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Nuits du Bota 2018 : Cocaine Piss & Mette Rasmussen, une tempête saxuelle


Contraints d’annuler leur prestation l’an dernier, les Liégeois de Cocaine Piss entendaient bien marquer le coup lors de cette édition. Et ils l’ont fait doublement en scellant une collaboration explosive avec la saxophoniste Mette Rasmussen. Une séance de rattrapage pour ceux qui n’avaient pas eu le courage de se lever aux aurores pour les voir en ouverture du festival Roots & Roses l’avant-veille. Puisque pendant les Nuits du Bota, les concerts à la Rotonde ne débutent qu’à 20h30, on a laissé traîner une oreille du côté du chapiteau où Otzeki, le duo de cousins Londoniens, essuyait les plâtres. Encore inconnus voici six mois lorsqu’ils ouvraient pour Mortalcombat aux Beautés Soniques à Namur, ils se retrouvent à l’affiche du prochain Rock Werchter alors que leur premier album, « Binary Childhood », fait partie de la sélection des albums de ce mois de mai chez Rough Trade.

Une progression fulgurante qui doit davantage à leur sulfureuse réputation scénique qu’à leur configuration minimaliste. Un bidouilleur professionnel balance en effet sons électroniques, bruitages et beats à la Tricky qu’un chanteur guitariste typiquement british dompte habilement de sa voix de fausset. Si musicalement, on pense à du Her en moins soul et en plus freestyle, ce sont les pitreries du leader qui empêchent toute monotonie et donnent la banane aux spectateurs. Entre séances d’équilibrisme sur les barrières du front stage, jonglerie avec son instrument et danse vaudou au beau milieu du public, on ne s’ennuie effectivement jamais.

La suite s’annonçait nettement plus musclée avec Pogo Car Crash Control, genre de groupe au nom particulièrement prometteur qui n’allait pas décevoir d’un point de vue énergie. En effet, les natifs de Lésigny, bled situé à un jet de pierre de Paris où il ne se passe pas grand-chose, vont mettre la Rotonde à sac à coups de riffs meurtriers, de hurlements sauvages et de flashes stroboscopiques extrêmes.

Le leader va ainsi littéralement s’égosiller en crachant des textes inaudibles mis à part quelques mots-clés du genre déprime hostile (« Déprime Hostile »), destruction (« Hypothèse Mort ») ou ta gueule et crève (« Crève »). Le genre de B.O. idéale pour célébrer les cinquante ans de mai 68. Quant au second guitariste, il est à peine plus subtil lorsqu’il prend le micro entre deux lancers de guitare dans les airs.

Si sur disque on pourrait les comparer à du Trust sous speed, le live les envoie plutôt du côté de Mass Hysteria, le discours de propagande entre les titres en moins. En revanche, ils sont généreux dans tous les sens du terme, n’hésitant pas distribuer des canettes de bière dont le contenu finira par pleuvoir sur le sol et se mélanger à la sueur des… pogos dans le chaos le plus total.

Vu leur agenda hyper chargé, votre chemin a sans doute déjà croisé celui de Cocaine Piss, à condition de s’être pointé bien à l’heure puisque leurs sets, toujours explosifs mais de moins en moins brouillons, ne durent jamais très longtemps. À ce propos, c’est sur leurs terres, au Micro Festival l’an dernier, que l’on a (enfin) cerné le phénomène, peut-être simplement parce qu’ils prenaient le temps d’apprécier le moment.

Ceci dit, leur prestation ce soir était immanquable car unique. Ou presque. Il s’agissait en effet d’une création intégrant la saxophoniste de free jazz Danoise Mette Rasmussen au line-up, dont la seule représentation précédente avait lieu à Lessines dans le cadre du festival Roots & Roses deux jours auparavant. C’est elle qui montera sur scène la première et donnera un aperçu de son talent, en s’époumonant généreusement.

De son côté, la première chose qu’Aurélie Poppins fera en la rejoignant sera de virer le pied de micro qui lui était réservé, tout à fait superflu par rapport à son hyperactivité aiguë. Théâtrale et sapée comme pour un combat sportif, elle porte une brassière et un pantalon pourvu de genouillères qui lui seront bien utiles lors d’acrobaties et de contacts répétés avec le sol. Devant un logo bricolé, ses compagnons de virée (un furieux guitariste, un batteur cogneur chevelu et une bassiste temporaire) vont assurer une cadence infernale que ses cris maîtrisés amplifieront pendant des morceaux atteignant rarement la barre des deux minutes.

Bien entendu, elle ne passera qu’un temps limité sur scène, rejoignant rapidement le moshpit. Arpentant la salle en étranglant quasi les spectateurs avec le fil de son micro, elle leur demandera notamment d’imiter ses braillements entre deux mouvements de foule. Un show à elle toute seule qui enverra à de rares exceptions près la pauvre saxophoniste au second plan. Pas assez mise en valeur, l’urgence de son jeu aurait mérité davantage de visibilité. Quant au rappel, il sera à leur image : bordélique, bref et à moitié sans batteur. Punk ‘n’ roll, quoi…

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