WEEN – At the Cat’s Cradle 1992
Pour certains, le nom de Ween ne signifiera rien. Pour d’autres, c’est un groupe culte de la période indie US de la fin des années 80 – années 90. Contemporains des Pixies ou de Dinosaur Jr., les faux frères Ween (Gene Ween, chant et guitare, alias Aaron Freeman et Dean Ween, chant et guitare, alias Mickey Melchiondo) se sont formés en 1984 et ont depuis près d’une vingtaine d’années et une quinzaine d’albums à leur actif, dont pas mal de live. Le dernier en date, issu d’un concert bootleg enregistré en 1992, révèle les frères Ween en duo, guitare et boîte à rythmes en avant, écumant un rock roots à guitares puissantes une bonne dizaine d’années avant les White Stripes.
Le son de ce live, capté dans une salle grande comme ma cuisine avec un bon quatre ou cinq personnes dans le public, est néanmoins produit comme s’il sortait d’un concert au Madison Square Garden. On y trouve les frères Ween détendus, peut-être légèrement stoned, à l’issue de neuf mois de tournée, en train de triturer leurs instruments sur d’improbables élucubrations rock, heavy rock, space-rock, folk-rock, aux effets limités vu le nombre de musiciens sur scène, mais profondément prenants quand on repense à l’époque, 1992, la vague grunge, les derniers feux des Pixies, encore un de ces moments où le rock avait réussi à prendre le show-business de court et avait couru un peu en roue libre avant de se faire rattraper par les majors, le fric, l’organisation, un mot qui sied si mal au rock ‘n’ roll.
Entre hard rock primaire (« Don’t get 2 close (2 my fantasy) », « Marble tulip juicy tree »), tentative reggae (« The goin’ gets tough from the getgo », « Mango woman », un truc hallucinant entre Bob Marley et Arno) ou fulgurance génialement hésitante (« Captain Fantasy ») et death metal hendrixien (« You fucked up »), les Ween se livrent à un exercice sonique de joyeux potaches lâchés dans la nature, improvisant, chantonnant, déconnant. On a même droit à une extraordinaire chanson en français où le chanteur semble placer tous les mots français qu’il connaît, au détriment d’un quelconque sens (« Ode to René »). Le son clair du live rattrape bien des approximations et l’ensemble prend essentiellement un caractère documentaire, à défaut d’être un album étalon pour mesurer la qualité des chaînes hi-fi. Un second disque est un DVD avec trois extraits de concerts à des périodes différentes.
On peut néanmoins se laisser dériver au fil de ce concert intéressant, mais imprévisible, chargé de nostalgie pour ceux qui étaient en âge de fracturer des cabines téléphoniques au début des années 90 et qui gagnera le cœur de tous ceux qui cherchent à trouver une alternative aux Pixies ou aux Eels, et à prouver que les White Stripes n’ont rien inventé.
Pays: US
Schnitzel Records SRCD1255226
Sortie: 2008/12/01