WILLIE (Jay) & JAMES MONTGOMERY – Cadillac walk
Dans les années 1970, lorsque Jay Willie assistait aux concerts du grand James Montgomery et de son James Montgomery Blues Band, il espérait secrètement pouvoir travailler avec lui un de ces jours. Il aura fallu cinq décennies pour que ce rêve devienne réalité mais cette fois, c’est du vrai : il existe un album ʺCadillac walkʺ réalisé par Jay Willie et James Montgomery et tout ceci est simplement succulent.
Pour les rappels historiques, on renverra le lecteur aux chroniques des albums ʺThe reel dealʺ (2010), ʺNew York minuteʺ (2013), ʺRumblin’ and slidin’ʺ (2014), ʺJohnny’s juke jointʺ (2015), ʺHell on wheelsʺ (2016) et ʺJay walkin’ʺ (2017) pour se remémorer les hauts faits de Jay Willie et de son blues band. Quant à James Montgomery, son épopée est contée sur la chronique de son dernier album ʺThe James Montgomery blues bandʺ (2016).
La rencontre entre Jay Willie et James Montgomery se fait par l’intermédiaire du batteur de Jay Willie, Bobby T Torello, qui est un ami de James Montgomery. Torello demande à son pote s’il est intéressé d’abord par un concert de Jay Willie prévu à Hartford dans le Connecticut. Nous sommes en 2016, l’endroit ne paie pas de mine (le Black Eyed Sally’s Southern Kitchen & Bar, pas grand-chose à voir avec le Madison Square Garden…) mais James Montgomery accepte de venir donner un coup de voix et un coup d’harmonica pour ce concert. Les choses s’étant bien passées dans ce bar, un nouveau rendez-vous est pris entre les deux hommes pour la confection d’un album de reprises. Jay Willie a réussi à prendre James Montgomery par les sentiments en lui proposant une reprise de ʺDetroit bluesʺ, une chanson de Tampa Red datant de 1945 et qui parle de la ville natale de James Montgomery. Il n’en fallait pas plus pour que le grand homme donnât son nihil obstat à cette nouvelle entreprise.
Et revoilà James Montgomery et Jay Willie à nouveau réunis en studio pour mettre au point ce ʺCadillac walkʺ, qui est un magnifique petit florilège de standards du blues en provenance de sévères légendes de la profession. Jay Willie a sélectionné du lourd en revisitant d’imprenables classiques comme ʺThree cool catsʺ (de Leiber et Stoller), ʺCadillac walkʺ (Moon Martin), ʺNeighbor, neighborʺ (écrit par Huey Meaux, interprété par Charles Berry en 1964 et Jimmy Hughes en 1966), l’incontournable ʺSatisfactionʺ des Stones, ʺDetroit Bluesʺ, ʺGive me one reasonʺ (Tracy Chapman), ʺEatin’ dry onionsʺ (Willie Cobbs) et deux chansons de Johnny Winter, ʺI’m yours and I’m hersʺ et ʺMean town bluesʺ.
Ceux qui connaissent Jay Willie savent que c’est un inconditionnel de Johnny Winter et que son batteur Bobby T Torello a écrasé les peaux dans le groupe du regretté albinos. On ne s’étonnera donc pas de découvrir une surreprésentation de chansons du Texan dans cette sélection. D’ailleurs, venons-en, à cette sélection. Jay Willie et James Montgomery donnent des interprétations respectueuses des versions originales et impriment un caractère assez rural et blues à des morceaux dont on connaît bien l’énergie électrique (ʺSatisfactionʺ et ʺMean town bluesʺ, pour ne pas les nommer). Encore traumatisé par la version live énorme de ʺMean town bluesʺ sur le premier album live de Johnny Winter de 1971, j’attendais de cette nouvelle reprise un déferlement de décibels électrifiés mais Jay Willie a préféré aborder les choses de façon plus campagnarde, un choix que l’on respectera avec néanmoins un petit rictus de déception au coin des lèvres.
Par contre, il n’y a aucune raison de bouder son plaisir sur les excellentes versions de ʺThree cool catsʺ, ʺCadillac walkʺ, ʺNeighbor, neighborʺ (dont on peut aussi mentionner une reprise de Dr. Feelgood sur l’album ʺDoctor’s ordersʺ de 1984), ʺDetroit bluesʺ (chanté du plus profond du cœur par James Montgomery) ou ʺI’m Yours and I’m Hersʺ (qui lui, est dans l’esprit énergique du premier album de Johnny Winter). Jay Willie tisse des solos ensorcelants sous la protection rythmique inamovible de Bobby T Torello et du bassiste Paul Opalach, qui compose avec lui le seul morceau original de l’album, un ʺMontgomery boogieʺ instrumental qui et un hommage à qui vous savez.
Voilà encore un album bien agréable de Jay Willie, qui est en quelque sorte comme les petits vins de Loire, Bourgueil ou Morgon : toujours bon. Sauf que Jay Willie, on peut en consommer sans aucune limite.
Le groupe :
Jay Willie (guitare, chant)
James Montgomery (harmonica, chant)
Paul Opalach (basse)
Bobby T Torello (batterie)
Lee-Ann Lovelace (chant)
Kyle Mangold (choeurs)
L’album :
ʺThree Cool Catsʺ (2’45)
ʺCadillac Walkʺ (3’35)
ʺNeighbor Neighborʺ (3’24)
ʺ(I Can’t Get No) Satisfactionʺ (4’55)
ʺDetroit Bluesʺ (5’10)
ʺGive Me One Reasonʺ (5’28)
ʺMontgomery Boogieʺ (2’46)
ʺI’m Yours And I’m Hersʺ (3’19)
ʺEatin’ Dry Onionsʺ (4’01)
ʺMean Town Bluesʺ (3’58)
https://www.jaywilliebluesbandhome.net/
https://www.jamesmontgomery.com/
Pays: US
Zoho Roots Records
Sortie: 2020/04/10