WELLER, Paul – Catch – Flame!
Ce qui frappe à l’écoute de ce double album, c’est la cohérence dans le choix des morceaux. On croirait qu’ils ont été écrits pour un album unique alors que certains titres sont distants de près de 30 ans. Cela illustre la constance d’un artiste dont la carrière est pourtant passée par trois stades fort différents : 1. The Jam (1975 – 1982) pendant la période punk ; 2. The Style Council (1983 – 1990), où le funk, le jazz et la soul faisaient bon ménage mais sans susciter l’adhésion du public et moins encore celle des firmes de disques, qui après quelques années lui ont refusé le moindre contrat. Adulé à la fin des années 70, il en a éprouvé beaucoup d’amertume et un ressentiment profond envers les gens du métier ; 3. une carrière solo (1991 – ?) qui se porte plutôt bien, merci.
L’attitude du public rock anglais envers ses artistes est le plus souvent empreinte de complicité et il réagit au quart de tour aux sollicitations des groupes britanniques. Il faut voir (ou entendre) Paul Weller en concert en Angleterre (ici, c’est à l’Alexandra Palace de Londres le 5 décembre 2005) pour comprendre à quel point il compte encore dans le rock d’aujourd’hui. Longtemps boudé par l’Amérique, son succès ne s’est jamais démenti dans les îles et sa popularité y est toujours très grande. En contrepartie, il met un point d’honneur à donner le meilleur de lui-même, pour le plus grand bonheur de l’auditeur.
Le concert démarre fort avec « The Weaver », qui remporte un beau succès. Il enchaîne tout en puissance avec « Out of the Sinking », un titre que l’on est habitué d’entendre à ses concerts. L’énergie qui se dégage de la prestation de Weller et ses musiciens est immense. « Blink & You’ll Miss It » et « Paper Smile » font appel à des souvenirs beaucoup plus récents : ce sont des extraits de « As Is Now », son dernier album studio.
Il interprète ensuite des titres allant de 1995 à 2005 mais on les croirait sortis en même temps du même moule tant l’ensemble est cohérent de bout en bout. Le premier CD se termine par « Porcelain Gods / I Walk On Gilded Splinters », tandis que le deuxième commence par un titre du Jam de près de 30 ans. Il n’y a pourtant aucun hiatus entre les morceaux et le style du bonhomme traverse toutes les périodes avec le même flegme. Sa musique vient de l’intérieur. On a même droit à un solo de batterie comme au bon vieux temps sans que ça soit le moins du monde choquant.
C’est seulement à partir de « You Do Something To Me », un très beau chant d’amour, que l’artiste reprend son souffle après plus d’une heure de concert où il n’a pas ménagé ses efforts. « Wishing on a Star », « Wild Wood », un classique, et « The Pebble & the Boy », beaucoup plus élaboré, terminent la partie plus calme du double album.
C’est à partir de « That’s Entertainment », qui porte bien son nom, que Paul Weller et ses musiciens trouvent leur second souffle et nous gratifient d’une prestation « live » irréprochable. « Broken Stones », « Long Hot Summer » et « Shout To The Top », de la période The Style Council, s’enchaînent sans transition jusqu’au paroxysme, que l’on suppose être le dernier rappel, « A Town Called Malice », exécuté dans la joie avec le sentiment du devoir accompli. Un tout grand concert de 1 heure 45 que l’on regrette de ne pas avoir vécu sur place.
Excellent album live avec des musiciens qui sont loin d’être blasés et nous donnent le meilleur d’eux-mêmes devant un public acquis à leur cause. C’est en quelque sorte un raccourci de la carrière de Paul Weller : on y sent poindre l’héritage de Ray Davies et du Who mais aussi celui de Traffic (avec Steve Winwood) et des Small Faces (avec Steve Marriott). A l’inverse, on y décèle l’influence qu’il a eue sur les Smiths et Oasis et, plus près de nous, sur Ocean Colour Scene. Ces derniers le citent comme leur principale référence. Il est critiqué plus pour sa personnalité sans concession que pour sa musique et on ne lui pardonne pas grand-chose mais chacun, au fond de lui-même, sans parfois l’avouer, reconnaît son talent.
Titres du CD 1:
- « The Weaver », extrait de l’album « Wild Wood » (1993)
- « Out of the Sinking », extrait de l’album « Stanley Road » (1995)
- « Blink & You’ll Miss It », extrait de l’album « As Is Now » (2005)
- « Paper Smile », extrait de l’album « As Is Now » (2005)
- « Peacock Suit », extrait de l’album « Heavy Soul » (1997)
- « From the Floorboards Up », extrait de l’album « As Is Now » (2005)
- « The Changingman », extrait de l’album « Stanley Road » (1995)
- « Savages », extrait de l’album « As Is Now » (2005)
- « Going Places », extrait de l’album « Illumination » (2002)
- « Up in Suze’s Room », extrait de l’album « Heavy Soul » (1997)
- « Porcelain Gods / I Walk On Gilded Splinters », extrait de l’album « Stanley Road » (1995)
Titres du CD 2:
- « In the Crowd », extrait de l’album « All Mod Cons » (1978) – période The Jam
- « Come on / Let’s Go », extrait de l’album « As Is Now » (2005)
- « Foot of the Mountain », extrait de l’album « Live Wood » (1994)
- « You Do Something To Me », extrait de l’album « Stanley Road » (1995)
- « Wishing on a Star », extrait de l’album « Studio 150 » (2004)
- « Wild Wood », extrait de l’album « Wild Wood » (1993)
- « The Pebble & the Boy », extrait de l’album « As Is Now » (2005)
- « That’s Entertainment », extrait de l’album « Sound Affects » (1980) – période The Jam
- « Broken Stones », extrait de l’album « Stanley Road » (1995)
- « Long Hot Summer », extrait de l’album « Introducing The Style Council » (1983) – période The Style Council
- « Shout To The Top », extrait de l’album « Our Favorite Shop » (1985) – période The Style Council
- « A Town Called Malice », extrait de l’album « The Gift » (1982) – période The Jam
Pays: GB
V2 VVR1039398
Sortie: 2006/06/12