Une volée de jeunes pousses indie à la [PIAS] Nite du Beursschouwburg
Outre leur grande messe annuelle, les dynamiques gérants de [PIAS] organisent également des événements plus confidentiels mais non moins intéressants. Et le Beursschouwburg semble devenir leur endroit de prédilection. Après la présentation de l’album d’Other Lives en avril dernier, trois groupes prometteurs se partageaient l’affiche ce vendredi 11 septembre : Hooton Tennis Club, Happyness et Torres. Cinq étages d’escaliers nous mènent sur la terrasse en plein air que prolonge la Zilverenzaal et qui offre en guise de récompense une splendide vue sur la ville petit à petit gagnée par l’obscurité. Une Zilverenzaal au son impeccable et à l’accueillant espace confiné. Bref, des conditions idéales pour entamer la soirée au son des gaillards de Hooton Tennis Club qui étaient jusque-là en train de boire des bières juste à côté de nous.
Originaires de Liverpool, ces quatre amis d’enfance viennent de sortir leur premier album (« Highest Point In Cliff Town ») produit par Bill Ryder-Jones, l’ex-guitariste de The Coral. Mais ceux qui s’attendaient à une pop psyché inspirée des sixties en ont été pour leurs frais. Car Hooton Tennis Club (leur nom fait référence à un court de tennis local), s’inspirent d’un son indie américain tout en parvenant à conserver leur identité anglaise. Et ce n’est pas seulement dû à leur accent british prononcé.
Imaginez Pavement qui serait emmené par Damon Albarn aux débuts de Blur (« P.O.W.E.R.F.U.L. P.I.E.R.R.E. », « Up In The Air ») avec un guitariste (et seconde voix) qui balancerait des riffs entêtants à la Pixies (« I’m Not Going Roses Again ») et qui, de temps à autre, se lancerait dans un trip wah-wah façon Stone Roses (« Jasper »). Le tout en restant irrésistiblement mélodieux et entraînant malgré une voix parfois un peu limite. Nettement plus bruts sur scène que sur disque, ils mériteraient au moins de se retrouver au niveau de leurs compatriotes pourtant moins téméraires de Circa Waves. Le monde peut parfois se montrer injuste…
Happyness, de leur côté, ont sorti leur premier album autoproduit voici un peu plus d’un an. Et dans leur cas également, les versions exécutées ce soir vont nettement se démarquer de celles enregistrées en studio. Prônant un son délibérément crasseux à la distorsion parfois presque dérangeante, le trio londonien va la contrer par des effets résultant des voix combinées du guitariste et du bassiste. Et dans ce cas, on ne peut s’empêcher de penser à Sparklehorse.
Alternant les titres écorchés (qui ont dû interpeler Robin Proper-Sheppard alias Sophia, présent dans la salle), lo-fi et décoiffants, ils ont étalé un set équilibré, mené à la baguette par un batteur au faciès démonstratif et complètement dans son trip. Si notre préférence ira à la partie plus musclée (le guitariste terminera notamment un titre en piétinant son instrument), il convient de mettre en avant « Weird Little Birthday Girl », plage titulaire de la plaque et final du concert, tout en crescendo à la Radiohead. Notons encore leur sens de l’humour, sans doute davantage en rapport avec leur nom que leurs compositions.
Pour fêter la sortie de son deuxième album, Mackenzie Scott (à ne pas confondre avec Scott McKenzie, l’interprète du célèbre « San Francisco » en 1967), le cerveau de Torres, s’est teint les cheveux en blond. Outre le fait que cette colo la rend moins blême et malgré un rouge à lèvres (ou noir à lèvres, plutôt) prononcé, elle la différencie de ses musiciens que l’on pourrait assimiler à des morts-vivants. Tout de noir vêtus, ils ne dépareillent pas au cœur des atmosphères particulièrement sombres mises en place.
La chanteuse à la voix nasillarde qui oscille entre celles de Zola Jesus et Siouxsie Sioux, va articuler son set autour de « Sprinter », la deuxième plaque en question dont la plage titulaire sera un des meilleurs moments de la soirée, au même titre que « Strange Hellos ». C’est d’ailleurs via ses compositions uptempo qu’elle est la plus convaincante, lorsqu’elle ne force pas exagérément sur sa voix (« Proper Polish » sera particulièrement énervant), alors que son univers renvoie à ceux de Cat Power ou Bat For Lashes (« Son You Are No Island ») avec qui elle partage pas mal de points communs (on pense notamment à la théâtralité et à l’attitude grave).
En tout cas, pour son premier passage en Belgique, elle a rallié une foule de fans assidus et dévolus. De notre côté, on a préféré les deux groupes anglais du début de soirée. Ceci dit, des [PIAS] Nites intermédiaires de cette veine, on en redemande…