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Viagra Boys, trique of the night

Tout comme pour Idles et Amyl And The Sniffers, les murs de l’AB semblaient bien trop étroits pour Viagra Boys. Les furieux Suédois, qui fêtaient la sortie de leur quatrième album, auraient en effet franchement pu remplir la grande salle du boulevard Anspach deux ou trois soirs d’affilée…

De nombreux spectateurs s’étaient déjà massés devant la scène au moment où leur compatriote Boko Yout a débuté son set. Lampe frontale sur le crâne, le gaillard à la voix proche de celle de Kele Okereke s’est instantanément mis en action en arpentant frénétiquement l’espace à sa disposition. Soutenu par un backing band déguisé en boy scouts, short et foulard compris (et même le chapeau caractéristique pour le bassiste), il passera également pas mal de temps au milieu du public. Nettement plus musclées que celles de Bloc Party, les compositions nerveuses et crasseuses renvoient plutôt vers The Cribs en mode garage si l’on veut rester dans les influences made in UK. Quoi qu’il en soit, l’inventeur de l’afro-grunge se démène tant et plus, au point de terminer torse nu luisant, dévoilant du même coup un collier d’Akéla dont même Baden Powell aurait été jaloux.

Relativement modéré au départ, le phénomène Viagra Boys s’est accentué au fur et à mesure du temps et des albums. Il a subitement pris de l’ampleur à la sortie du Covid (tout le monde a encore en tête cette mémorable prestation aux Nuits 2022 sous un chapiteau qui en tremble encore) pour devenir absolument stratosphérique en ce début d’année. Ou plutôt en fin d’année dernière lorsqu’à peine annoncé, ce concert dans la grande salle de l’AB s’est retrouvé sold out en un éclair. Inutile de préciser que l’endroit ressemblait donc à un chaudron en ébullition lorsque les lumières se sont éteintes sur le coup de 20h50.

« On a sorti un album hier et vous connaissez déjà les paroles ! », s’exclamera le leader Sebastian Murphy au terme du futur hymne « Man Made Of Meat », la sautillante plage d’intro du disque et du concert. Subtilement intitulée « Viagr Aboys », la quatrième plaque des Suédois a toutefois de quoi surprendre. Subtile par moments, retenue à d’autres, elle montre surtout un groupe en pleine confiance qui ne craint pas d’emprunter les chemins de traverse. Même si, sur scène, on parle toujours bien d’un rouleau compresseur d’une redoutable efficacité. « Slow Learner » allait en effet rapidement convaincre ceux qui hésitaient encore à se lancer dans les pogos au milieu de gobelets virevoltants et d’une pluie houblonnée.

Nullement impressionné, le groupe ne fera bien entendu rien pour calmer les ardeurs. Pour preuve, ce « Punk Rock Loser » de derrière les fagots qui en remettra une couche juste après un « Waterboy » au saxo affirmé. Torse nu et tatoué de la tête au pied, le bedonnant leader à l’attitude nonchalante ne reste jamais bien loin d’une canette ou d’un verre de bière et ne retirera ses lunettes de soleil qu’à de rares occasions. Autour de l’inscription « muerte » en lettres capitales, plusieurs dessins de bestioles plus ou moins sympathiques garnissent son torse (couleuvre, mygale…). Une passion qu’il partage avec le bassiste à sa gauche. Les autres se montrant (légèrement) plus discrets même si le batteur finira lui aussi par laisser tomber son t-shirt. En parlant de t-shirt, on n’aurait pas crié au scandale si celui du maniéré saxophoniste en short moulant avait arboré une licorne plutôt qu’un cheval.

Dans un premier temps, celui-ci se concentrera surtout sur une guitare mais également une flûte traversière (le coloré « Uno II » qui succèdera à un « Dirty Boyz » inspiré de l’univers disco spatial de Giorgio Moroder). Deux extraits pour le moins surprenants d’une plaque qui ne demande qu’à être explorée et hors de laquelle le groovy et puissant « Pyramid Of Health » se démarquera encore, boosté par l’utilisation d’un mégaphone. Juste avant, un hypnotique et plein d’urgence « Ain’t No Thief » ponctuera la première partie d’un set qui s’apprêtait à gagner en intensité via un « Troglodyte » de feu repris en chœur par des spectateurs plus chauds que jamais.

Les mouvements de foule s’étaient en effet durcis entre-temps, donnant pas mal de fil à retordre au service de sécurité de l’AB qui n’en menait pas large à la réception des vagues de crowdsurfers. « Take care of eache other », lancera à un moment le chanteur en voyant passer l’un d’entre eux le visage ensanglanté. Quoi qu’il en soit, impossible de rester de marbre à l’écoute d’« Ain’t Nice » qui verra le retour en grâce d’un saxophone finalement plus essentiel qu’on ne le pense. D’autant que son association en mode free jazz avec une basse claquante enverra le déclamé « Best In Show Pt. IV » dans une autre dimension, accentuée ensuite par un « Store Policy » plutôt malsain (la flûte traversière saccadée y étant pour beaucoup).

Petit aparté concernant le visuel exclusivement articulé autour du logo du groupe (le yin et le yang, ou plutôt le Vin et le Bang dans leur cas…) accroché à mi-hauteur de la scène. Des variations de couleurs, d’intensité, de vibrations et de délires artistiques apporteront leur petit effet. Un détail futile pendant les dingueries que sont « Down In The Basement » et « Sports », les spectateurs tentant plutôt de ne pas renverser leur bière au milieu des bousculades spontanées. On pensait d’ailleurs que ce dernier titre allait refermer le set principal mais il n’en sera rien. C’est en effet « Research Chemicals », un extrait du tout premier EP de 2016, qui recevra cet honneur, le chanteur se baladant une canette dans une main et son mégaphone dans l’autre, entre parties de sax endiablées et explosions sonores.

Après un petit break, le groupe reviendra sur scène pour un rappel de deux titres entamé par le récent single « The Bod Body », très Ramones (et EBM) au demeurant. Avant un « Worms » parfaitement construit en mode destruction flippante. Une tornade a donc soufflé sur l’AB, ne laissant que des débris de gobelets derrière elle, des t-shirts trempés de sueur et des oreilles bourdonnantes. C’est ça, l’effet Viagra Boys…

SET-LIST
MAN MADE OF MEAT
SLOW LEARNER
WATERBOY
PUNK ROCK LOSER
DIRTY BOYZ
UNO II
AIN’T NO THIEF
PYRAMID OF HEALTH
TROGLODYTE
AIN’T NICE
BEST IN SHOW PT. IV
STORE POLICY
DOWN IN THE BASEMENT
MEDICINE FOR HORSES
SPORTS
RESEARCH CHEMICALS

THE BOG BODY
WORMS

Organisation : Live Nation + AB

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