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Neneh Cherry, smarter than ever

À 55 ans moins quelques jours, Neneh Cherry respire la toute grande forme. Bavarde et souriante, elle a emballé l’AB en un clin d’œil via un set essentiellement basé sur « Broken Politics », son excellent dernier album.

Si Greentea Peng dans un premier temps puis notre compatriote Charlotte Adigéry ont assuré les supports de la tournée jusqu’ici, Bruxelles a vu l’entrée en scène de Kelsey Lu. Seule sur scène, la New Yorkaise d’adoption coiffée d’un fichu posera sa voix assurée sur des sons pré-enregistrés (à l’exception d’un titre à la guitare). On pense par moments à Cat Power en moins chargée ou à Lana Del Rey en plus spontanée alors que ses interventions d’une timidité maladive finissent par la rendre attachante.

Pour son cinquième album, Neneh Cherry s’est de nouveau associée à Kieran Hebden, la tête pensante de Four Tet. À l’instar de « Blank Project » en 2014, « Broken Politics » apporte fraîcheur et spontanéité à des titres engagés dont elle a le secret (ce disque s’inspire notamment d’un séjour dans la jungle de Calais qui l’a particulièrement touchée) sans pour autant rentrer dans la polémique ou la provocation.

Ceci dit, le producteur électro avant-gardiste n’éclipse pas pour autant un travail d’équipe digne de ce nom. Ainsi, outre son compagnon et collaborateur de longue date (Cameron McVey était déjà là pour « Raw Like Sushi » voici trente ans), 3D de Massive Attack a coécrit « Kong », un des sommets de la plaque alors que Paul Simm a notamment contribué à l’épanouissement du brillant « Fallen Leaves », le titre qui ouvrira le concert dans une ambiance proche de la zénitude.

Naturelle et rayonnante, la chanteuse accapare les regards sur le devant de la scène. Cheveux tirés vers l’arrière prolongés de deux longues tresses que mettent en valeur d’imposantes boucles d’oreilles, elle porte une robe noire décontractée à son image et ne s’éloigne jamais d’un pupitre qui lui sert de pense-bête. À ses côtés, c’est toute une tribu qui œuvre à son service. Outre deux DJs qui s’affairent derrière une immense console, on retrouve notamment un bassiste asiatique complètement habité, une claviériste à la coiffure afro et une harpiste. Mais ceux-ci vont brouiller les pistes en s’échangeant leurs instruments ou en en domptant d’autres, comme un xylophone, des percussions et des tam-tams.

Pas nostalgique pour un sou, elle va d’abord et avant tout se concentrer sur ses nouvelles compositions. Des compositions d’une remarquable consistance et d’une richesse orchestrale à laquelle il est compliqué de ne pas succomber. Du minimaliste « Shot Gun Shack » au franchement électro « Natural Skin Deep » en passant par le groovant « Deep Vein Thrombosis » et l’élégant « Synchronised Devotion », elle parvient à captiver un public particulièrement attentif. Sans oublier ce délicat « Black Monday » pop-dub qui la caractérise parfaitement.

« This is not nostalgia, this is history », balancera-t-elle avant de foirer « Manchild » à mi-parcours et de le reprendre à zéro. Avec l’agressif mais pertinent « Blank Project », il s’agira du seul titre antérieur à « Broken Politics » joué lors du set principal. Celui-ci se clôturera sur un envoûtant « Soldier » alors que l’excellent « Faster Than The Truth » limite trip hop virera en attaque électro lors de l’entame des rappels.

Ce n’est qu’après qu’elle alignera les hits avec une version full English de « 7 Seconds » (single enregistré à l’époque avec Youssou N’Dour) et « Buffalo Stance » au tempo anormalement ralenti. En revanche, lors du second rappel, « I’ve Got You Under My Skin », vision toute personnelle d’un titre de Cole Porter sur lequel elle rappe à propos du HIV, mettra tout le monde d’accord avec sa basse omniprésente et des musiciens en roue libre. Le genre de concert qui fait du bien par où il passe…

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