VITJA – Mistaken
S’il fallait donner une bonne note ici, on la donnerait à la fiche de promotion du label Century Media, qui a réussi à faire un portrait tellement flatteur de Vitja qu’on en était presque à adhérer totalement aux dithyrambes et à penser que Vitja était soudainement devenu le meilleur groupe du monde. C’était bien tenté mais il va quand même falloir relativiser un tout petit peu.
On admettra quand même que les Allemands de Vitja ont réalisé quelques progrès depuis leur dernier album « Digital love« . Alors que ce précédent disque tentait d’émettre des idées un peu politisées sur notre monde moderne, il se perdait dans un metalcore caricatural où tous les effets agressifs se voyaient systématiquement déboulonnés par des intermèdes mélodiques à la limite des Bisounours. Ici, on nous dit que David Beule (chant), Vladimir Dontschenko (guitare), Mario Metzler (basse) et Daniel Pampuch (batterie) ont cherché à se lâcher davantage dans le processus d’écriture, sélectionnant rigoureusement les morceaux écrits et jetant une grande quantité au panier quand ils voyaient que les choses ne s’enchaînaient pas naturellement. Voilà une démarche bien louable et il est vrai qu’on sent un petit mieux dans les compositions de « Mistaken », qui affiche plus de cohérence et où la cohabitation bancale entre la violence et la douceur est réduite au minimum. La cohérence vaut aussi pour la prévalence des aspects mélodiques qui, quand ils sont présents dans un morceau, le sont vraiment et donnent à ce morceau une structure mélodique plus crédible.
Donc, les gens de Vitja ont soigné l’écriture de leurs morceaux. C’est bien mais c’est quand même le minimum syndical que l’on peut attendre d’un groupe qui prétend mener une carrière un peu sérieuse. De l’autre côté, Vitja s’est aussi efforcé d’avoir une certaine cohérence dans son message, avec des paroles évoquant les échecs personnels, et comment on les surmonte, par exemple en écrivant un album un peu meilleur que le précédent. Là aussi, on ne peut que se réjouir de ces efforts qui semblent porter leurs fruits par-ci par-là au cours de l’album.
Il y a aussi un petit mieux sur la production, qui a été confiée à des gens éclairés comme Daniel Keller et Lucas Kramer, plus une mastérisation signée Aljosha Sieg. Les hommes de Vitja ne cherchent pas ici à donner dans l’emphase et réussissent à faire des morceaux de « Mistaken » des moments où force et mélodie cohabitent harmonieusement. Evidemment, on reste dans un registre metalcore et il y a toujours des choses qui irritent. Le premier morceau « Mistaken » met ses gros sabots pile dans tous les poncifs du metalcore et constitue une entame assez difficile à négocier quand on démarre l’écoute de l’album. Mais les choses s’améliorent sensiblement par la suite, avec des titres que l’on qualifiera de supportable (« Overdose », avec en guest Andy Dörner de Caliban, « Friends don’t lie », « Down », « Anxiety » qui est sans doute le morceau le plus solide de la sélection). Vers la fin de l’album, Vitja aère ses propos avec des titres plus calmes qui conservent une certaine crédibilité dans le genre (« High on you », « To the Moon », complètement calme et par conséquent un des plus intéressants du disque pour la catégorie des morceaux cool). Quand je parle de crédibilité, c’est au terme d’un énorme effort d’empathie où j’ai tenté de me mettre dans la peau du fan de base de metalcore, qui n’a jamais connu que les GSM et les MP3 et qui croit que nos grands-parents vivaient dans des cavernes parce qu’ils n’avaient que la télé en noir et blanc. Voilà les efforts qu’il faut déployer pour tenter de trouver au metalcore un quelconque intérêt. C’est dire si ce genre crée véritablement une césure entre les générations.
Au final, on ne va pas être trop méchant avec Vitja qui a véritablement cherché à transcender sa musique par rapport à son disque précédent. Mais il est clair que personnellement, j’aurais oublié ce nouvel album dès demain matin. En attendant le prochain…
Pays: DE
Century Media
Sortie: 2018/09/28