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CHARLOTTEFIELD – What Are Friends For

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Charlottefield vient de Brighton, sur la côte anglaise, côté sud. La première chose à faire quand on écoute « What Are Friends For », c’est de faire taire son aversion pour le chant enragé, qui semble issu tout droit du satanisme propre au « black / death metal ». Il faut aussi faire abstraction de l’interruption sur le dernier titre, déjà que l’album n’est pas très long. Bref, il faut faire taire ses préjugés si on ne veut pas passer à côté d’un album dont les parties instrumentales et les arrangements valent le détour, même s’il est pratiquement inclassable. Tout au plus peut-on lui trouver de vagues ressemblances avec The Fall, Fugazi ou The Big Sleep et l’affubler du nom de post punk. Mais c’est déjà le trahir.

Au fond, le chanteur Thomas House est le reflet exacerbé du monde invivable dans lequel on nous fait vivre. On ne le répétera jamais assez, le rock est le thermomètre de la société. Sur le plan instrumental, on est en face d’un rock expérimental qui donne à l’album ses lettres de noblesse. Les guitares de Thomas House et Adam Hansford donnent libre cours à leur créativité au cours de leurs dialogues, bien soutenus par une rythmique excellente avec Chris Butler à la basse, omniprésente, et Ashley Marlowe au « drum kit ».

On assiste en permanence à une alternance entre violence crue et calme passager, entre laideur affirmée et beauté primitive, comme si on nous décrivait tour à tour les contraintes auxquelles nous sommes confrontés puis les aspirations des hommes normalement constitués. Pour la tension omniprésente, on pense à l’excellent groupe new yorkais The Big Sleep.

Satanisme avons-nous dit au début. Le début de « Beatings » est de bon augure : la ligne de basse est aguichante, le batteur se démène comme un beau diable et les guitares démarrent à tombeau ouvert. Surgit alors le chanteur à un rythme d’enfer, comme un diable sorti d’une boîte. Il est comme ça, Thomas House, c’est sa façon à lui de s’exprimer. Il vocifère, il gueule, il éructe et il crache sa haine de la société. Apparemment, ça le soulage. Heureusement, on le retrouve plus calme un peu plus loin et on apprécie d’autant mieux la musique car « Beatings » n’est rien d’autre qu’un festival vocal féroce qui suit une intro normale.

Pour apprécier le groupe à sa juste valeur, il faudrait d’abord écouter « Late Repeat », un morceau versatile qui laisse apparaître un chanteur beaucoup moins énervé. Le morceau est manifestement inspiré par le jazz et l’improvisation est la règle. On y joue d’instinct, sans concertation entre les membres et la recherche de sonorités nouvelles est un souci constant pour les musiciens.

Vocalement, « Wrong On Purpose » ressemble comme deux gouttes d’eau bénite au premier titre. Une intro normale, un chanteur énervé tout au long du morceau. « Pacifically » est d’un tout autre genre : les divers dialogues entre instruments, entrecoupés par le chant tantôt excité, tantôt nuancé, frisent la perfection et donnent une bonne idée du contraste entre les différents thèmes. De nouveau, la basse abat un travail considérable, tandis que le batteur rivalise avec ses trouvailles.

Viennent ensuite « Snakes », « Broken Bell », qui appartient au côté beauté crue sur fond de musique électrique calme et versatile, et « Threes », qui est un morceau plus nerveux certes, mais qui montre des qualités certaines de jeu et une voix largement calmée au point d’en devenir harmonieuse et de s’intégrer parfaitement dans cet ensemble de qualité. On y découvre enfin les atouts incontestables du chanteur.

Enfin, « Backwards » fait partie de la catégorie chant possédé mais il comporte aussi des parties instrumentales d’anthologie. Le titre caché, largement instrumental mais accompagné des vociférations habituelles, s’accorde parfaitement à l’ensemble de l’album. On peut se demander la raison d’être de l’interruption, mis à part le souci d’arrondir un temps un peu insuffisant.

Cet album qui alterne violence et calme, laideur et beauté dans une tension permanente, est une véritable découverte, à condition de lui accorder plusieurs écoutes. Ses meilleurs titres sont « Snakes », « Broken Bell » et « Threes ». Charlottefield sera à Kortrijk, The Pits, le 27 février 2008 à 20 heures. Osez sortir des sentiers battus, osez l’originalité et la différence et faites connaissance avec le rock de demain.

Pays: GB
Fatcat Records FATCD54
Sortie: 2008/01/21

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