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ALMACH – Dream elegy

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S’il y a bien en pays au monde où on n’imaginait absolument pas qu’il pouvait y avoir une quelconque trace de musique rock, c’est bien l’Afghanistan. Et quand le rock en question n’est pas du rock passe-partout mais s’avère être du black metal, alors là, on ne peut que tomber de sa chaise, frappé par la surprise. Oui, il y a du métal en Afghanistan, le pays où on coupe les mains des voleurs, où on lapide les femmes qui ne sont pas camouflées sous une burqa grillagée et où le moindre soupçon de pratiquer de la musique occidentale vous envoie directement dans une geôle moisie pour le restant de vos jours. Et dans cet univers joyeux et bon enfant, des types jouent du black metal atmosphérique sous le nom d’Almach, il faut quand même le faire.

Sans doute pour des raisons de survie en milieu hostile, les musiciens d’Almach n’ont communiqué aucun de leurs noms sur Internet pour faire la pub de leurs deux albums, ʺThe battle of Toursʺ (2020) et ʺDream elegyʺ (2021). On peut les comprendre, bien qu’on puisse trouver amusant le fait que leur premier album s’appelle ʺThe battle of Toursʺ. Ce nom est la traduction anglaise de la fameuse bataille de Poitiers où, en 732, Charles Martel battit les armées omeyyades du général Abd al-Rahman et chassa les forces arabes hors du royaume de France. Donc, si nos petits amis d’Almach ont suffisamment de sympathies à l’égard des Occidentaux en pratiquant un black metal qui risque de leur coûter la vie s’ils sont découverts, ils gardent quand même rancune envers ces mêmes Occidentaux pour évoquer dans leur premier album une bataille où les musulmans n’ont pas eu le beau rôle.

Mais on ne va pas se formaliser pour ces petites bisbilles mémorielles et on restera quand même admiratif à l’égard d’Almach, qui propose ici un black metal atmosphérique et symphonique tout à fait original car le black metal dans l’affaire, finalement, est assez lointain et diaphane et ce sont surtout des mélodies aériennes et oniriques qui hantent les six morceaux de ce deuxième opus. On attend un peu avant d’entendre les premières voix sur le deuxième morceau ʺDream elegyʺ, précédé d’une petite introduction appelée ʺAdraskanʺ. C’est d’ailleurs une voix féminine qui s’élève sur des structures au black metal plutôt posé en filigrane, les claviers restant sur le devant du mix alors qu’un chant black metal résonne très loin dans le fond. Les rythmes sont alanguis et posés, l’agencement sonore évoque les déserts et les plateaux d’Afghanistan, où le soleil tape dure sur les caravanes qui traversent ces contrées. ʺKandaharʺ se pare de sonorités plus progressives, où les claviers prennent encore une place prépondérante, tandis que ʺDeath is an illusionʺ est davantage symphonique, le black metal étant toujours placé en retrait. Cet effet retiré est intéressant. Il peut être dû soit à une erreur de mixage, soit à une volonté délibérée d’inverser un peu la hiérarchie des sons. Mais dans les deux cas, le résultat est des plus originaux, les rythmiques en tempo moyen terminant de donner un aspect rassurant et calme aux compositions de cet album (ʺDragonheartʺ, ʺWind of Registan desertʺ).

Je ne sais pas comment les gens d’Almach ont accédé au black metal. Peut-être ont-ils fréquenté des militaires américains qui patrouillaient dans le coin. Peut-être sont-ce même des déserteurs de l’armée américaine qui se sont planqués dans un grotte avec un groupe électrogène et quelques instruments pour faire du black metal. En tout cas, la découverte est fascinante et donne de l’espoir. La musique est partout chez elle et le métal, extrême ou pas, gagne chaque jour un peu plus de terrain dans les contrées lointaines. À quand un bon groupe de thrash metal nord-coréen ou du grindcore ghanéen ? On peut toujours espérer.

L’album :

ʺAdraskanʺ (1:38)
ʺDream Elegyʺ (9:27)
ʺKandaharʺ (9:18)
ʺDeath Is an Illusionʺ (6:40)
ʺDragonheartʺ (7:29)
ʺWind of Registan Desertʺ (7:33)

https://almach.bandcamp.com/album/dream-elegy

Pays: AF
Autoproduction
Sortie: 2021/01/08

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