevaux de bataille, acte cette évolution réussie. Un lien avec la musique Progressive s’est créé et de nombreux aspects de la musique grecque et orientale, peu présents auparavant, apparaissent ou sont accentués. Les guitares le montrent particulièrement avec un moindre rapport aux références du passé. Le guitariste soliste produit toujours d’excellents solos, mais mieux maîtrisés, plus courts et plus ronds. La guitare acoustique est mieux représentée et rappelle parfois le bouzouki. Au gré des titres, sans pousser l’essai trop loin mais sans cacher une proximité certaine, le chanteur prend clairement Demis Roussos comme modèle. Il est alors inutile de préciser le lien avec Aphrodite’s Child. En prime, d’une efficacité hors pair et d’une dextérité stupéfiante, le batteur accentue cette parenté par un jeu spectaculaire digne de Lucas Sideras, tout en apportant des traits de John Bonham (Led Zeppelin). L’appui de Vangelis aux percussions augmente encore la richesse et la solidité dans ce secteur rythmique.
Album varié, « Phos » est passionnant de bout en bout, que ce soit dans les titres calmes ou nerveux, de style Rock ou Progressif, plus marqués par les claviers ou les guitares. En prime, l’ordre des titres est idéal. Dans cet ensemble de qualité, le sommet absolu reste le spectaculaire « Time of Pain », immédiatement suivi de la première partie de « Mountain ». Le plus surprenant se nomme « The Bride », où Socrates apparaît comme une sorte de Jethro Tull oriental.
Spécialiste de la réédition intelligente, commentée et documentée dans son livret, Esoteric Recordings remet en lumière un album oublié et un groupe mal connu hors de ses frontières, qui a pourtant de nombreux enregistrements à son actif et se produit encore à l’occasion.
En définitive, un album indispensable à découvrir !
Les titres (36’19) :
- Starvation (Spathas)(3’46)
- Queen of the Universe (Spathas/Tourkogiorgis/Tradalidis)(5’00)
- Every Dream Comes To an End (Spathas/Tourkogiorgis/Tradalidis/Papathanassiou)(5’57)
- The Bride (Spathas)(3’38)
- Killer (Spathas)(2’28)
- A Day in Heaven (Spathas)(4’32)
- Time of Pain (Spathas)(3’27)
- Mountains (Part One & Two) (Spathas/Tourkogiorgis/Tradalidis)(7’31)
Les interprètes :
- Andonis Tourkogiorgis : Chant, Guitares & Basse
- Yannis « John » Spathas : Guitares
- George Tradalidis : Batterie & Percussions
+ - Vangelis Papathanassiou : Claviers, Percussions & Production
Pays: GR
Esoteric Recordings ECLEC 2287
Sortie: 2011/08/30 (réédition, original 1976)
