WAY’S WOLF, Darryl – Canis Lupus
Darryl Way est avant tout violoniste. Une référence en matière de violon électrique. C’est un des membres fondateurs de Curved Air, un groupe de rock progressif qui sorti son premier album « Air Conditionning » en 1970 (le groupe s’est d’ailleurs assez récemment reformé et effectue cette année une tournée en Grande-Bretagne). Darryl Way est en quelque sorte la touche qui fait la particularité de ce groupe : le violon ! (avec la voix de Sonja Kristina qui avait participé à la tournée de « Hair »). En d’autres termes Darryl est à Curved Air ce que Ian Anderson est à Jethro Tull.
Après la sortie de « Phantasmagoria », le troisième opus de la formation, en 1973, Darryl quitte le groupe. Il sera remplacé sur le quatrième album par Eddie Jobson, autre prince du violon électrique, venant de Roxy Music. Mister Way rejoindra Curved Air sur le cinquième album, « Midnight Wire », sur lequel joue un jeune batteur qui va devenir célèbre : Stewart Copeland.
Entre 1973 et 1975, Darryl Way va sortir trois album avec le groupe, qu’il baptise Darryl Way’s Wolf, sur le label Decca – Deram, et réédités cette année par Esoteric Recordings.
« Canis Lupus », sorti en 1973, est le premier de la série. Le label Deram (Decca) est celui des formations Canteburiennes Camel et Caravan (entre-autres).
La distribution est intéressante, force est de reconnaître qu’il y a du beau monde :
- Darryl Way (forcément!) : violon, viole et claviers
- Dek Messecar : basse et chant, qui rejoindra plus tard Caravan
- John Etheridge : guitariste parti ensuite chez Soft Machine (et qui jouera d’ailleurs prochainement sur la scène du Spirit of 66). John Etheridge sera qualifié plus tard par Pat Metheny comme l’un des meilleurs guitaristes du monde. Pas mal comme référence, non ?
- Ian Mosley : à la batterie, qui jouera ensuite avec Steve Hackett, avant de devenir le batteur de Marillion
- Monsieur Ian Mc Donald : produit l’album et joue des claviers sur « Chanson sans paroles ». Oui, oui, c’est bien le grand Ian Mc Donald, le formidable flûtiste issu de King Crimson, et qui a co-écrit l’album « In the court of the Crimson King ».
Venons-en aux chansons :
- « The Void : Belle entrée en matière dans le style de l’école de Canterbury. Darryl y joue essentiellement des claviers. John Messecar est fort bon au chant. Ca swingue déjà bien ! Petit bémol : le fondu maladroit qui termine le morceau, bof après tout, trois ans plus tard sur « A Trick Of The Tail », Genesis fera la même chose !
- « Isolation Waltz » : plage pêchue, particulièrement la ligne de basse qui rappelle ce qu’un groupe comme Slade s’amusera à faire plus tard, sur « Coz I luv’ you » (par exemple). Darryl vient se greffer là-dessus, au violon, bien sûr. C’est gai, sautillant. Nos compères ont dû bien s’amuser en jouant ce titre.
- « Go Down » : On se calme après le titre précédent. Ici on change de soliste, c’est John Etheridge qui nous offre une très belle phrase de guitare. Un régal !
- « Wolf » : la cadence s’accélère de nouveau, style Canterbury, violon en plus, même fondu que sur le premier morceau. C’est la chanson qui se rapproche le plus de Curved Air. Est-ce pour cela qu’ils en ont fait un single ?
La suite de l’album est instrumentale : - « Cadenza » : plage rythmée, comme son nom l’indique. Chaque intervenant étant tour à tour mis en avant, y compris Ian Mosley qui a droit à son solo de batterie, pas trop long, ce qui le rend très digeste.
- « Chanson sans paroles » : Ben oui, je vous l’avais dit !!! La fin du disque est instrumentale ! Plage baroque très zoulie, intermède jazz, avec la participation de Ian Mc Donald aux claviers. Miam !
- « Mc Donald’s Lament » : morceau romantique en hommage à l’illustre producteur de cette galette. Pas de meilleure conclusion pour un album aussi réussi, dont l’originalité, la légèreté, et surtout la qualité de la musique et de son interprétation n’est pas sans rappeler un certain Mc Donald and Giles pièce maîtresse du progressif, sortie dans la foulée de l’immense « In the court of the Crimson King ».
Je ne m’étendrai pas sur les bonus, surtout destinés aux fans (quoique « Spring Fever » soit bien foutu !). La version single de « Wolf » est moins bonne que la version de l’album, la batterie étant plus étouffée.
Voilà donc un album formidable, mélange de styles, entre le jazz-rock (façon Canterbury), le progressif et Jean-Luc Ponthy (archet oblige !). Je vous donne un avis de pur profane (je n’ai connu ni le Wolf ni Curved Air à la sortie de leurs albums, j’étais un peu jeune !), au risque de passer pour un iconoclaste, je trouve que ceci a mieux vieilli que Curved Air.
Ne hurlez pas au loup ! Curved Air a publié de grandes choses, « Second Album » ou « Phantasmagoria » sont des disques majeurs à joindre à toute discothèque qui se respecte et « Back street luv’ » est vraiment une grande chanson. Quoiqu’il en soit, ce « Canis Lupus » vous invite à croquer à pleines dents un morceau choisi de l’histoire de la musique.
Pays: GB
Esoteric Recordings ECLEC2065
Sortie: 2008/08 (réédition, original 1973)