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KOENJI HYAKKEI – Dhorimviskha

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Quand on cherche, on trouve, dit le proverbe. Et quand on cherche du bizarre, on trouve du bizarre, comme avec ce groupe Koenji Hyakkei qui nous vient du Japon et qui existe déjà depuis plus de 25 ans. Cependant, Koenji Hyakkei (qui signifie Les cent vues de Koenji, un quartier de Tokyo) n’a que cinq albums à son actif, ce qui est peu pour un groupe déjà ancien. Mais il faut dire que le fondateur du groupe, Yoshida Tatsuya, n’a pas que ça à faire, tout impliqué qu’il est dans des dizaines de projets musicaux divers et variés. Le groupe principal de Yoshida Tatsuya est Ruins, un projet avant-gardiste complètement fou où la batterie règne en maîtresse. Là, on en est à treize albums et une quinzaine d’EPs depuis 25 ans. Mais le bon Yoshida Tatsuya est également impliqué dans les mythiques Acid Mother Temple, ainsi que dans Akaten, Breast Fed Yak, Daimonji, Satoko Fujii Quartet, Keiji Haino & Tatsuya Yoshida, Uchihashi Kazuhisa & Yoshida Tatsuya, Knead, Korekyojinn, Mainliner, Musica Transonic, PainKiller, RonRuins, Ruinzhatova, Samla Mammas Manna, Sanhedolin, Sekkutsu Jean, YBO², Zubi Zuva ou Seikazoku. Tous ces projets ne sont pas actifs en même temps mais ils occupent ou ont occupé notre cher Yoshida Tatsuya depuis une bonne trentaine d’années.

On comprend aussi que la boulimie de travail de Yoshida Tatsuya n’est pas dédiée au boogie rock simplet et ouvrier. L’homme se consacre à tous les styles qui peuvent rebuter l’esprit humain basique : prog, avant-prog, expérimental, brutal prog, jazz d’avant-garde, noise rock, improvisation ou zeuhl. Petit rappel sur le zeuhl, puisque c’est ce qui va nous intéresser ici avec Koenji Hyakkei, c’est un genre musical tiré du progressif et plus particulièrement de l’avant-prog, dont le terme vient du kobaïen, la langue imaginaire inventée par Christian Vander, batteur de Magma. C’est en effet à Magma que l’on doit le zeuhl, un terme qui signifie aussi la mémoire sonore de l’univers, dans la philosophie kobaïenne. Autrement dit, pour simplifier à l’attention des grutiers qui n’écoutent que du boogie ou du metalcore : le zeuhl, c’est prog à mort.

Il va donc falloir s’armer d’une bonne dose d’ouverture d’esprit pour rejoindre les chemins tracés par Koenji Hyakkei, qui signe ici un cinquième album que les spécialistes du genre considèrent comme supérieur à sa dernière livraison, « Angherr shisspa », sorti en 2005. Ici aussi, les musiciens de Koenji Hyakkei (Yoshida Tatsuya, batterie et chant ; Sakamoto Kengo, basse et chant ; Yabuki Taku, claviers ; Yamamoto Kyoko, chant ; Komori Keiko, cuivres et chant et Koganemaru Kei, guitare et chant) se livrent aussi à un chant incompréhensible, n’appartenant à aucune langue. Remarquez, pour une langue incompréhensible, le japonais suffisait… S’il fallait décrire le style régnant sur ce disque, on pourrait dire que les musiciens de Koenji Hyakkei se sont complètement lâchés, s’attaquant sans vergogne à l’héritage de Frank Zappa pour mieux le taillader, le déconstruire et partir dans toutes les folies possibles (« Vleztremtraiv »). Les titres affichent des durées conséquentes, en moyenne dix minutes, ce qui permet toutes élucubrations sonores possibles, avec toujours une énorme maîtrise des instruments. Car les gens de Koenji Hyakkei ne sont pas là pour faire n’importe quoi, ils suivent une trame d’une extrême rigueur du point de vue rythmique (c’est Yoshida Tatsuya qui tient les fûts, et avec lui ça ne rigole pas). Les moments où on peut encore s’accrocher un peu à du progressif encore classique (« Levhorm ») ne sont pas légion et il faut rapidement se laisser emporter dans des rapides où l’art lyrique se drape de folie baroque (« Zjindhaiq », « Phlesstighas ») et où l’interaction de la clarinette, de la guitare et de la rythmique explose dans des geysers jazz progressif incontrôlables (« Djebelaki zomn »). « Palbeth tissilaq » calme le jeu le temps d’un morceau plus tranquille, avant que « Dhorimviskha » ne sonne l’hallali sur les tympans et le psychisme de l’auditeur pour un ultime délire de près de douze minutes.

Effectivement, ce nouvel album de Koenji Hyakkei est effervescent et imparable dans le genre zeuhl. C’est une nouvelle manifestation du génie créatif de Yoshida Tatsuya et une nouvelle pièce dans le dossier déjà très lourd du rock japonais, un des plus audacieux et aventureux de la planète.

Pays: JP
Skin Graft
Sortie: 2018/06/27

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