Les Nuits 2019 : Panda Bear au petit trot
La vingt-sixième édition des Nuits du Bota a pris son envol ce mardi avec le grand retour de Panda Bear. Le leader d’Animal Collective a donné vie sur scène à « Buoys », son premier album en quatre ans.
Mais dans les faits, c’est Romain Cupper qui a lancé les festivités dans une Orangerie encore assez clairsemée. Le chanteur de Leaf House sort ces jours-ci « A Good Boy », un premier EP dont il interprétera l’intégralité ce soir. Un EP assez déstabilisant qui voit le bonhomme (ab)user de l’Auto-tune, ce fameux logiciel qui tapisse de métal les cordes vocales et dont les rappeurs raffolent (mais pas que, pensez à Poliça ou The Japanese House par exemple).
Ceci dit, en le voyant monter sur scène avec sa guitare et trois musiciens (basse, batterie, claviers) puis se présenter d’une voix assurée, on était loin d’imaginer que cet artifice allait occuper une telle place centrale. Au point de gâcher la prestation du Liégeois avec des ondulations superflues et des effets sonores à la limite de taper sur le système. Même sa cover du hit de Jennifer Paige (« Crush ») en pâtira. Pourtant, « Painkiller » et « Locked In The House » sont de fichus bon morceaux qu’une lecture dépouillée devrait magnifier. Ou alors, il a des trucs à cacher…
La prestation de Marc Melià, dans la foulée, aurait presque pu recevoir l’appellation « création », en référence à la marque de fabrique des Nuits. En effet, l’éternel solitaire a choisi de s’associer à un percussionniste et un claviériste pour former un groupe, une première. Essentiellement axées sur des nappes électroniques, leurs compositions prendront de la consistance au fur et à mesure du set sans toutefois suivre une structure établie.
Au contraire, ils partent dans des délires sonores qui confèrent notamment à l’une d’entre elles une vision classique futuriste. Un peu plus tard, ils s’approprieront un tradicional de Mallorca (d’où le leader est originaire) via à une adaptation freestyle toute personnelle. Ici aussi, c’est la voix qui fera débat. Trafiquée, elle prendra tantôt l’effet d’un 45 tours passé à la mauvaise vitesse, tantôt la forme d’un zombie échappé du BIFFF, mais toujours en se fondant dans la masse de pertinente manière.
On ignore si le fait de ne pas avoir contribué à « Tangerine Reef », le dernier album en date d’Animal Collective est rentré en ligne de compte mais Noah Lennox a brusquement réactivé Panda Bear et affolé sa production discographique. En l’espace de treize mois, il a ainsi publié « A Day With The Homies », un EP uniquement disponible en vinyle et « Buoys », son sixième album (et le second pour « Domino »).
Ce sont essentiellement des extraits de ces deux disques qui formeront l’ossature de sa prestation, entamée au son de « Dolphin » et de ses bruitages ruisselants. Seul sur scène derrière un pupitre bricolé, le bonhomme porte un casque qui lui permet de se concentrer sur son chant, même si celui-ci sera par moments bidouillé et approximatif. La bonne nouvelle, c’est qu’un visuel digne de ce nom sera enfin mis en place et diffusé sur les trois écrans qui l’entourent, débutant avec un clin d’œil au visuel de ces Nuits 2019 sous la forme de bulles avant de prendre des directions aussi variées qu’artistiques et colorées.
Sur sa dernière livraison, Noah Lennox explore des contrées dub et plutôt downtempo (« I Know I Don’t Know », « Buoys ») qui vont se fondre aux parties davantage électroniques de son back catalogue et celles, plus agressives, du EP précité. Par exemple, la cacophonie maîtrisée de « Nod To The Folks » fera presque griller les haut-parleurs alors que « Sunset » se la jouera jungle hypnotique.
Le souci, c’est qu’il mettra un certain temps avant de rentrer dans son set et de communiquer son énergie à un public relativement amorphe pour une première Nuit. Heureusement, des éclairs via l’imparable « Crosswords » et le très réussi « Part Of The Math », genre de croisement entre Chemical Brothers et Prodigy avec la voix de Brett Anderson le sortiront de sa torpeur. Il est vrai qu’à part un timide « Thank you, merci » au terme de l’inédit groovant « Playing The Long Game », il restera muet. En rappel, l’entêtant « Last Night At The Jetty » au final soudain parachèvera le travail. Avec toutefois un léger goût de trop peu…