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Opération séduction pour St. Vincent à l’AB

Trois ans après l’acclamé « St. Vincent » (élu notamment album de l’année par le NME), Annie Clark alias St. Vincent a poursuivi son singulier bonhomme de chemin en publiant récemment « Masseduction », une surprenante cinquième plaque qu’elle est venue présenter à l’Ancienne Belgique ce lundi 23 octobre.

Artiste complète, elle a programmé, en lieu et place d’une première partie, la diffusion de « The Birthday Party », son premier court-métrage en tant que réalisatrice. Contrairement aux apparences, il ne s’agit pas d’une ode à un jeune Nick Cave mais de l’histoire d’une femme qui trouve le corps de son mari sans vie dans son bureau et dont le but est de faire en sorte que cette découverte macabre ne gâche pas la fête d’anniversaire de sa fille de 7 ans. Le tout avec un humour délicieusement sarcastique…

Mais ce n’était que le début d’une soirée pas comme les autres. Une soirée pendant laquelle Annie Clark sera la seule et unique star. En effet, mis à part deux roadies déguisés en membres du GIGN qui vont essentiellement passer leur temps à tirer un énorme rideau en fonction de sa position, la scène est vide. Pas de musiciens, pas de matériel, pas de retours, juste des pieds de micro disséminés çà et là.

Ceci dit, la tenue de la chanteuse, en rose flashy lors de la première moitié du show (interminables bottes en latex, body, anneaux en frou-frou à hauteur des bras,…) va immanquablement attirer les regards. Un accoutrement que l’on aurait plutôt imaginé exhibé par Peaches (en plus classe, toutefois…) même si la pochette du nouvel album, où son postérieur est roi, nous y avait préparés.

Pourtant, c’est avec une sorte de mini best of chronologique qu’elle va entamer les festivités. À l’exception de celui enregistré en duo avec David Byrne, chacun de ses albums sera représenté. On aura ainsi tout le loisir d’apprécier l’évolution de son travail au fil des ans. Du pseudo cabaret « Marry Me » à l’électro-pop « Rattlesnake » en passant par un soft « Strange Mercy » entamé à même le sol et un convaincant « Actor Out Of Work ». Le hic, c’est que le son est beaucoup trop agressif et les basses, démentielles, vont se répercuter jusque dans le Foyer où les verres tremblaient littéralement.

Visuellement, outre sa collection de guitares correspondant grosso modo à chaque couleur de l’arc-en-ciel, un deuxième rideau apparaîtra, représentant une tête de félin à deux doigts de croquer la belle qui avait l’air de s’en rapprocher. Mais elle finira par se retrouver en bord de scène pour un hyper efficace « Birth In Reverse ».

À peine le temps d’échanger quelques impressions avec les premiers rangs que l’artiste débarquait déjà pour la seconde moitié du spectacle, consacrée à la présentation intégrale de « Masseduction », screené de la première à la dernière plage. Elle a profité du break pour enfiler un autre costume, plus sobre mais tout aussi court, dans les tons métalliques et échancré à hauteur de la poitrine. Sans oublier le souci du détail puisque même ses bottillons reflétaient le light show.

Les deux malabars encagoulés avaient entre-temps installé un podium au centre de la scène ainsi que des pédales à effets que l’on ne se souvient pas avoir été ne fut-ce qu’effleurées, rajoutant un doute supplémentaire quant à l’orchestration de la soirée. Si sa guitare était bien branchée, on a tout de même l’impression que certains riffs faisaient partie des bandes préenregistrées, conférant un caractère karaoké géant (quoique professionnel) au concert. Parallèlement, le rideau félin a été remplacé par un écran géant sur lequel étaient diffusées des séquences mettant en scène la chanteuse dans des décors décalés à rendre jaloux les Pet Shop Boys et Barbie.

On l’a dit, cet album pousse encore un peu plus loin la métamorphose de la chanteuse, certains titres étant à deux doigts de déstabiliser les fans de la première heure (« Pills » et « Los Ageless » font franchement pop, « Savior » et « Young Lover » très r’n’b). Quant à la plage titulaire, elle renvoie au « Vogue » de Madonna, à l’époque où cette dernière était obnubilée par la mode. Coïncidence ?

En revanche, les titres plus posés, à l’instar de « Hang On Me » et du délicat « Happy Birthday, Johnny » s’apparenteront à des moments privilégiés. Mais que dire de ce magnifique « Smoking Section » en guise de final, interprété avec tellement d’émotion qu’il nous nouera la gorge. Au point que l’inscription « The End » qui le ponctuera sur l’écran géant sera à deux doigts de nous arracher des larmes.

On pourra bien entendu débattre sur le concept en le cataloguant de suicidaire, d’osé ou de narcissique. Toujours est-il qu’Annie Clark a eu le mérite de l’embrasser à pleine mains. Maintenant, rien n’égale de vrais musiciens, des chœurs humains et une présence chaleureuse. Ce sera peut-être pour les festivals l’an prochain.

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