NES, Silje – Ames Room
Silje Nes nous vient de Bergen, en Norvège. Elle a reçu une formation classique au piano. Elle est graphiste de profession et musicienne depuis quelques années, par goût. Elle s’est mise à étudier divers instruments en autodidacte puis à composer des morceaux de jazz pop électronique dans son appartement. On peut dire qu’elle le fait avec talent. Petit à petit, elle a fait de sa voix un instrument de plus. Elle réside maintenant en Allemagne et prépare une tournée en Europe et aux Etats-Unis. Cette tournée passe par la Belgique le 23 et le 24 février.
Ce premier album est un recueil des chansons qu’elle a composées seule, à part « Over All », le premier titre, entre août 2004 et l’été 2007. Sa voix très douce ressemble à celle d’une petite fille et est pleine de fraîcheur. Elle joue du violoncelle, du xylophone, du glockenspiel, de la batterie, de la guitare, de la basse, de la trompette, du melodica et de divers instruments de percussion. Elle se sert d’un laptop pour la programmation. Sur scène, elle joue tout toute seule.
Sa musique est faite de bruitages divers, de musique, de bruits de voix et de samples programmés, comme dans « Over All », où elle a reçu un coup de main d’un certain Kristian Stockhaus. « Drown » est plus mélodieux et on a droit à un chant tout ce qu’il y a de plus conventionnel mais toujours avec sa voix confidentielle. Il n’empêche que ce très beau morceau qui comporte un thème récurrent mérite de figurer dans une anthologie.
« Shapes, Electric » est plus proche des bruitages électroniques parsemés d’effets spéciaux faits de bric et de broc, dans une sorte de cacophonie organisée d’où émerge par intermittence sa voix qui semble comme toujours mal assurée. « Ames Room » dispose de petits thèmes joués à la guitare sur lesquels viennent se greffer des bruits de voix et d’autres instruments pour former un court magma sonore construit par bribes et morceaux, avec en toile de fond des percussions métronomiques.
« Giant Disguise » débute par une phrase musicale répétée à foison et ponctuée par des percussions et des samples programmés. C’est le titre le plus long de l’album et le son lancinant revient comme un leitmotiv en couches successives pour bercer nos oreilles d’une mélodie bien agréable où la voix presque inaudible remplit son rôle à la perfection et où la ligne de basse impressionne. Brillant ! « Dizzy Street » est plus enjoué et plus rythmé et ce sont les instruments comme le xylophone et le glockenspiel qui y jouent les vedettes sur un rythme à la « Steppin’ Out » de Joe Jackson.
L’instrumental « Long Shadows Left Around » débute par des sons aigus relayés par des percussions et des sons aléatoires générés par des bruits d’instruments divers qui se chevauchent et s’entrecroisent pour former un amalgame sonore savamment dosé où la trompette se transforme en séductrice. « Bright Night Morning » comporte une structure plus classique sur laquelle viennent s’emboîter la voix et les samples pour créer un décor sonore empreint de mystère titillé par des bruits produits à contretemps. Tout beau !
« Recurring Dream » est un morceau joué à contretemps qui s’énerve rapidement pour faire place à une guitare incisive et une basse qui lui répond du tac au tac. La voix semble toujours trop faible et les paroles sont presque inaudibles mais dans sa logique, il y a une explication : elle n’est pas là pour se mettre en valeur mais pour jouer son rôle d’instrument supplémentaire. Sur « Searching, White », ce sont des samples bizarroïdes et sourds qui mènent la danse, la voix servant en quelque sorte de catalyseur entre chaque changement de rythme, avec toujours cette recherche constante d’innovation.
C’est une trompette d’enfant qui émet des sons sur « Magnetic Moments Of Spinning Objects », qui s’étire tout en douceur, entrecoupé de bruitages et de sons émis par des jouets ou imitant une bande magnétique que l’on déroule puis que l’on arrête. De nouveau, c’est une cacophonie préparée avec soin qui se ballade à travers ce morceau surprenant. Plus proche des standards, « Melt » relève des mêmes mécanismes de déstabilisation mais sur un rythme jazzy fort différent et dans des sonorités plus mélodieuses.
« Escape » débute comme une petite chanson réservée aux enfants et se promène dans un monde fascinant fait de rêverie et de poésie pleine d’innocence tandis que « No Bird Can » évoque plutôt un endroit plein de surprises sur un rythme lent qui imite des bruits d’ailes, laisse apparaître un semblant de mélodie récurrente et se transforme petit à petit en un monde féerique plein de mystère et de découvertes.
Très bon album. Cette petite merveille plaira aux amateurs de rock expérimental et aux nostalgiques du monde merveilleux de l’enfance.
Pays: NO
Fatcat Records FAT-SP16
Sortie: 2008/01/21