MINK DEVILLE – Live at Montreux 1982 (DVD+CD)
En 1982, Mink DeVille, alias Willy DeVille, est au sommet de son art. Le longiligne chanteur à petite moustache a surgi à la fin des années 70 avec le premier contingent de groupes punk new-yorkais qui ont révolutionné la scène rock à la fin des années 70 : Ramones, Blondie, Richard Hell & The Voivods, Talking Heads, Television… Mais Willy DeVille n’est pas un punk, du moins tel qu’on l’imagine à l’époque. Willy DeVille, c’est une sorte de gitan de la musique, un bluesman des années 30 perdu dans le New York des années 70, un latin lover égaré sur les bords de l’Atlantique Nord. C’est à partir de 1977 que Willy et son groupe Mink Deville commencent à disperser sur le monde des albums d’une incroyable classe rock. Ici, pas question de grosse électricité binaire, de guitares hurlantes et saccadées. Monsieur DeVille évolue dans le subtil, chante des sérénades sous les balcons debout sur une Cadillac, fixe le taureau droit dans les yeux avant de l’estoquer, ballade sa fine carcasse le long du delta du Mississippi, hante les marécages du pays Cajun, jette des sorts voluptueux sur les demoiselles. Il fait tout sauf gueuler vainement contre la société de consommation ou les parents abrutis. C’est un punk d’un autre temps.
Alors, quand il vient jouer en 1982 au prestigieux festival de Montreux, il faut avoir les oreilles bien ouvertes et les yeux écarquillés pour goûter un show de tout premier ordre, dont la set list fait office de best of indépassable pour la première partie de la carrière de Willy DeVille, quand il était encore Mink DeVille. A ce moment, Willy est accompagné de Louis Cortelezzi (saxophone), Kenny Margolis (claviers), Paul James (guitare lead), Joey Vasta (basse) et Tommy Price (batterie). En une heure et 18 titres, le grand Willy va passer en revue quelques-unes de ses meilleures chansons extraites des albums « Cabretta » (1977), « Return to Magenta » (1978), « Le chat bleu » (1980) et « Coup de grâce » (1981). Ici, il est question d’amour, de passion, de femmes fatales, dans un carrousel de morceaux magnifiques remplis d’émotion et soulignés par le saxophone rutilant de Louis Cortelezzi : « Slow drain », « Savoir faire », « She’s so tough », « Mixed up, shook up girl », « Love and emotion », « Maybe tomorrow », « This must be the night », « Teardrops must fall ». Tout ici rayonne, émeut, séduit. La voix de Willy DeVille résonne comme celle d’un vieux bluesman, ondule entre plusieurs registres, rappelle aussi par moments les voix de Captain Beefheart ou Frank Zappa. Oui, Willy DeVille était un chanteur hors pair, que ce soit dans le hurlement ou le hululement. Le show se termine sur un « Stand by me » d’anthologie.
La bonne idée est d’avoir doublé le CD live par la vidéo du show. Et là, c’est le jardin d’Éden. L’émotion soulevée par la musique de Mink DeVille est passée à la surmultipliée grâce au visuel. Le film du concert met en valeur chacun des musiciens, en une succession de gros plans et de plans plus larges. On y voit, on y sent Willy DeVille, dans son costume et sa chemise mauve, transpirant, envoyant son message musical à une salle en extase. Peu importe la chaleur des projecteurs, les fringues dégoulinantes de sueur, l’émotion doit passer à tout prix. Ce qui est réussi, à 200%.
Ces DVD et CD sont des témoignages formidables pour retrouver un musicien trop fin pour ce 20e siècle grossier, et pour rendre hommage à la mémoire de Willy DeVille, qui nous a quittés l’an dernier.
Pays: US
Eagle Vision ERDVCD057
Sortie: 2010/02/15