ArticlesConcerts

Durbuy Rock 2017: un millésime mémorable!


Vendredi 7 avril 2017. Le printemps commence à se manifester en ce début de week-end, comme si la météo elle-même se réjouissait de participer aujourd’hui au premier gros festival belge de l’année. Cependant, les dieux du trafic sont moins cléments que ceux de la météo car sur le trajet de Bruxelles à Durbuy, je me trouve pris dans un piège infernal: des files interminables sur le ring de Bruxelles. De là à y percevoir une hostilité divine envers la scène métal, il n’y a qu’un pas que je me garderai de franchir. C’est donc avec un certain retard que j’arrive sur place, agacé d’avoir loupé quelques petits groupes du début de cette première journée à cause de ces aléas, mais heureux à l’idée de l’affiche diaboliquement bonne qui m’attend sur la double scène de Bomal-sur-Ourthe.

Après m’être procuré mon précieux sésame donnant accès au photo pit, je rentre dans la salle déjà bien remplie. Sur la grande scène intérieure, le groupe suédois The Haunted entre en scène, accueilli bruyamment par des festivaliers enthousiastes. Pendant une quarantaine de minutes, le combo de Göteborg s’applique à nous convaincre que la musique suédoise ne se limite pas à la pop du groupe Abba. Le groupe actuellement en tournée avec Arch Enemy et Lacuna Coil s’apprête à entrer en studio pour l’enregistrement de son prochain album. Après avoir connu pas mal de remous dans son effectif, le groupe se compose aujourd’hui de Jensen, guitariste fondateur du groupe, accompagné d’Ola Englund à la guitare rythmique. Surprise au chant puisque c’est l’ancien chanteur Marco Aro (ex Face Down, The Resistance) qui avait déjà officié au sein du groupe de 1999 à 2003 qui revient aux affaires. La basse est confiée aux mains expertes de Jonas Björler tandis que c’est Adrian Erlandsson qui est assis à la batterie. Gageons que cette mini-tournée à laquelle participe le groupe sert essentiellement à huiler les rouages avant l’enregistrement du nouvel opus.

Musicalement parlant, les Scandinaves nous servent des compositions thrash métal en mode rétro. C’est énergique et le public se sent stimulé, avec à la clé quelques pogos et les premiers crowdsurfers de la journée. Même si le set des Suédois est assez énergique, j’ai du mal à entrer dans leur musique sans doute un peu trop consistante pour un démarrage à froid. En tout cas, la salle, elle est chaude et le public est à la fête. La première journée de festival me semble donc s’ouvrir sous d’excellents auspices.


Mon premier groupe de la journée sur la scène extérieure n’est autre que la formation flamande de thrash/speed métal Evil Invaders. Dès l’arrivée sur scène de Joe (voix, guitare), Max (guitare principale), Senne (batterie) et Joeri (basse), c’est un véritable torrent musical qui emporte le public sidéré. Le combo de Leopoldsburg ne cesse de monter en puissance à chaque apparition sur scène. Les Limbourgeois livrent une prestation de très haut niveau à laquelle personne ne reste insensible. Les riffs de guitare se succèdent à une cadence infernale et Joe met toute son énergie au service des compositions ultra-efficaces du groupe. Avec des hymnes comme «As Life Slowly Fades», «Pulses of Pleasure», «Shot to Paradise», «Raising HellStairway to Insanity» ou encore «Fast, Loud ‘n’ Rude» (pour n’en citer que quelques-uns), la bande à Joe fait monter la température à un tel point que je me sens rassuré de savoir la rivière toute proche pour éteindre un éventuel incendie.

Le public adhère pleinement au menu qui lui est proposé et réagit au quart de tour aux harangues métalliques venant de la scène. Ajoutons à cela un joli jeu de lumières et de fumée et le plaisir était total! Pour moi, ce fut là sans hésiter un des trois meilleurs concerts de la journée! Je le classerais en numéro 3.


Après avoir pris une boisson houblonnée locale pour étancher ma soif homérique, je prends possession du pit pour un des grands groupes de la soirée. Si je vous dis Merel Bechtold et le génial Timo Somers aux guitares, Ruben Israel aux fûts, Otto Schimmelpenninck à la basse et Martijn Westerholt aux claviers, vous avez déjà une petite idée du groupe qui monte ensuite sur scène. Si je vous dis que ce groupe batave est emmené par la talentueuse Charlotte Wessels au chant, le doute n’est plus permis. C’est bien Delain qui prend le relai sur la grande scène.

Après un premier album («Lucidity») sorti en 2006, Delain aurait pu n’être qu’une aventure sans lendemain. Mais comme la jeune chanteuse Charlotte Wessels avait plutôt bien assumé aux côtés de Sharon den Adel (Within Temptation), Marco Hietala (Nightwish et Tarot), Liv Kristine (ex-Leaves’ Eyes) et George Oosterhoek (Orphanage), Martijn a voulu poursuivre l’aventure avec un second album, puis un troisième… La grande aventure de Delain avait commencé !


Nos voisins du Nord en connaissent en tout cas un rayon sur le métal symphonique décliné au féminin. Ceux qui en auraient douté, auront eu tôt fait d’être convaincus par un set énergique de treize morceaux, qui revisite joyeusement les grands standards du groupe, tout en faisant également découvrir un bel échantillon de titres du nouvel album. Après l’intro instrumentale «The Monarch» (extrait de l’album «Moonbathers» de 2016), le public du Durbuy Rock a eu droit aux 13 titres suivants: «Hands of Gold» (2016), «Suckerpunch» (2016), «The Glory and the Scum» (2016), «Get the Devil Out of Me» (extrait de l’album «We Are The Others» de 2012), «Army of Dolls» (extrait de l’album «The Human Contradiction» de 2014), «Vultures» (2014), «Fire with Fire» (2016), «Danse Macabre» (2016), «The Gathering» (extrait de l’album («Lucidity» de 2006), «Pristine» (2006), «Mother Machine» (2012), «Don’t Let Go» (2014) et «We Are the Others» (2012).

Pour les membres du groupe, chaque concert est une fête. Otto arbore fièrement sa nouvelle basse Dingwall (une ‘Lamborghini Orange’), tandis que Merel s’éclate sur ses parties de guitare rythmique. Timo est un surdoué du manche et chacune de ses apparitions scéniques est un régal pour les amateurs de guitare. Ruben est un peu plus en retrait derrière ses fûts, mais toujours aussi efficace. Quant à Martijn, il distille avec ses claviers des plages synthétiques qui font l’ADN du groupe. Bref, on voit clairement qu’il s’agit d’une bande de copains qui se donnent à fond et s’amusent sur scène. Ce plaisir est très communicatif et la foule apprécie (j’ai d’ailleurs repéré dans le public plusieurs T-shirts à l’effigie du groupe). Assistée par les growls de Otto et les backing vocals de Timo, Charlotte effectue un sans faute parfait, tant vocalement que par l’occupation de l’espace et la communication avec le public. Seule ombre au tableau, la gestion du son à la table de mixage a connu quelques bugs pendant le premier tiers de ce concert qui reste, malgré tout, mon deuxième préféré de la soirée!


Après la prestation tonique et rafraichissante de Delain, c’est au tour du cultissime groupe teuton de thrash métal d’envahir la scène extérieure. Attention à vos tympans car c’est la musique puissante de Sodom qui vient électriser l’atmosphère du festival. Fondé en 1981, le trio se compose aujourd’hui d’un de ses membres fondateurs, le bassiste-chanteur Tom Angelripper, fidèle d’entre les fidèles puisqu’il n’a jamais cessé de faire partie du groupe. À ses côtés, Bernd «Bernemann» Kost à la batterie et Markus «Makka» Freiwald. Avec 15 albums studio en 30 années de carrière, on peut dire que le trio a été plutôt prolofique. Il faut reconnaître qu’en ayant Sodom à l’affiche, les organisateurs du Durbuy Rock ont fait fort puisqu’il s’agit ni plus ni moins d’un des big four du thrash metal allemand (les autres étant Kreator, Destruction et Tankard).


Le public belge a droit à un joli set composé des titres suivants : «In Retribution» (extrait de l’album «Decision Day» de 2016), «In War and Pieces» (extrait de l’album éponyme de 2010), «Sodomy and Lust» (extrait de l’album «Persecution Mania» de 1987), «Surfin’ Bird/The Saw is the Law» (cover du groupe The Thrashmen et extrait du EP éponyme de 1991), «Outbreak of Evil» (1987), «Sacred Warpath» (extrait du EP éponyme de 2014), «Agent Orange» (extrait de l’album éponyme de 1989), «City of God» (extrait de l’album «Sodom» de 2006, «Caligula» (2016),
«Remember the Fallen»
(1989), «Bombenhagel» (1987). Un set somme toute classique pour ce groupe cultissime qui assure toujours autant sur scène même s’ils ne sont plus des perdreaux de l’année. Les festivaliers ont apparemment beaucoup apprécié la prestation de ces maîtres du genre.


Retour sur la scène indoor pour découvrir la première tête d’affiche de la soirée qui n’est autre que le groupe de death metal mélodique suédois Arch Enemy. Fondé il y a une bonne vingtaine d’années par Michael Amott (ex-Carcass), le groupe suédois va acquérir ses lettres de noblesses après le licenciement de son frontman original, Johan Liiva, et son remplacement par Angela Gossow, une journaliste amateur allemande et, à ses heures, chanteuse de death metal, qui avait donné une cassette démo à Christopher Amott un peu plus tôt au cours d’une interview avec celui-ci. Après avoir écumé les scènes du monde entier aux côtés des groupes les plus prestigieux (Slayer, Motörhead, Opeth, Megadeth, Judas Priest, Anthrax, Rob Zombie, Children of Bodom), le groupe décide en 2012 de marquer une courte pause pour préparer son album suivant. En 2014, le groupe annonce la sortie d’un nouvel album ainsi que le départ d’Angela Gossow (qui continuera à assurer le management du groupe) et son remplacement par Alissa White-Gluz (Agonist).


Sur la grande scène, Alissa et Michael sont accompagnés de Jeff Loomis (guitare), Sharlee D’Angelo (basse) et Daniel Erlandsson (batterie). Des musiciens du haut du panier pour une prestation fort attendue par les festivaliers présents qui auront d’ailleurs droit à un programme très consistant: «Tempore Nihil Sanat (intro)», «Enemy Within», «Revolution Begins», «War Eternal», «Ravenous», «Stolen Life», «Heart of Darkness», «You Will Know My Name», «Taking Back My Soul», «Under Black Flags We March», «As the Pages Burn», «Dead Eyes See No Future», «Avalanche», «No Gods No Masters», «Dead Bury Their Dead», «We Will Rise», «Blood on Your Hands», «Snow Bound» et «Nemesis».

La prestation scénique d’Alissa impressionne. Par sa voix d’abord, ses growls et grunts saisissants, parfois relayés par une magnifique voix claire. Par sa manière de bouger sur scène ensuite: Alissa est tout l’opposé d’un artiste statique. Elle bouge, danse, saute sans arrêt. Une véritable pile électrique. Servie par des musiciens haut de gamme, elle offre au public belge une véritable démonstration de concert métal. Ici encore, le public affichera bruyamment son enthousiasme déjà plus alcoolisé vu l’heure et nous assistons à d’importants mouvements de foule avec des pogos en tous genre et des crowdsurfers de plus en plus nombreux.


C’est sur la scène extérieure que les Italiens de Lacuna Coil vont faire vivre aux festivaliers le summum de la soirée. Deuxième tête d’affiche du vendredi, le combo milanais est le dernier groupe de la soirée à se produire sur la scène extérieure, choix qui n’a pas manqué d’étonner certains dont votre serviteur. La météo du jour a été clémente et même ensoleillée, mais les nuits printanières sont encore glaciales en Ardenne. C’est donc par une température de 1°C que Ryan Folden (batterie), Marco Coti Zelati (basse), Andrea Ferro et Cristina Scabbia (chant) font leur entrée sur scène. Marco «Maus» Biazzi ayant décidé de quitter le groupe, l’intérim à la guitare a été confié à Diego Cavallotti.


Absolument pas gênés par le froid, les Milanais se lancent dans un show épique qui va captiver le public pendant environ une heure et demie, centré sur leur dernier opus en date «Delirium», sorti en 2016. Au programme: «Ultima Ratio» (2016), «Spellbound» (extrait de l’album «Shallow Life» de 2006), «Die & Rise» (extrait de l’album «Broken Crown Halo» de 2014), «Heaven’s a Lie» (extrait de l’album «Comalies» de 2002), «Blood, Tears, Dust» (2016), «Ghost in the Mist» (2016), «Enjoy the Silence» (cover de Depeche Mode, extrait de l’album «Karmacode» de 2006), «Our Truth» (2006), «Trip the Darkness» (extrait de l’album «Dark Adrenaline» de 2012), «My Demons» (2016), «Downfall» (2016), «Nothing Stands in Our Way» (2014), «Delirium» (2016), «Zombies» (2014), «The House of Shame» (2016).

L’alchimie entre les deux vocalistes est parfaite, tandis que les musiciens, Marco en tête, se donnent à fond pour assurer le spectacle. Le résultat est encore amplifié par les maquillages de scène inquiétants. Une prestation qui fait reculer le froid et met la foule incandescente en transe. La communion avec le public est parfaite. Un très grand moment du Durbuy rock et indiscutablement mon préféré de la journée!

Alors que vers 1h du matin, je me dirige lentement vers la sortie, je ne peux m’empêcher de jeter un coup d’œil vers la grande scène où l’after-party a été confiée au coverband Eagles Road, mélange de glam, de fun et de rock version ’80 (perruques style Kajagoogoo et tout le toutim !), qui distille quelques excellente reprises pour celles et ceux que la fatigue et l’alcool n’ont pas encore anéanti. Pour ma part, après avoir mitraillé comme un serial shooter pour immortaliser tous ces excellents moments, le chasseur d’images que je suis commence à ployer sous le poids de son matériel. Il est temps de rentrer avant que l’épuisement me gagne. Après avoir souhaité bon amusement aux courageux qui vont encore poursuivre cette belle fête le lendemain, je reprends la route vers la capitale avec dans la tête plein de souvenirs de cette deuxième plus grosse édition de l’histoire du Durbuy Rock. En tout cas, une chose est sûre: je serai à nouveau de la partie pour l’édition 2018!

Les autres photos de

Lacuna Coil

Photos © 2017 Hugues Timmermans

Laisser un commentaire

Music In Belgium