BON IVER – For Emma, forever ago
Que sait-on de Bon Iver? Pas grand-chose, a priori un énième chanteur de folk américain qui aurait vécu comme un ermite dans sa cabane paumée au fin fond du Wisconsin pendant l’hiver. De cette vie d’ascète partagée entre session d’enregistrement et coupage et récolte du bois en tracteur serait donc issu « For Emma, forever ago ». Ne soyons pas dupe, car la bio qui est destinée à nous vendre ce nouvel artiste en rajoute des tonnes. Donc reprenons: un album accouché dans des conditions difficiles, une pochette soignée sur laquelle on peut admirer une photo sublime, l’apposition du label 4AD et hop, nous voilà avec un beau disque qui sort avec un peu de retard quand même vu que nous sommes pratiquement en Juin et qu’il sera malaisé de se réchauffer au coin du feu avec. Il faudra qu’un jour les sociologues du rock s’interrogent sur le besoin du public d’acclamer de tels disques. Peut-être s’agit-il là d’une valeur refuge face aux dangers qui nous menacent. Le monde est bien triste en ce moment, et il est possible que nous recherchions chez ces chanteurs prophètes un quelconque réconfort.
Si vous ouvrez le mensuel Mojo de ce mois-ci, vous aurez la bonne surprise de découvrir que « For Emma… » est disque du mois. Parlons de ce disque: tout y est. L’ambiance d’église parfaitement recréée sur « Lump Sum » introduit cette balade très mélancolique dont l’écho semble se perdre dans l’infini de la toundra nord-américaine. Comment résister à l’attachement à l’écoute des chœurs gospel de « The Wolves ». Un conseil: écoutez « For Emma… » dans le métro bruxellois et fermez les yeux. Les couloirs glauques de la STIB et ses tunnels les plus sombres se transformeront en un paysage nordique enseveli sous la neige que traverse une locomotive échappée de « Runaway Train ». Tout cela nous rappelle l’excellent film de « Into the Wild » de Sean Penn. Album parfait pour un printemps mi-figue mi-raisin et un été qui tarde à venir.
Pays: US
4AD
Sortie: 2008/05/12