Mike Stern au Spirit of 66, une toute bonne soirée !
Avant d’en arriver à l’excellent concert de Mike Stern ce jeudi 3 novembre, il me faut signaler un autre bon moment dans la même salle verviétoise, deux jours plus tôt. En effet, le 1er novembre, un autre guitariste américain du même âge et originaire du Massachusetts également accomplissait une prestation remarquable devant un public clairsemé. Peu connu du grand public, le guitariste Johnny A. n’a débuté une carrière solo qu’en 1999 après avoir passé de nombreuses années dans l’ombre, dont sept en tant que guitariste et directeur artistique du chanteur Peter Wolf, ex-figure légendaire du J. Geils Band. Entouré d’un batteur et d’un bassiste, assis sur un tabouret, il a impressionné son auditoire par ses talents d’instrumentiste, de compositeur et d’arrangeur. Ses versions revisitées de « The Wind Cries Mary » de Jimi Hendrix, de « Memphis, Tennessee » de Chuck Berry ou de « The Night Before » de Lennon/McCartney parvenaient à surpasser les originales par la qualité, la finesse et la profondeur de l’interprétation. Quant à ses propres compositions, majoritaires, elles soutenaient la comparaison. Toujours calme et serein, peu bavard avec le public mais sympathique, ce virtuose de l’instrument ne s’est jamais limité à un seul style tout en gardant une précision, une fluidité et une aisance stupéfiante dans chacun d’eux. Les amateurs de Jazz-Rock, de Rock & Roll, de Blues et de Country, les fans de Jimi Hendrix, Jeff Beck, Lee Ritenour, Jeff Golub, Chet Atkins se doivent de découvrir cet artiste (site officiel). Enregistré en public, son CD/DVD « One November Night » balaie toute sa carrière solo et mérite le détour.
Quant au concert de Mike Stern, il se déroulait le jeudi suivant dans une salle bien remplie où le français, l’allemand et le néerlandais étaient presque autant pratiqués, l’anglais restant la langue de contact entre la scène et le public. La prestation du quatuor fut remarquable. Le guitariste et ses trois accompagnateurs, tous dévoués à la mise en valeur de chaque titre et tous dotés d’un haut potentiel d’improvisation, firent la joie d’un public connaisseur, amateur de Fusions haut de gamme. Du passage précédent au Spirit of 66, en novembre 2009, seul subsistait le bassiste vietnamo-danois Chris Minh Doky. Le batteur Gary Husband était remplacé par Dave Weckl et le trompettiste Randy Brecker par le saxophoniste Bob Malach.
À bientôt cinquante-huit ans, Mike Stern ne montre aucun signe d’essoufflement ou de lassitude. Simple, souriant et sympathique, il semble content de retrouver un public auquel il accorde toujours de l’attention, tant sur scène qu’en dehors.
Même si l’homme a acquis sa renommée avec Miles Davis au début des années quatre-vingt (« We Want Miles » en 1981, « Star People » en 1983, …) et suivi les plus grands (Blood, Sweat & Tears, Billy Cobham, Jaco Pastorius, The Brecker Brothers, …), il n’évoque pas cette période. Il se concentre sur sa carrière solo débutée en 1985. Le répertoire présenté ne comprend que ses meilleurs titres, ou, en tout cas, les plus susceptibles de plaire et de faire frémir son auditoire. Le dosage des atmosphères est subtil. Outre « Big Neighborhood », son dernier CD, vieux de deux ans déjà, qu’il promotionne lourdement et vend lui-même, les CDs « Who Let the Cats Out ? » (2006) et surtout « Voices » (2001) sont les plus gros pourvoyeurs de titres du concert.
Dans le monde du Jazz et de la Fusion, l’improvisation est plus qu’un devoir, c’est une nécessité et un plaisir non dissimulé dont chacun sait profiter. Ce quatuor ne fait pas exception et la maîtrise de chacun dans le domaine ne souffre aucune contestation. La version enregistrée en CD s’en trouvera automatiquement allongée en concert.
En maître de cérémonie, Mike Stern laisse beaucoup d’espace à ses compagnons. S’il reste un guitariste éblouissant en solo tant dans les parties intimistes que nerveuses, il impressionne autant comme guitariste rythmique. Son soutien n’est jamais anodin.
Le batteur Dave Weckl (Chick Corea Elektric & Akoustic Band, …) fait partie des favoris du public. Malgré un nombre moindre de caisses et de cymbales que par le passé, il reste toujours aussi varié, puissant et spectaculaire.
Chris Minh Doky utilise autant la contrebasse électrique que la basse. Quatre cordes lui suffisent à montrer l’étendue de son talent. Son jeu plus classiquement Jazz, volontiers acoustique à d’autres occasions, diffère profondément de celui plus Funky ou Jazz-Rock de Richard Bona et Lincoln Goines. Ce fait se constate particulièrement dans les titres joués à l’origine par ceux-là.
Son saxophone ténor entre les mains, le vétéran des studios Bob Malach observe souvent avec bonhomie et sans jouer le travail de ses partenaires. Par rapport à Bob Berg ou Bob Franseschini, il pourrait apparaître trop placide. Pourtant, lorsque le guitariste lui cède le relais, il n’hésite pas et s’élance dans des solos assassins, aussi percutants que stimulants, qui apportent toujours une valeur supplémentaire au morceau. En dehors de ces situations, il fournit un travail d’accompagnateur discret et efficace.
Le dernier titre en rappel, Mike Stern le chantait. Pour moi, ce fut une surprise. En fait, il ne se débrouille pas mal dans ce registre. Son prochain CD actera-t-il cette nouveauté ?
Tout à fait d’accord avec le CR.
Mention spéciale pour la qualité technique des musiciens, de très haut vol.
J’ai vu la formation à Dinant début juillet 2011. le show était plus long, plus ample il y a 1 semaine.
J’ajouterais enfin que le son était tout à fait remarquable, ce qui n’est pas toujours le cas chez Françis.