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WHITE STRIPES (The) – Icky Thump

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Jack White prouve une fois de plus qu’il a du génie. On le savait depuis « Elephant » et la confirmation est venue avec « Get Behind Me Satan » malgré l’accueil mitigé de certains fans. Ici, il renoue avec sa créativité habituelle et avec un son basique. Rien n’est jamais banal avec lui et son ex, qui le comprend mieux que personne, lui file un coup de main pour arriver à ses fins. C’est ce duo de choc qu’il faut supporter ici, avec ses qualités et ses défauts.

Après son escapade avec les Raconteurs, il revient à ses premières amours. Pour être déroutant, cet album est déroutant. Il suffit pour s’en persuader d’écouter « Icky Thump », où les claviers tiennent une place de choix, ou « St. Andrew (This Battle Is In The Air) ». Mais ce ne sont pas les seuls titres déconcertants et de ce point de vue, « Little Cream Soda » n’a rien à leur envier. A la première écoute, on trouve franchement cet album génial.

Après, une écoute attentive révèle ici et là la façon d’attaquer la note de Jimmy Page à la guitare et on se dit qu’on a déjà entendu ça quelque part, il y a bien longtemps. Somme toute, le génie utilise un procédé pour arriver à ses fins, ce qui n’enlève rien à son talent. Sa façon d’utiliser les atouts du duo, compte tenu du jeu fruste de Meg White à la batterie, relève de l’exploit. Son originalité consiste à chanter sur un rythme élevé des paroles qui en deviennent parfois inintelligibles ; il consiste aussi à imprimer un jeu heavy et syncopé à la guitare et à composer des mélodies imparables sur un rythme binaire.

De plus, il diversifie ses sources d’inspiration. Il va la chercher tantôt au Mexique, tantôt en Ecosse. Le sujet des morceaux tourne le plus souvent autour des rapports hommes – femmes mais sur « Icky Thump », il aborde aussi le problème de l’immigration. Il nous rappelle fort à propos que les WASP américains, si prompts à défendre leur territoire contre les « intrus », sont eux-mêmes des immigrants : les Indiens étaient là avant eux ! Une telle intervention est pourtant rare : White n’aime pas faire de politique.

La ressemblance avec Led Zeppelin est déjà perceptible sur « Icky Thump », déjà cité, mais surtout sur « You Don’t Know What Love Is (You Do Just As You’re Told) ». Là, c’est assez flagrant. Jack White a d’autant plus de mérite qu’il n’a pas un John Bonham à sa disposition mais il adapte ses compositions à la sauce garage rock minimaliste utilisée par le groupe. Dans la foulée, « 300 M.P.H. Torrential Outpour Blues », un mid tempo en demi-teinte, étale un son groovy assez extraordinaire. Well done, Jack !

C’est avec « Conquest », une composition de Corky Robbins généralement interprétée par Patti Page, qu’il révèle tout son génie, si pas dans la façon de chanter, au moins dans l’idée de base. La voix complètement décalée reproduit le morceau sans grand changement par rapport à l’original mais il y apporte sa propre sensibilité et Regulo Aldama y joue de la trompette. Sans son final ultra accéléré, « Bone Broke » serait un titre quelconque mais encore une fois, la patte de White est passée par là.

On a droit ensuite à une escapade en Ecosse avec le remarquable « Prickly Thorn, But Sweetly Worn », dont la fraîcheur tonique est une bénédiction. Elle se confirme sur le très court mais génial « St. Andrew (This Battle Is In The Air) » chanté par Meg White. Ici aussi, le talent créateur de White est perceptible et la chanteuse occasionnelle tire son épingle du jeu. C’est comme une récréation décidée de commun accord avant d’aborder le vif du sujet. Brillantissime !

« Little Cream Soda » est aussi un titre déroutant; il met en scène une guitare abrasive et lourde en face des claviers et on frôle une inversion des rôles. Sur « Rag And Bone » au contraire, Meg et Jack jouent sur le quiproquo et pratiquent l’humour avec bonheur sur un rythme plutôt décoiffant, toujours avec cette attaque à la guitare si particulière. Jack et Meg se partagent de nouveau le chant mais murmuré cette fois sur « I’m Slowly Turning Into You », nettement moins enjoué. On se rapproche cette fois du blues mais toujours avec la Jack White touch et il ne fait rien comme tout le monde.

« A Martyr For My Love For You » fait apparaître la dualité entre guitare acoustique et batterie hypnotique puis entre guitare et claviers. La phrase musicale principale revient avec insistance pour titiller les percussions mais à la fin, la voix reste maître du jeu. Apparaît ensuite le remarquable « Catch Hell Blues », un festival qui mélange les styles de blues, qui accélère puis ralentit pour faire un inventaire de ce qui existe depuis sa création. Le talent de White y crève de nouveau les yeux et les oreilles. Sans être mauvais, « Effect And Cause » n’est pas de la même veine et souffre de la comparaison mais il fait contraste avec ce qui précède et lui apporte plus encore de variété.

Album de la trempe de « Elephant ». Est-il utile de préciser davantage ?

Pays: US
XL Recordings / V2 XLCD271
Sortie: 2007/06/18

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