SOLITÄR – Bus driver immigrant mechanic
Derrière ce pseudonyme de Solitär se cache un certain Mikael Tuominen, né en 1973 en Suède de parents finnois et entré en musique comme on entre en religion. Ce garçon est un multi-instrumentiste ayant opéré dans des groupes du nom de Kungens Män ou Automatism. Son spectre musical va du doom metal à l’improvisation avant-gardiste, en passant par la musique de films et l’indie rock.
En solitaire, justement, Mikael Tuominen s’est fendu de deux albums solos. Le premier est de 2020 et s’appelle ʺ1989ʺ, l’année des seize ans du musicien, sans doute une date importante pour lui. Quand on a seize ans, on vit forcément des phases importantes de sa vie. Et 1989, de plus, quelle année ! C’est quand même la sortie du premier Stone Roses et du ʺSonic templeʺ de The Cult, il ne faut pas déconner. Sur ce disque, Mikael Tuominen profère une new wave lointaine et glaciale, tout à fait intéressante, avec des accroches évidentes (ʺThe last breathʺ, ʺ1989ʺ, ʺSapiensʺ).
Sur ʺBus driver immigrant mechanicʺ (2022), Solitär revient un peu sur les mêmes modes d’expression, avec davantage d’aération dans ses propos. On y rencontre plus de psychédélisme (le premier morceau ʺElectric seaʺ vogue entre les Doors et Pink Floyd), des épanchements plus introspectifs (ʺShip of excitementʺ, où on se demande bien où se trouve l’excitement) et des rêveries planantes aux connotations eighties (ʺConcrete spaceshipʺ, le vaisseau spatial en béton, tout un programme…).
Le passage le plus surprenant de cet album est sans aucun doute la reprise de ʺThe priceʺ de… Twisted Sister. Et on se demande comment Mikael Tuominen, le mec délicat et torturé par définition, le gusse habité par la grâce parnassienne la plus introspective, s’est mis en tête de reprendre un morceau de ces gros pompiers du hard rock que sont Twisted Sister. La version présentée ici est tout en finesse, ralentie à l’extrême, la mélodie suit le même cours mais en mode acoustique et on ne reconnaît en fait que les paroles. C’est une version bluffante, qui évoque en fait un beau morceau de Twisted Sister (la version originale est une ballade, pour ceux qui se souviennent…). Voilà le vrai morceau de bravoure, audacieux de cet album.
Le reste du disque continue à nous bercer avec les agréables ʺBus driverʺ, ʺSpegel Spegelʺ, ʺIt rainsʺ qui ont tous un petit côté psychédélique mélancolique subtilement joué par toutes sortes d’instruments entièrement manipulés par Mikael Tuominen, qui entoure ces ambiances sonores de sa voix tranquille et flottante. On sent toujours dans ces compositions une petite pointe de Syd Barrett sur le chant qui nous propulse dans un monde imaginaire, tout de blanc vêtu.
Disque résolument plus calme que le premier ʺBus driver immigrant mechanicʺ recèle de petits trésors de délicatesse et des joyaux instrumentaux touchants. C’est une œuvre qui se recroqueville sur elle-même et fournit à l’auditeur maintes occasions de se laisser aller à une introspection intérieure et romantique.
Le groupe :
Mikael Tuominen (tout)
Tindra Strinnholm (chœurs sur ʺElectric seaʺ)
Lo Strinnholm (chœurs sur ʺElectric seaʺ)
L’album :
ʺElectric Seaʺ (04:40)
ʺShip of Excitementʺ (04:23)
ʺConcrete Spaceshipʺ (02:46)
ʺThe Priceʺ (03:03)
ʺBus Driverʺ (03:57)
ʺSpegel Spegelʺ (04:17)
ʺIt Rainsʺ (02:24)
ʺA Flash in a Glass Jarʺ (03:58)
ʺBrusʺ (01:31)
https://solitar.bandcamp.com/album/bus-driver-immigrant-mechanic
Pays: SE
Tonzonen Records
Sortie: 2022/11/18