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WYATT, Robert – Comicopera

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Robert Wyatt jouait de la batterie et s’est fait connaître comme une des composantes du merveilleux Soft Machine, un groupe art rock fantastique qui a eu un certain succès au milieu des années soixante notamment avec Mike Ratledge et Kevin Ayers. Il a quitté le groupe quelques années plus tard. Peu après la sortie de son premier album solo, en 1973, il est tombé par la fenêtre lors d’une party bien arrosée et il est devenu paraplégique. Plus question de jouer de la batterie malgré un traitement énergique et une rééducation très dure.

Il a néanmoins sorti un excellent album, « Rock Bottom », en 1974. Son dernier album studio, « Cuckooland,», est sorti en 2003. Entre les deux, il a notamment fait partie de Matching Mole. Il n’a jamais cessé de travailler, notamment avec des grands noms du rock expérimental comme Nick Mason et David Gilmour (Pink Floyd), Michael Mantler, Björk et Ryuichi Sakamoto. Sur le plan politique, il est toujours resté fidèle à des idées très marquées à gauche, surtout pendant la période Thatcher.

L’album a été enregistré chez Robert Wyatt à Louth, en Angleterre, et au Gallery Studio de Phil Manzanera. C’est Robert Wyatt qui produit l’album. Le premier acte, « Lost In Noise », est une histoire d’amour qui commence mal et qui finit mal. « Stay Tuned » est un morceau très doux composé par Anja Garbarek. Les claviers de Brian Eno enveloppent ce morceau qui part dans une direction jazzy lente et soft, avec par moments un chant plaintif et très aérien de Alfreda Benge. Le titre qui lui succède, « Just As You Are », est également chanté par la femme de Robert Wyatt mais cette fois il lui répond avec sa voix triste. Le caractère jazz est encore accentué et le morceau se déroule tout en subtilité, avec des cuivres qui ont le bon goût d’être relativement discrets. « You You » présente aussi l’atmosphère caractéristique du début et les cuivres s’en donnent à cœur joie. Ils partagent la vedette avec la voix chaude et plaintive de Robert Wyatt. Certains trouveront que ça traîne un peu en longueur mais la musique est très élaborée et très belle. « A.W.O.L. » est un hymne à la solitude empreint de tristesse et les cuivres sont omniprésents sur « Anachronist », un très beau titre dont le tempo est très lent. On est vraiment aux confins du rock.

Le deuxième acte, « The Here and the Now », est une description des méfaits de la guerre et débute par « A Beautiful Peace », qui illustre parfaitement l’insouciance qui précède tout conflit. « Be Serious » change de ton mais garde un dynamisme de bon aloi, avec la guitare de Paul Weller en évidence. Avec des bruits de tambour et des cuivres bien mis à l’avant-plan, « On the Time Square » illustre parfaitement l’orientation plus belliqueuse de la situation. Lui succède « Mob Rule », un morceau lent très élaboré et difficile d’accès dominé par la voix tourmentée de Wyatt. Les cuivres se taisent comme pour mieux apprécier la situation. « A Beautiful War » lui fait suite et on s’enfonce ainsi dans une déprime entrecoupée par des moments d’espoir où la voix répète « It’s a beautiful day » comme un leitmotiv pour conjurer le mauvais sort. « Out of the Blue », loin de constituer un morceau dynamique, vogue vers la même atmosphère feutrée et un peu monotone, avec les dialogues des claviers et des cuivres. Puis vient progressivement l’espoir de la fin de la guerre …

Entamant le troisième acte, « Away with the Fairies », et chanté en italien, « Del Mondo » est un morceau d’une très grande beauté. Avec ses sonorités latines, la troisième partie n’est pourtant pas plus gaie mais ce titre est particulièrement triste et tout cet acte est un réquisitoire contre la guerre. « Cancion de Julieta » est aussi un titre très lent et prenant qui montre bien les souffrances physiques et morales engendrées par la guerre. « Pastafari » est une suite d’improvisations remarquables mais le morceau est un peu longuet et pêche par son manque de dynamisme. Très bien joué, il peut néanmoins plaire aux adeptes du jazz. On retrouve la voix de Alfreda Benge sur « Fragment », une autre chanson triste. « Hasta Siempre Comandante » est un chant cubain qui marque la fin de l’opéra. La boucle est bouclée : Wyatt reste fidèle à ses idées de jeunesse.

Album à l’atmosphère romantique, très ardu mais très beau qui se situe en dehors de la réalité et demande une immersion totale. Il n’y a guère de rapport immédiat avec le rock et il ne fera pas l’unanimité. Son tempo lent et sa longueur risque de décourager les moins patients. Dommage.

Acte I: Lost in Noise

  1. « Stay Tuned »
  2. « Just as You Are »
  3. « You You »
  4. « A.W.O.L. »
  5. « Anachronist »

Acte II: The Here and The Now

  1. « A Beautiful Peace »
  2. « Be Serious »
  3. « On the Town Square »
  4. « Mob Rule »
  5. « A Beautiful War »
  6. « Out of the Blue »

Acte III: Away with the Fairies

  1. « Del Mondo »
  2. « Cancion de Julieta »
  3. « Pastafari »
  4. « Fragment »
  5. « Hasta Siempre Comandante »

Pays: GB
Domino / Munich WigCD202
Sortie: 2007/10/01

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