BUSTY DUCK – Zoomorphic
Un sentiment d’injustice. C’est ce qui saute à l’esprit lorsque l’on évoque la carrière de Busty Duck jusqu’ici. Ils sont en effet présents depuis une bonne dizaine d’années sur le circuit, mais malgré d’évidentes qualités (surtout scéniques), ils n’ont jamais été pris en charge par une maison de disques, ni abondamment plébiscités par les programmateurs des salles de concerts ou de festivals. En tout cas en Belgique car peu de groupes du sud du pays peuvent se targuer d’avoir joué au célèbre festival SXSW (Texas), à Londres et Dublin…
Indépendants jusqu’au bout des ongles, ils ont enregistré « Zoomorphic », leur troisième album, au même endroit que les deux premiers, c’est-à-dire à la maison avec des moyens somme toute limités, mais avec un cœur gros comme ça et une passion intacte, malgré les galères. Aux côtés du chanteur guitariste Laurent Liénard, la tête pensante du groupe, il ne reste plus qu’un membre de la formation originale, en la personne du guitariste Philippe De Brabanter. En effet, depuis la fin de l’enregistrement de l’album, ils ont déploré le départ des frères Gaetan et Adelin Leclef, respectivement bassiste et batteur. Le premier a été remplacé par Bastien Da Silva, l’ancien bassiste des Archbishops. Quant au poste de batteur, il est encore vacant à l’heure qu’il est. Signalons également une touche féminine, puisque Jessica Van de Ven et Sara Moonen sont venues rejoindre la famille Busty.
L’album débute avec un excellent « Crispy Crunchy Violent Fast », un titre légèrement pop, en partie dû au minutieux travail de production de Gaethan Dehoux (ex-The dIPLOMAT et actuel Alpha 2.1), qui a apporté une touche de légèreté, tout en conservant un esprit indie. En revanche, on se demande bien ce que Serge Gainsbourg et Kurt Cobain viennent faire dans les paroles… Le radiophonique « The Great Commander » bénéficie du même traitement, bonifié par une mélodie entêtante. Mais c’est « Bizarre » qui est bien le point culminant de ce début de plaque, avec une voix à la fois plaintive et bourrée d’émotion, sur un tempo ralenti. « Breathing At A Crawl » adopte une structure plus classique dans le chef du groupe alors que « Light Sniffer » étonne par une délicatesse dans les arrangements et une voix posée juste comme il faut sur des parties de guitares inspirées, un peu comme The La’s à l’époque…
« I Hate The Breeze » lève un coin du voile sur ce qu’aurait donné le son de Montevideo s’ils avaient poursuivi leur collaboration avec Ghinzu plutôt qu’avec Compuphonic (ici, les claviers de Gaethan Dehoux font des merveilles). Le surprenant « The Oxytocin Song », que l’on peut considérer comme un intermède, puise des idées chez Pink Floyd et dégage quelque chose d’émotionnellement puissant. Finalement, la voix de Laurent Liénard, quand elle est mise en valeur, se révèle captivante. Elle retrouve toutefois sa hargne sur le très Smashing Pumpkinsien « April 9 » (« Leftover Sleep » se situe dans la même veine). Après un plus faible « Doodle Inspiration », place à une curiosité puisque « Female », déjà présent sur les deux opus précédents, se retrouve une nouvelle fois au même endroit, mais dans une version réarrangée. L’album se clôture avec la plage titulaire, « Zoomorphic », un morceau calme agrémenté de chants d’enfants, avant un morceau bonus, le très énergique « This Is The Problem With Poetry And Songs », un peu atypique par rapport au reste de la plaque.
Busty Duck a placé beaucoup d’espoir dans cet album, qui est assez réussi et rivaliserait sans trop de peine avec Showstar, Lucy Lucy! ou autre Isola. Et si cette fois-ci, ils avaient le petit brin de chance qui leur a fait défaut jusqu’ici? Ne dit-on pas que tout vient à point à qui sait attendre?
Pays: BE
Full Frontal Nudity Records
Sortie: 2009/11/29