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WILLIAMS, Tony LIFETIME – Turn it over

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Après avoir réalisé l’album « Emergency! » en 1969, le Tony Williams Lifetime poursuit ses pérégrinations jazz fusion avec « Turn it over » en 1970. Tony Williams, membre du groupe de Miles Davis avec qui il a commencé à l’âge de 17 ans, a toujours à ses côtés l’organiste prodige Larry Young et le guitariste John McLaughlin, alors à l’aube d’une grande carrière. Sur « Turn it over », le trio s’enrichit d’un quatrième membre non négligeable : Jack Bruce. À l’époque, Jack Bruce a déjà un CV long comme le bras : ancien pensionnaire des bluesmen pionniers Alexis Korner et Graham Bond, il a acquis ses lauriers en fondant Cream avec Eric Clapton et Ginger Baker. En 1970, il est relativement libre sur le marché, ayant fondé un groupe avec Mitch Mitchell, Larry Coryell et Mike Mandel. Lorsque cette formation effectue une tournée aux États-Unis début 1970, Bruce rencontre Tony Williams et l’idée de rejoindre son groupe se fait naturellement.

L’entrée en lice dans un groupe de jazz-rock d’un bassiste qui a contribué à l’émergence du blues lourd puis du hard rock va avoir une certaine influence sur le contenu de « Turn it over ». Le quatuor se réunit aux Olmstead Sound Studios de New York (là où avait été élaboré le premier album du Lifetime) et met sur cire une dizaine de titres, principalement des compositions originales de Tony Williams, Larry Young et John McLaughlin, mais aussi quelques reprises de Chick Corea (« To whom it may concern »), John Coltrane (« Big Nick ») et Carlos Jobim (« Once I loved »). La production est bien meilleure que sur le premier album, mais les rares interventions de voix de Tony Williams souffrent toujours d’un manque de relief ou sont handicapées par des effets spéciaux quelque peu incongrus.

Mais ceci n’empêche pas « Turn it over » d’être carrément formidable et de continuer l’œuvre débutée sur « Emergency! ». La présence de Jack Bruce et de sa fabuleuse basse rend les propos un peu plus rock et moins psychédéliques que sur le premier album. Les morceaux sont plus courts, plus ramassés et les musiciens n’hésitent pas à tourner le volume sonore à fond (« Allah be praised », « Vuelta abajo », « Right on »).

Malgré ses indéniables qualités, ce deuxième album ne trouve pas son public et Tony Williams décide de mettre un terme à l’expérience. Il faut dire que le management du groupe n’est pas à la hauteur et que la maison de disques Polydor ne fait pas grand-chose pour promouvoir l’album. La suite est glorieuse pour certains, plus triste pour d’autres. John McLaughlin fonde le Mahavishnu Orchestra et embrasse la carrière mondiale que l’on sait. Jack Bruce retourne à ses projets solos, passe un temps par le hard rock de West, Bruce & Laing avant de continuer une multitude de projets brillants durant les quatre décennies suivantes (à 68 ans, il est toujours actif et en pleine forme). Larry Young décède d’une pneumonie à l’âge de 37 ans en 1978. Tony Williams, après une suite de carrière bien remplie (il avait remonté une nouvelle mouture de Lifetime en 1971-73), succombe à une crise cardiaque à l’issue d’une opération banale de la vésicule biliaire en 1997, à l’âge de 51 ans.

Il nous reste l’héritage sonore pour découvrir ou redécouvrir ce formidable musicien qu’était Tony Williams, un des meilleurs batteurs de tous les temps. Avec la réédition des deux albums de Lifetime, le label Esoteric Recordings marque des points et ressuscite des chefs-d’œuvre classiques du jazz fusion.

Pays: US
Esoteric Recordings ECLEC 2257
Sortie: 2011/03/28 (réédition, original 1970)

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