KRAKAUER, David – Bubbemeises
David Krakauer est un clarinettiste virtuose new yorkais célèbre appartenant au groupe Klezmatics. Son but est de perpétuer la musique Klezmer, une musique yiddish ancestrale enrichie par des influences diverses. La musique Klezmer est basée sur la virtuosité instrumentale, l’expressivité et l’improvisation. Ici, elle se mêle au jazz contemporain, qui intègre toutes les cultures par un retour aux sources. Le but avoué de David Krakauer est de faire tomber les barrières entre les genres pour rendre la musique plus vivante. D’ailleurs il excelle dans toutes les formes de musique : musique de chambre, avant-garde, rock. Il a d’ailleurs collaboré avec John Cale.
Sur cet album, « Bubbemeises », un mot yiddish pour qualifier les mensonges de grands-mères, des absurdités hilarantes, David Krakauer, clarinette, clarinette basse, voix, s’est entouré de Sheryl Bailey, guitare électrique, Will Holshouser, accordéon, Nicki Parrott, basse acoustique, basse électrique fretless, sauf sur les morceaux 9 et 10, Trevor Dunn, basse électrique sur les morceaux 6, 8, 9 et 10, Michael Sarin, batterie, et Josh Dolgin, alias Socalled, sampler, sequencer, voix, accordéon, orgue.
« Bubbemeises » est un morceau largement inspiré par la tradition yiddish, où vient se greffer un jazz débridé sur lequel David Krakauer parle plus qu’il ne chante. A la clarinette répondent des percussions très rock. Ce morceau de six minutes fait figure de manifeste, mêlant tous les éléments rock et jazz de Klezmer Madness à la puissance de Krakauer et la verve de Socalled.
« Ms N.C. » est un hommage à une certaine dame connue de l’auteur. Il y révèle une sensibilité largement au-dessus de la moyenne dans un style inspiré de son idole, Sydney Bechet.
Sur l’emballant « Moskovitz And Loops Of It », il révèle un style débridé, avec une partie de clarinette où il démontre toute sa virtuosité. Son comparse Socalled s’y livre à des ajouts d’échantillons complètement démentiels, tout en conservant un profond respect de la musique Klezmer. Du grand art.
Le swing présent sur « B Flat à la Socalled » n’est pas en reste avec ses bruitages et ses samples déroutants qui touchent au génie. La clarinette est toujours présente au rendez-vous pour nous rappeler qui commande, et de quelle façon ? L’accordéon, la basse, la batterie et la guitare électrique remplissent leur rôle discret à la perfection.
L’entêtant « Turntable Pounding », dont le rythme est basé sur la tradition hassidique de frapper les mains sur les tables, est une autre pièce déjantée où David Krakauer incorpore des éléments de jazz, de rock et de funk dans une synthèse époustouflante ponctuée par des éléments de la musique yiddish, toujours omniprésente, pour nous donner un concert pimenté et riche en couleurs, avec l’echoplex de Phillip Shaw Bova.
Après une courte introduction vocale, « Long…Short, Long (Les Colocs)° » nous permet d’apprécier de nouveau ce virtuose de la clarinette, instrument assez rare dans le monde du rock. Son génie de la composition nous permet de boire du petit lait, tant son style est déroutant et déjanté, tout en maintenant une rigueur instrumentale à toute épreuve.
Entrecoupé par des interventions vocales bizarroïdes du speaker 99 Hooker, le funkisant « Bus Number 9999 » nous permet d’apprécier un jazz totalement débridé qui touche au génie, avec toujours à l’avant-plan cette clarinette, basse ou « normale », ce terme ne s’appliquant pas vraiment à ce génie de l’expérimentation.
Beaucoup plus festif, rappelant les banquets yiddish, « The Electric Sher » est complètement transformé par Krakauer. Son exécution est parfaite de bout en bout et son enthousiasme intact. Tous ces énergumènes donnent libre cours à leur talent pour le plus grand plaisir des auditeurs. Ils redonnent à la musique klezmer le souffle de ses origines, celui de la danse, de la fête et de la célébration de la vie.
Sur « Rumania, Rumania » , Krakauer est toujours épaulé par l’impeccable Klezmer Madness. Son jeu à la clarinette engendre le plus profond respect par l’émotion qu’il parvient à dégager de ce titre complètement fou. Son compère canadien Josh Dolgin y va aussi de sa contribution discrète.
Enfin, « Rue Mania » est un titre bonus qui montre diverses facettes d’un grand talent en quelques secondes qui paraissent bien trop courtes.
Cet album très spécial demandera sans doute quelques écoutes aux amateurs de découvertes avant de révéler toute sa richesse. Le plaisir en est d’autant plus grand.
Rappel des titres :
- « Bubbemeises »
- « Ms N.C. »
- « Moskovitz And Loops Of It »
- « B Flat à la Socalled »
- « Turntable Pounding »
- « Long…Short, Long (Les Colocs)° »
- « Bus Number 9999 »
- « The Electric Sher »
- « Rumania, Rumania »
- « Rue Mania (bonus track) »
Pays: US
Label Bleu / Bang! LBLC 6677
Sortie: 2005/05/27