WHITE CROCODILE – The stranger
Parmi les légendes urbaines que notre société se plaît à répandre, il est celle des crocodiles que certains bobos élèvent dans leur baignoire comme animal de compagnie mais dont ils doivent se débarrasser une fois l’animal devenu trop grand. Le reptile diapside est alors abandonné dans les égouts où faute de lumière, il perd sa couleur et devient blanc. L’aspect légendaire réside dans le nombre et la couleur de ces bestioles mais il est vrai qu’un crocodile a été trouvé dans les égouts de Paris en 1984.
Ce qui est par contre tout à fait crédible, c’est le groupe qui a basé son nom sur cette histoire, le combo anglo-franco-suédo-américain White Crocodile. Cette formation gravite autour de la chanteuse anglaise Julie Biereye, qui arrive à Paris après avoir passé de nombreuses années dans le Footsbarn Travelling Theater, une troupe théâtrale itinérante qui joue du Shakespeare ou du Molière entre la France et la Grande-Bretagne depuis les années 70.
La jolie Britannique passe alors à la chanson et au rock ‘n’ roll avec quelques compagnons récupérés de ci de là. White Crocodile naît dans un esprit bohême et libertaire et formule une musique assez inclassable, oscillant entre cabaret, punk, chanson ou folk. L’esprit qui anime le groupe est proche du mouvement artistique, Julie Biereye ne se contentant pas d’animer un simple groupe rock mais cherchant au contraire à imprimer un esprit large et transversal qui touche d’autres disciplines artistiques (théâtre, spectacle vivant, cinéma). Les complices qui constituent White Crocodile sont Erik Maunoury (batterie et percussions), Julien Omé (guitare), Jeff Hallam (basse), ainsi que les paroliers Michael Greenway, Pascal Rénéric et David Johnston, qui prend la plus grande part de l’écriture avec bien sûr Julie Biereye.
Le premier album « The stranger » révèle bien ce bouillonnement artistique et créatif qui constitue la moelle épinière de White Crocodile. Entre punk cabaretier et blues garage, Julie Biereye et ses hommes dressent une paysage fait de cheminements dans le désert (« One way ticket », « Santa Fé »), de course folle opposant un Don Quichotte de bazar à Dieu le père (« Where’s the money »), de poésie franco-anglaise (« The walker »), de slow rêveur (« Loneliness »), de rock aéronautique (« Les avions ») ou fougueux (« Restless », « The lady’s on fire »). Comme on le voit, les paroles des chansons sont partagées entre le français et l’anglais, et un certain surréalisme est souvent de mise dans les textes.
Ce premier album de White Crocodile est une belle réussite dans le créneau de l’inclassable classieux, de la chanson française chantée en anglais ou du punk rock joué avec une âme blues. On ne sait toujours pas s’il y a beaucoup de crocodiles qui infestent les égouts des villes mais on pourra laisser s’exprimer ceux qui habitent dans nos têtes avec ce disque concerné et convaincant.
Pays: FR
Leocas Records
Sortie: 2015/04/14