FRASCA, Dallas – Love army
C’est en poussant la chansonnette lors d’une pendaison de crémaillère que Dallas Frasca, 18 ans à l’époque, prend conscience de son talent vocal. Dès lors, les choses s’enchaînent avec l’implacabilité d’une crise nucléaire internationale et Dallas Frasca se retrouve rapidement à la tête d’un groupe de rock ‘n’ roll qui conquiert très vite les échelons de la gloire dans cette lointaine Australie, pays d’origine de la demoiselle.
Nous sommes en 2006 et Dallas Frasca se met rapidement tout le gotha rock des antipodes dans la poche. Le groupe qu’elle crée avec Jeff Curran, un guitariste gaucher, remporte un premier succès en 2010 avec le prix d’artiste de l’année et de la meilleure chanson aux Musicoz Awards. Puis c’est une troisième place à l’important International Songwriting Competition (au jury composé de Tom Waits, Tori Amos, Jeff Beck et Ozzy Osbourne). L’arme fatale de Dallas Frasca est sa chanson « All my love », qui fait son chemin dans certains charts (en République tchèque, notamment) et ouvre quelques portes à Dallas Frasca et son groupe, comme de grosses premières parties pour Aerosmith, Patti Smith ou Van Halen et des participations à de prestigieux festivals (Big Day Out, Bluesfest, Pyramid Rock Festival ou le Blues Passion de Cognac).
Dallas Frasca est aussi sur des coups humanitaires, comme ce concert de 2008 en compagnie de Midnight Oil pour le compte d’Amnesty International, un concert pour l’International Earth Day à Montréal en 2009 ou une participation au lancement de la fondation écologique du naturaliste Bob Irwin, en compagnie de Slash à Brisbane en 2012.
Slash ne tarit d’ailleurs pas d’éloges envers Dallas Frasca dont le nouvel album débarque en Europe par l’entremise du label français Verycords. Après « Learn your routes » (2007), « Not for love or money » (2009) et « Sound painter » (2012), « Love army » est le disque qui doit achever de faire connaître Dallas Frasca dans l’hémisphère nord. Tailladé à coups de grosses guitares bien nerveuses façon Foo Fighters et soutenu par des rythmiques dansantes, cet album met en valeur la voix rocailleuse et sensuelle de Dallas Frasca, vocaliste à l’impressionnant organe. Les premiers morceaux « Success is the best revenge », « You are beautiful » ou « Today » sont chargés de lancer l’assaut primal, scellé par l’énorme riff gouailleur de « Suzy’s on my mind ».
Une petite période de calme relatif se profile au long de « Here all long » ou « The day that we were done », avant que le groupe ne sorte la carte maîtresse, un « Love army » de dix minutes qui nous emmène aux confins de vapes zeppeliniennes taraudées par un mid-tempo stratosphérique qui ne tarde pas à libérer un flot colossal de guitares bluesy, lourdes et sur lesquelles flotte la voix diaphane de Dallas Frasca. Le groupe signe ici son « Kashmir » personnel, un truc qui convoque Monster Magnet, Black Sabbath et les Black Keys dans un même panier à crabes cosmiques. Jusque-là, Dallas et ses sbires amusaient la galerie avec des petits coups d’épées électriques ; ici, ils plantent la masse d’armes en plein milieu du front. De petits jongleurs, ils passent au statut de montreurs d’ours, une autre dimension. Après, il n’y a plus qu’à évacuer les ruines fumantes à coups de souffleuse (« Rise ») et laisser un bouquet de roses rouges sur le carrelage encore sanguinolent (la ballade hispanisante « Corazon en la seda ») pour achever l’opération séduction.
Dallas Frasca signe ici un album percutant et fier, glisse une intéressante carte de visite sous la porte des kids européens et pourrait bientôt, pourquoi pas, consacrer son talent par l’album définitif qui la mènera à la cour des grands. Car, pour autant que ce « Love army » soit excellent, on devine que Dallas Frasca et ses hommes ont encore quelques atouts cachés dans la botte. On espère en tout cas qu’ils n’ont pas tout donné sur cet album et nous gardent à l’avenir un chien de leur chienne.
Pays: AU
Verycords
Sortie: 2015/03/16