Female Metal Event 2017 : le debriefing (épisode 1)
L’attente a été tellement longue. Mais ça y est enfin. Je m’apprête à assister à l’édition 2017 du Female Metal Event, à vivre quatre jours de bonheur total en totale immersion de métal au féminin, mon style de musique préféré. Il ne reste plus qu’à embarquer mon matériel photographique et me voilà parti pour un périple musical inoubliable en terre batave. Jeudi 21 septembre (salle Dynamo)
Cette édition du festival commence très mal. Retenu au bureau, je me mets en route tardivement. De plus, les conditions de circulation sont lamentables. Résultat, à mon arrivée sur place, je me rends compte que la pre-party se limite à la petite salle du sous-sol où le groupe français Beneath My Sins, emmené par la charmante et talentueuse Emma Elvaston et venu défendre son album «Valkyries Of Modern Times» a déjà terminé son set depuis belle lurette. Pire encore, en descendant vers la salle, j’ai juste le temps d’apercevoir les Belges de Circle Unbroken qui sortent de scène. J’enrage contre le mauvais sort qui a contrarié mes projets musicaux de ce début de soirée, mais en même temps je n’ai pas envie de gâcher le reste de la pre-party. Alors faisant contre mauvaise fortune bon cœur, j’enfile mon harnais, je me saisis de mes appareils, je bois une bière et me voilà prêt au combat.
Le 3e groupe de la soirée (mon premier donc) n’est autre que Shadowrise qui avait remporté le prix du jury lors des Battles 2016. Sur la petite scène de la pre-party, Laura Guldemond est entourée notamment de Dennis Winkel et d’un petit nouveau, le Britannique Jack Streat qui en a profité pour émigrer musicalement vers le pays des tulipes et du fromage d’extrême justesse avant la fermeture des frontières suite au Brexit. Sur scène, malgré quelques imprécisions dues au fait que le groupe n’a pas vraiment eu le temps de beaucoup répéter dans sa nouvelle configuration, la musique de Shadowrise est toujours aussi costaude, mais me fait l’effet d’avoir mûri. Alors que les premières compositions avaient tendance à partir un peu dans tous les sens, je trouve que, malgré quelques petits problèmes de justesse, le groupe arrive à recentrer ses idées et les deux nouveaux titres joués ce soir sont d’excellente facture. C’est de très bon augure pour l’album à suivre…
Pour un petit aperçu filmé de la prestation de Shadowrise :
Le groupe End Of The Dream ayant déclaré forfait en raison de circonstances familiales, les organisateurs ont eu la chance de pouvoir compter sur le soutien indéfectible d’une très grande dame pour assurer la tête d’affiche de ce soir. Et voilà donc Anneke Van Giersbergen, toute souriante, qui s’installe sur la petite scène pour interpréter ses chansons, en s’accompagnant à la guitare acoustique. Toujours aussi sympathique, la charismatique chanteuse s’amuse avec le public, raconte des anecdotes et invite même l’assistance à choisir certains morceaux. C’est ainsi que nous aurons droit notamment à «Valley Of The Queens», «Cis Verdonk», «Who Wants To Live Forever», «Wasted Years» et bien d’autres. Sa voix claire et versatile a vraiment le don de vous transporter. Quel talent ! Nous aurons bientôt la chance de la voir se produire en Belgique avec son nouveau projet Vuur
Pour un petit aperçu filmé de la prestation d’Anneke Van Giersbergen:
La soirée se clôture dans une ambiance conviviale autour d’un verre dans le grand hall, ce qui me donne l’occasion de retrouver et de saluer de très nombreux visages connus qui ont convergé vers Eindhoven pour honorer les déesses du métal.
Vendredi 22 septembre (salle Dynamo)
Me revoilà au Dynamo pour le premier jour du festival proprement dit. Le public est nettement plus nombreux que la veille (qui était un jeudi soir, ceci expliquant peut-être cela). Il y a toujours de l’animation dans le grand hall où sont installées les tables de merch, à proximité du bar. Pour cette première journée du FemME 2017, les organisateurs utilisent deux salles : la petite scène du sous-sol (où a eu lieu la pre-party de la veille) et la grande scène. Je vais donc me partager entre ces deux salles de configuration fort différente.
En ouverture de programme, le festival accueille sur sa petite scène le groupe allemand Conspiria, prix du public des Battles 2017. Ce groupe a déjà un imposant fanclub qui n’hésite pas à se déplacer en nombre à chaque concert de Conspiria. Musicalement, la formation teutone se situe dans le style métal symphonique à la Epica. C’est bien joué mais j’ai l’impression que le groupe se cherche encore un peu. J’ai en tout vas beaucoup de mal à essayer de me frayer un chemin dans la foule dense pour accéder à un endroit d’où je pourrai prendre quelques clichés. Pendant ce temps-là, le chant en voix claire de Nadine Mittmann et les grunts contrastés du guitariste Julian Jönck permettent au public présent de découvrir le répertoire du groupe ainsi que deux inédits, «Ophelia’s Song» en «The Faintness», extrait du EP «Signs And Origins» (les deux gagnants des Battles ont eu la chance de pouvoir enregistrer chacun un EP spécialement pour l’occasion).
Extrait filmé de la prestation de Conspiria:
Après cette mise en forme, cap sur la grande salle pour assister à la prestation de Viper Solfa, groupe norvégien composé notamment de Miriam ‘Sphinx’ Renvåg (Ram-Zet), Ronny Thorsen (ex-Trail Of Tears) en Morfeus (ex-Mayhem). Les Nordiques ne sont pas des inconnus puisque j’avais déjà eu l’occasion de les voir sur la scène du défunt Metal Female Voices Festival en Belgique. J’étais donc curieux de les revoir à l’œuvre. Pour son premier concert sur le sol néerlandais, le groupe Viper Solfa venait assurer la promotion de son album «Carving An Icon» (sorti en février 2015). Côté musical, on fleurte en permanence avec le métal extrême; le groupe envoie du lourd, du brutal même comme sur le morceau «Vulture Kingdom». Un set énergique pour le moins qu’on puisse dire. D’ailleurs une partie du public boude la prestation des nordiques, rebuté par le côté trop agressif. Je retiendrai surtout les morceaux «Black Hole Sun» et «Whispers And Storms» qui étaient selon moi les meilleurs du set. En tout cas, l’édition 2017 du FemME est définitivement lancée.
Extrait filmé de la prestation de Viper Solfa:
Retour sur le petite scène qui accueille une autre découverte, le groupe post-rock norvégien Leonov et sa musique aux rythmes hypnotisants composée pour l’essentiel d’extraits de son premier album «Leonov» sorti en 2014. Alors que la formation originaire d’Oslo est en train de préparer son deuxième album, elle fait un arrêt remarqué au festival. Ce qui frappe avant tout, c’est la manière de chanter très particulière de la vocaliste/claviériste Tåran Reindal dont la voix se perd dans le magma musical ambiant. Personnellement, je trouve cette musique trop déstructurée et peut-être trop cérébrale. Mention spéciale à «Creation» qui termine le set. Le groupe communique assez peu avec le public entre les morceaux, tout étant centré exclusivement sur la musique. Une découverte intéressante, mais à réécouter attentivement à tête reposée…
Extrait filmé de la prestation de Leonov:
Ma curiosité est piquée à vif à l’idée de découvrir le groupe suivant qui nous vient de Malte. Il s’agit d’un groupe de doom/death mélancolique appelé Weeping Silence. Dès les premières notes, je suis impressionné par la qualité et littéralement sous le charme. Composé de Diane Camenzuli et Dario Pace Taliana (voix), Manuel Spiteri et Mario Ellul (guitares), Sean Pollacco (basse), Alison Ellul (claviers) et Angelo Zammit (batterie), la formation maltaise aligne 8 véritables petits chefs-d’œuvres: «My Possession» (extrait de l’album «For the Unsung» de 2012), «Hidden From The Sun» (extrait de l’album «Opus IV Oblivion» de 2015), «Eyes Of The Monolith» (2015), «Ivy Thorns» (2015), «Gothic Epitaph» (2015), «Transcending Destiny» (2015), «Second Age of Death» et «Innocent Cries» (tous deux extraits de l’album «Theatre of Life» de 2010). Le duo de vocalistes est parfaitement rôdé et le public est conquis. Une des meilleures, sinon la meilleure prestation de la journée !
Extrait filmé de la prestation de Weeping Silence:
L’avantage des festivals, c’est qu’ils permettent de découvrir des groupes et artistes de tous horizons, y compris géographiques. C’est donc un groupe turc que l’on découvre ensuite sur la petite scène du sous-sol. Composé des guitaristes Oz Khan et Borna Matosic, du bassiste Sebastian Heuckmann et du batteur Nils Kessen, et avec à sa tête la vocaliste Başak Ylva, le groupe Dream Ocean propose pour la première fois sa musique en live sur une scène européenne. Visiblement très heureux d’être là, les Turcs ont livré une prestation plus qu’honorable avec leur métal symphonique très mélodique. Le public ne connaît peut-être pas Dream Ocean, mais il a l’air d’apprécier sa musique, comme en témoignent les réactions de plus en plus enthousiastes au cours du set. Il se chuchote que Joost van den Broek s’occupe de leur deuxième album en préparation et il y a donc fort à parier que l’on pourra prochainement revoir le groupe dans nos contrées…
Le programme avance et c’est l’heure de retrouver dans la grande salle l’étonnante Alma Alizadeh, petite jeune femme au look de secrétaire modèle qui se transforme en véritable furie quand elle monte sur scène avec son groupe For I Am King. Cette formation néerlandaise propose des compositions au confluent du death mélodique et d’élements thrash et metalcore. Autant dire que ça décoiffe. Peu convaincu la première fois que je les avais vu au Epic Metal Fest, j’étais curieux de revoir cette formation sur une plus grande scène. Le bassiste blessé est présent mais ne peut pas jouer. Le groupe assure une prestation solide, rythmée par le jeu de scène survitaminé d’Alma et ponctué de quelques jolis morceaux de bravoure à la guitare.
Aperçu de la prestation de For I Am King:
La tête d’affiche dans la petite salle me tient particulièrement à cœur car il s’agit ni plus ni moins du groupe de post-métal mélancolique Vetrar Draugurinn fondé par Eric Hazebroek à la suite de l’arrêt du groupe Stream Of Passion. Autour de lui sur scène, le guitariste Thomas Cochrane, le bassiste Arjan Heijden et le batteur Jim van de Kerkhof. Quant à la partie chant, elle est assurée par l’excellente Marjan Welman (Autumn). Le climat sombre et la fumée qui enveloppe la scène telle une nappe de brouillard forment un décor parfait pour les compositions nostalgiques, voire sombres, de cet excellent groupe.
Au menu de la setlist, 7 titres tous plus jouissifs les uns que les autres. Il y a des compos du groupe («Mother of Northern Skies», «I Am», «Black Earth», «13th Night» et le déjà cultissime «Vigil (for the Lost Children of Our Generation) »), mais aussi des reprises très réussies comme «The Noose» (A Perfect Circle) et «Into The Black Light» (Ghost). A noter aussi le magnifique duo avec la chanteuse Lisette van den Berg (Scarlet Stories) dont on avait déjà pu apprécier toute l’étendue du talent lors du concert
The Ayreon Universe. Pour moi, le concert le plus époustouflant de la soirée, qui aurait franchement mérité les honneurs de la grande scène !
Aperçu de la prestation de Vetrar Draugurinn:
Retour à la grande scène pour accueillir la tête d’affiche de la soirée, qui n’est autre que le groupe Mayan. Mark Jansen, Henning Basse, Merel Bechtold et Ariën van Weesenbeek étant retenus par d’autres obligations (notamment la tournée d’Epica), la formation batave a fait appel à des remplaçants de renom: le batteur Michiel van der Plicht (Apophys, God Dethroned), le guitariste Jord Otto (Vuur, My Propane, ReVamp) et le chanteur Adam Denlinger (Colossal Microcosm). Ces invités de marque rejoignent sur scène Marcela Bovio (avec la chanteuse Lisette van den Berg, les deux seules artistes à s’être produites lors des 4 éditions du Female Metal Event !) et Laura Macri au chant féminin, ainsi que George Oosthoek au chant extrême masculin, sans oublier les autres musiciens: Jack Driessen (claviers), Frank Schiphorst (guitare) et Roel Käller (basse).
Malgré le lineup inédit, le groupe fournit une prestation hypervitaminée de son death métal symphonique, même si j’ai par moment l’impression que ça part un peu dans tous les sens… Vocalement, ce sont surtout les filles (Marcela et Laura) qui impressionnent le plus, comme dans «Bloodline Forfeit» et «Hate Me As I Am». Le public a aussi droit à un moment de pureté absolue quand Laura entonne le «Stabat Mater» et le magnifique «Essenza Di Te». Malgré le côté musclé de la prestation du groupe, le public adhère et participe à grands coups de headbanging. Parmi les temps fort de la setlist de 13 titres, je citerais «At The Mountains Of Madness» (la reprise du groupe Orphanage), «Human Sacrifice» et «Faceless Spies – National Security Extremism Part 2». L’énergie déployée sur scène est énorme et George ne ménage pas ses effets théâtraux. Le spectacle est à la fois musical et scénique. Mayan aura prouvé ici qu’il a entièrement sa place en tête d’affiche et qu’il sait captiver son public pendant un set complet.
Aperçu de la prestation de Mayan
Photos © 2017 Hugues Timmermans