BLINDING SPARKS – Renaissance insipide, deluxe edition (EP)
Alors là, on tient un phénomène, un truc qui éveille des milliers de questions quand on s’aventure dans sa « musique » (on continuera d’employer ce mot par convention à défaut d’en employer un autre qui commence par la même lettre). En effet, quand on fait la connaissance de Blinding Sparks, on est face à une alternative. Soit ce groupe se prend au sérieux et on tient ici, sans doute, le groupe le plus insupportable du monde. Soit les types pratiquent un humour à huit degrés, ce qui est le seul argument pour les faire remonter un peu dans notre estime.
Le trio Blinding Sparks vient de Moselle, vu son site internet qui mentionne quelques concerts joués par le passé entre Metz et Sarreguemines. On peut aussi voir sur ce site quelques interviews données à des télévisions locales qui permettent de découvrir la personnalité originale de Jérémy Conrad, fondateur de Blinding Sparks et toujours affublé d’un costume et d’une cravate qui tranchent avec la musique torturée et post-rock qu’il défend. Sa guitare très heroic fantasy, digne de Kiss ou de Manowar, est également un accessoire étrange quand on voit ce jeune homme timide s’exprimer posément sur ses projets musicaux.
Mais malgré toute la sympathie que ce garçon dégage, il va falloir replacer le débat sur le plan musical et là, ça coince. Blinding Sparks pratique ce qu’il appelle du post-rock et a déjà disséminé ses chansons au travers que quelques EP et démos (« Lost in time », 2012; « Brutal awakening », 2013; « The useless fate », 2014 et « Renaissance insipide », 2015). A l’écoute de l’édition de luxe du dernier EP « Renaissance insipide » (agrémenté d’un CD bonus), on reste atterré par la platitude des paroles, de la voix et de l’instrumentation. La voix du chanteur, dépourvue de timbre et de coffre, est décalée en permanence, dérapant sur les aigus et s’aventurant à mauvais escient dans des growlings qui tombent complètement à plat sur les refrains. La musique pompeuse oscille entre pop romantique et heavy metal timide, incapable d’acquérir du souffle à un quelconque moment des trois morceaux du premier CD. Et quant aux paroles, elles expriment les préoccupations personnelles et nombrilistes de l’auteur, qui ne rate jamais aucun lieu commun et ne fait aucun effort littéraire dans son écriture.
Mais cela est tellement énorme de médiocrité qu’on en vient à se demander s’il n’y aurait pas de l’humour de second degré derrière tout cela. Une piste nous est donnée avec le second CD bonus, qui regroupe neuf chansons supplémentaires, dont certaines sont bien amusantes. On démarre néanmoins avec un morceau qui rappelle les heures sombres que l’on vient de vivre sur le premier CD (le naïf « Sandra ») mais quand on écoute Jérémy Conrad partir dans des descriptions chantées des tâches professionnelles d’un avocat (« L’avocat »), directement sorties d’un cours de droit, on commence à se fendre la pêche. Idem pour « Un jour je signerai », violente tirade qui voit le chanteur espérer la perspective d’une signature sur un gros label afin de gagner un maximum de blé. On peut toujours rêver… « Le belouse » démarre comme un blues classique pendant trente secondes avant de se terminer par ce constat définitif, « c’est chiant ». « Pour me reposer » dure aussi trente secondes et contient des paroles très simples : « Il n’y a pas d’autres solutions pour me reposer que de me suicider ». On croirait entendre de l’Ultra Vomit. De notre côté, on n’ira quand même pas jusqu’à espérer le suicide du chanteur, juste un changement de branche professionnelle suffirait (vers les assurances ou l’immobilier, par exemple). Enfin, un exercice de speed metal instrumental (« XX ») fait mine de nous réconcilier avec ce groupe compliqué et insaisissable qu’est Blinding Sparks.
Sont-ils nuls? Sont-ils géniaux? On peut se poser la question mais une chose est sûre : intéressez-vous à cet album seulement si vous ne pouvez pas faire autrement.
Pays: FR
Autoproduction
Sortie: 2016