Nuits du Bota 2016 : Julia Holter, la cerise sur le gâteau
Les Nuits du Bota 2016 ont vécu leur dernière étape ce mardi 7 juin avec la venue très attendue de Julia Holter dont le dernier album, « Have You In My Wilderness », l’a propulsée dans la cour des grandes. L’Orangerie a, sans surprise, succombé au charme de la Californienne. Les conditions climatiques dantesques et leurs résidus nous ont fait louper une bonne moitié de la première partie assurée par Julianna Barwick. Celle-ci allait pourtant d’emblée nous accueillir dans son univers mélancolyrique parfaitement adapté à la météo. Accompagnée sur scène d’un violoncelliste, la New Yorkaise d’adoption (sapée d’une longue robe noire loin de l’avantager) était en train de tapoter sur son clavier tout en se fendant de délicates onomatopées à la Enya qu’elle prenait un malin plaisir à traiter en boucles. Plus cérébral qu’expérimental, son set allait toutefois devenir répétitif et quelque peu tirer en longueur. Et si de vrais textes changeaient la perception ?
Au fil des albums, la plume de Julia Holter a suivi une courbe ascendante qui a permis à son style de s’affiner et de passer d’un travail introspectif à des compositions presque pop sans avoir drastiquement modifié son approche. Sa quatrième plaque, « Have You In My Wilderness », en plus d’être la plus cohérente de sa carrière, a conquis la critique, les magazines Mojo et Uncut en tête, qui l’ont placée en tête de leur referendum 2015.
L’attente était donc grande, surtout après son passage en novembre dernier dans un AB Club plein à craquer. Et elle n’allait pas décevoir, même si elle aura bien besoin du titre d’intro, « City Appearing », pour se mettre en place dans un environnement feutré un brin jazzy. Sa voix, proche par moments d’une An Pierlé enfantine (à moins que ce ne soit l’accompagnement au piano), sera en effet avantageusement mise en avant sur des titres plus colorés, à l’instar du guilleret « Silhouette » et de « Lucette Stranded On The Island » au final poppy, deux nouvelles compositions. Il ne s’agit évidemment pas d’un hasard.
D’autant qu’elle peut compter sur des musiciens impliqués, à commencer par une violoniste dont l’instrument entêtant va majestueusement communiquer avec celui d’un contrebassiste particulièrement habité. Un batteur à la frappe délicate et aux ustensiles aussi divers qu’étranges complète le line-up. Pas de guitare, donc, mais la richesse orchestrale intense qui se dégage du quatuor la rend superflue. Et chacun y va de ses parties vocales en accompagnement de la belle à la longue coiffure soyeuse.
Réservée, elle ne communiquera que très peu avec un public pourtant bien en verve qui l’acclamera à de nombreuses reprises. Il faut dire que des titres comme « Feel You » et « Everytime Boots » ne sont pas loin d’atteindre la perfection. Par ailleurs, certaines atmosphères tellement visuelles pourraient aisément accompagner les scènes d’un film (« Horns Surrounding Me ») ou d’un dessin animé (l’excellent « Sea Calls Me Home »).
Une large place est en tout cas laissée à la recherche de l’orchestration parfaite (« How Long? ») sans pour autant laisser de côté son penchant expérimental, à l’instar de « So Lillies », le titre le plus ancien joué ce soir (extrait de son premier album, « Tragedy ») et de « Vasquez », celui avec lequel elle mettra un terme au set principal de façon abrupte.
Les rappels seront le théâtre de deux joyaux que sa voix polira. « Betsy On The Roof » sera d’abord magnifiquement accompagné de son clavier d’une voix parfaite et claire avant qu’une somptueuse version enlevée de « Don’t Make Me Over », un titre composé par les magiciens Hal David et Burt Bacharach pour Dionne Warwick au début des années 60, ne nous laisse sans voix. Ou comment clôturer les Nuits du Bota de délicate manière…