FUZZTONES – Preaching to the perverted
Les Fuzztones sont cet incroyable combo américain spécialisé dans la reprise garage punk des Sixties, le fer de lance du revival garage rock qui avaient marqué les années 80 engluées dans la New Wave et qui avait réagi en ressuscitant les plus obscurs chefs-d’œuvre de série B en matière de punk sixties et de psychédélisme déviant. Aux côtés des Fuzztones, on pouvait en effet compter sur les Chesterfield Kings, les Plimsouls, les Fleshtones, les Lime Spiders ou les Pandoras, pour n’en citer que quelques-uns. Mais les Fuzztones tenaient le haut du pavé et continuent aujourd’hui d’alimenter les fantasmes de toute une génération trop jeune pour avoir pu vivre à fond les années 60 et trop éloignée de l’Amérique pour avoir pu y goûter ses plaisirs malsains.
Les Fuzztones se sont peut-être créés en 1980 mais sont mentalement restés coincés en 1966. Depuis tout ce temps, le groupe n’a cessé d’être animé par le légendaire Rudi Protrudi, guitariste, chanteur et dessinateur de son état. Au tout début, il était accompagné de sa complice organiste Deb O’Nair, qui a longtemps joué avec lui au cours de multiples changements de personnels, morts et résurrections successives du groupe. Résultat : une dizaine de disques en vingt ans, tous obnubilés par le garage punk américain en transition vers le psychédélisme au cours des années 1965-67. Les héros des Fuzztones ? Les Sonics, Paul Revere & The Raiders, We The People, les Fabs, le Chocolate Watchband, les Blues Maggoos, les Haunted, Gonn, les Standells, les Shadows Of Knight, les Amboy Dukes, les Moving Sidewalks, Lollipop Shoppe, les Electric Prunes, Love, les Stooges et tout ce qu’il peut y avoir d’inconnu dans l’Est des USA, le sud profond ou la Californie. Tout ce qui vient d’ailleurs et tout ce qui est postérieur à 1967 n’a aucun intérêt à leurs yeux. Le plus grand album des Fuzztones ? Sans doute « Lysergic emanations » (1985), qui regroupe la quintessence des reprises des groupes garage punk qui ont fait les Sixties underground. Où peut-on écouter les versions originales ? La meilleure façon est de se procurer « Songs we taught the Fuzztones », une compilation sortie sur le label allemand Music Mania. Ou alors s’acheter les séries des « Pebbles », des « Back from the grave » ou des « Sixties rebellion » (dont certaines pochettes sont illustrées par Rudi Protrudi lui-même).
Les Fuzztones n’avaient plus sorti d’album studio officiel depuis 2003, avec « Salt for zombies ». Les revoilà avec ce nouveau disque « Preaching to the perverted » qui marque un petit coup de frein dans l’inspiration par rapport aux œuvres précédentes. Enfin, Rudi Protrudi en a eu, de l’inspiration, puisque toutes les chansons sortent de sa plume et qu’il n’a pas eu recours à des reprises comme c’est la coutume chez les Fuzztones. L’histoire a démontré que les meilleurs albums des Fuzztones contenaient toujours un bon tiers de reprises que le groupe arrivait si bien à s’approprier. Ici, tout a été écrit par Rudi Protrudi qui emmène à nouveau son public dans son univers sixties, fleuri et lysergique. Attention, les titres proposés ici sont loin d’être médiocres (on remarque notamment l’énergique « Between the lines », le fuzzy « Launching sanity’s dice », un « Set me straight » en vol à basse altitude, le lourdingue « Old », l’agressif « This game called girl ») mais un certain nombre de chansons lentes et rêveuses viennent ralentir le rythme de l’album qui a la drôle d’idée de finir sur une sorte de marche funèbre au piano, un truc lugubre qui, j’espère, ne sonne pas le glas des Fuzztones qui se battent depuis plus de trente ans pour défendre l’underground.
Enfin, il n’en demeure pas moins vrai que les Fuzztones restent un groupe très attachant et qui fait de vraies merveilles sur scène. Le groupe a récemment annoncé qu’il ne ferait plus de tournées européennes, ce qui est un drame. Mais les promesses n’engagent que ceux qui y croient et on espère quand même que Rudi Protrudi ne résistera pas un jour prochain aux démons de la scène sur un continent qui lui a toujours fait le meilleur accueil.
Pays: US
Stag-o-Lee Stag-o-o21
Sortie: 2011/02/07