L’indie rock US de Speedy Ortiz
On ne peut pas dire que les Américains de Speedy Ortiz s’aventurent très souvent en Europe où leurs albums récoltent pourtant d’excellentes critiques. Il était donc conseillé de ne pas louper leur passage à la Rotonde du Botanique ce lundi 26 octobre où ils venaient présenter « Foil Deer », leur petit dernier. Le support aurait dû être assuré par Trust Fund mais l’annulation récente des natifs de Bristol a permis à Baby Fire de se produire dans de bonnes conditions sur une scène de leur ville d’origine. Emmené par l’expérimentée Dominique Van Cappellen-Waldock, le trio de nanas ne va pas se poser de questions et entamer un set rock ‘n’ roll devant un parterre de spectateurs incluant la chanteuse du groupe principal qui appréciera manifestement le moment.
Balisées par une voix rauque rappelant autant Patti Smith que PJ Harvey et par une guitare délicieusement crasseuse (on pense au « Uh Huh Her » de la seconde nommée), les compositions finalement pas si féminines que cela vont faire l’unanimité, malgré une batteuse et une bassiste peut-être un rien trop coquettes par rapport au style musical proposé. Ceci dit, les influences garage voire grungy à la Sonic Youth du dernier titre feront clairement fi de ces constatations.
Deux ans après « Major Arcana » (qui avait terminé dans le top 50 des meilleurs albums de l’année selon le NME), Sadie Dupuis et Speedy Ortiz ont sorti « Foil Deer », un troisième album qui ne fait que confirmer tout le bien que l’on pense d’eux. Malheureusement, les radios ne les diffusent quasiment pas et leurs disques sont extrêmement difficiles à trouver (en plus d’être onéreux). Ceci explique sans doute l’assistance relativement faible (une moitié de Rotonde) de ce lundi soir.
Entamé pied au plancher avec « Taylor Swift » (!) et une puissance rare, leur prestation ne vas laisser place à aucun temps mort. Bien entendu, on ne voit que la chanteuse aux yeux expressifs et à l’accoutrement particulier. Il est vrai qu’elle ne passe pas inaperçu avec son short de plage, ses chaussettes juste en dessous des genoux et ses espadrilles. Mais si l’on se concentre sur sa voix douce et rugueuse à la fois (les excellents « The Graduates » et « Swell Content »), le look passe clairement au second plan.
Et si l’on fait de même avec sa guitare qu’elle dompte à la perfection, on la considère réellement comme la tête pensante de la formation, même si les musiciens qui l’entourent (dont le nouveau guitariste à la coiffure afro Devin McKnight qui a remplacé Matt Robidoux dans des circonstances obscures) ont clairement leur patte dans le son très ricain du groupe. Ainsi, le batteur Mike Falcone se démène comme un beau diable avec Dave Grohl en point de mire alors que la basse de Darl Ferm se montre par moments prédominante.
Musicalement, on pense à Weezer en moins lisse (« Raising The Skate »), aux débuts de Nada Surf (« Casper ») mais surtout à Pavement (« Ginger », « Tiger Tank », « Plough »). Certains titres empruntent toutefois une personnalité propre qui ouvre la voie à un avenir intéressant (« Puffer » aux subtiles touches de synthé, « American Horror » poppy à leur manière). Ceci dit, cela manque peut-être un peu de diversité et au bout du compte, une impression linéaire finit par se dégager. La digestion de seize uppercuts en l’espace d’une heure impose il est vrai une certaine endurance…