HARTLEY BAND, Keef – Overdog

Avec la publication de trois albums en deux ans (« Halfbreed » en 1969, « Battle of North West Six » et « The Time Is Near… » en 1970), le Keef Hartley Band tient indiscutablement un bon rythme. Miller Anderson n’y est pas étranger puisque son inspiration ne semble pas se tarir, et cela malgré l’instabilité chronique de la bande à Keef Hartley, confirmée une nouvelle fois durant l’enregistrement de « Overdog ».

En effet, fin 1970, les deux souffleurs, Lyle Jenkins et Dave Caswell, arrivés en début d’année, s’en vont et le claviériste Mick Weaver est engagé. Celui-ci vient de quitter le Grease Band, l’ex-groupe de Joe Cocker. Il rejoindra ce dernier après son aventure avec Keef Hartley et poursuivra une belle carrière, toujours en cours actuellement (Frankie Miller, Eric Burdon, David Gilmour, Gary Moore, Roger Chapman, …).

Si « The Time Is Near… » était excellent, « Overdog », plus acéré et nerveux, l’est tout autant malgré une plus grande dispersion qui aurait pu lui nuire. La disparition des cuivres sur certains titres est compensée sans difficulté par la présence d’un claviériste de talent. En outre, les renforts de Jon Hiseman aux percussions (ex-John Mayall, fondateur de Colosseum, collaborateur occasionnel de Jack Bruce, …) et de Johnny Almond à la flûte (ex-John Mayall et fondateur avec le guitariste John Mark de Mark-Almond) sont loin d’être anecdotiques. Quant au trio de base, il est en super forme.

Le démarrage est énergique avec « You Can’t Choose », une pièce aux accents « Rhythm & Blues » très prononcés, que les cuivres appuient tout en puissance. Soutenu par les chœurs, Miller Anderson y force sa voix, devenue plus rauque avec le temps. La guitare, bourrée de distorsions, accompagne alors le mouvement jusqu’au lancement d’un flamboyant solo, exécuté après l’arrêt du chant. Basse et batterie impriment un rythme d’enfer. Peu de changements avec « Plain Talkin’ », si ce n’est la disparition des cuivres au profit des claviers.

« Theme Song / En Route / Theme Song » apparaît comme le pic de l’album. Composé par Miller Anderson, « Theme song » encadre la pièce centrale. Elle est chantée tout en douceur et légèreté, avec un simple accompagnement à la guitare acoustique et à la flûte. C’est divin ! « En Route », composé par Gary Thain et Keef Hartley, embraie et décolle. Le bassiste marque le tempo en puissance, suivi par les percussionnistes. Ils évoluent en parallèle et se stimulent mutuellement. Là-dessus, le flûtiste s’engage dans un long solo palpitant, relevé par le claviériste qui poursuit la manœuvre. En fin de parcours, le premier s’insinue par petites touches d’abord dans le solo du second. Fantastique !

« Overdog » conserve la dynamique de la pièce précédente, mais retrouve le ton de « Plain Talkin’ ». Miller Anderson hurle et part dans un solo court et bien gras à la guitare. Il reproduira sa prestation à la fin. Entre ses deux parties, Mick Weaver nous gratifie d’un long et somptueux solo à l’orgue, digne de Rod Argent. Que du plaisir !

« Roundabout » maintient le niveau. Peter Dines, le premier claviériste du Keef Hartley Band, est revenu faire un petit tour avant l’arrivée de Mick Weaver. Il aborde la pièce comme le ferait Gregg Rolie dans Santana. C’est ample et envahissant mais idéal et impressionnant. Gary Thain imprime toujours un rythme endiablé, Keef Hartley fait tonner ses cymbales et les cuivres claironnent. Miller Anderson arrive enfin avec son chant vigoureux et son épais son de guitare. Lorsqu’il se retire, tous s’y mettent. La qualité pleut à chaque instant. La version en bonus, très légèrement édulcorée, n’apporte rien de plus, mais ne gâte jamais le plaisir.

Surprenant, « Imitations from Home » ouvre la voie au « Jazz-Rock » aérien que produira bientôt le Santana Band avec « Caravanserail ».

« We Are All the Same » est une agréable ballade gentillette dans la ligne des rêveries d’une époque.

En conclusion, « Overdog » est un album réussi. Les compositions sont bien chaloupées et les musiciens apparaissent en grande forme. Plus musclé que le précédent, « The Time Is Near… », moins marqué par les cuivres, il devrait pourtant plaire à un public similaire.

Les titres (43’09) :

1. « You Can Choose » (M. Anderson) (5’30)
2. « Plain Talkin’ » (M. Anderson) (3’24)
3. « Theme Song / En Route / Theme Song » (M. Anderson/K. Hartley/G. Thain) (8’06)
4. « Overdog » (M. Anderson) (4’21)
5. « Roundabout » (M. Anderson) (6’07)
6. « Imitations from Home » (K. Hartley) (3’36)
7. « We Are All the Same » (M. Anderson) (4’46)
8. « Roundabout » (M. Anderson) (2’57) (*)
9. « Roundabout » (M. Anderson) (4’18) (*)

(*) en bonus (version en Single, face A et B)

Les participants :

• Miller Anderson : Guitares & Chant
• Gary Thain : Basse
• Keef Hartley : Batterie & Percussions
• Mick Weaver : Piano électrique & Orgue (2, 3, 4, 6, 7)
• Dave Caswell : Trompette & Bugle, (1, 5, 6, 8, 9)
• Lyle Jenkins : Saxophone Ténor & Flûte (5, 8, 9)
• Peter Dines : Claviers (5, 8, 9)
• Jon Hiseman : Batterie & Percussions (3, 6)
• Johnny Almond : Flûte (3)
• Ingrid Thomas : Chœurs
• John Knighton : Choeurs
• Valérie Charrington : Chœurs

Pays: GB
Esoteric Recordings ECLEC 2048
Sortie: 2008/03/17 (réédition, original 1971)