Une expérience audiovisuelle signée Moon Duo
Deux ans quasi jour pour jour après avoir ébloui l’Eden, les Californiens de Moon Duo étaient de retour à Charleroi. Cette fois, c’est au Vecteur qu’ils ont présenté « Stars Are The Light », leur très attendu nouvel album.
L’année 2019 aura été chargée pour Ripley Johnson, le leader à la longue barbe blanche et à l’inamovible casquette. En parallèle à une tournée avec Wooden Shjips passée notamment par le Botanique, il a chapeauté en compagnie de la claviériste Sanae Yamada un spectacle ambitieux. Baptisé « Stardust Highway: Experiments In Stoner Disco », il s’agit d’une immersion hallucinatoire dans un monde parallèle illustré par Emmanuel Biard, véritable sorcier visuel et collaborateur de Moon Duo depuis le diptyque « Occult Architecture » en 2017.
Lors de sa première au sein d’un hangar désaffecté de Salford, dans les environs de Manchester au printemps dernier, le futur album n’était encore qu’à un état embryonnaire mais a tout de même servi de base à la BO de la performance. Une performance désormais au point dont l’unique date belge a récemment eu lieu dans le cadre du Festival du Film de Gand. Mais surtout une performance autour de laquelle tourne les concerts en support de « Stars Are The Light », la sixième plaque de Moon Duo publiée fin septembre.
On aura d’ailleurs l’occasion de s’y immiscer d’emblée avec le planant « Flying », balancé au terme d’une intro cosmico-expérimentale auquel on reprochera peut-être sa longueur. Elle nous laissera toutefois le temps d’analyser l’infrastructure un peu particulière mise en place sur la scène du Vecteur. En effet, celle-ci est délimitée par une sorte de moustiquaire géante en forme de trapèze à l’intérieur de laquelle jouent les musiciens (le duo et leur batteur). Elle permettra non seulement de projeter les visuels sans exagérément éblouir les spectateurs mais également de jouer avec les ombres, pour un résultat époustouflant…
Si l’expérience d’un concert de Moon Duo doit beaucoup au génie d’Emmanuel Biard, n’oublions tout de même pas que sans les compositions de Ripley et Sanae, le spectacle aurait nettement moins d’intérêt. Avouons que leur association pète des flammes et tant le soutenu « Cold Fear » que le saccadé « I Been Gone » à la guitare en avant ou l’hypnotique « White Rose » n’auraient pas la même saveur sans la patte de l’architecte audiovisuel.
Outre une dynamique évidente qui transcende les titres enlevés précités auxquels on rajoutera le lancinant « Cult Of Moloch », il envoie les extraits du nouvel album, pourtant plus retenus, dans une autre dimension avec autant de facilité. Il ira même jusqu’à transformer la scène en manège virtuel pendant l’envoûtant « Eternal Shore ».
Un peu plus tôt, ce sont des effets en noir et blanc qui subjugueront « The World And The Sun » alors que le groovant « Fever Night » doit beaucoup à l’approche sixties de la claviériste. En revanche, on n’a pas trop compris leur délire incluant des chants de grillons lors des intermèdes…
Ce détail n’empêchera pas les rappels de de subjuguer une dernière fois le public via « Lost Heads » tout d’abord, petite perle hypnotique chantée à deux voix en guise d’ultime extrait de « Stars Are The Light ». Via une version méconnaissable du « Jukebox Babe » du regretté Alan Vega ensuite. Moins flippante et saccadée que l’originale, certes, mais dégageant autant de tension. Après une telle prestation, peut-on encore considérer Moon Duo comme un projet parallèle ?
Photos © 2019 Olivier Bourgi