DEVA – Murther
Parmi les CD que je suis chargé de chroniquer, il en est un qui a particulièrement attiré mon attention quand j’ai ouvert mon dernier arrivage. La pochette représente un sentier dans une forêt sombre et noyée dans le brouillard. À gauche de ce paysage mystérieux, la photo d’une femme encapuchonnée dont on ne distingue que le nez et les lèvres. Un nom : Deva. Inconnu au bataillon. Piqué par la curiosité, j’ouvre le CD. À l’intérieur une inscription laconique en anglais, qui dit en substance: «Deva dédicace cet album à toutes les femmes persécutées et condamnées à mort au fil des siècles». Le mystère s’épaissit.
Une brève recherche sur la toile m’apprend que Deva est une formation italienne composée de Beatrice Palumbo au chant (soprano) et au violon ainsi que de Federico Salerno aux guitares et au chant. C’est donc bien à un premier album que nous avons affaire ici. Enregistré à Milan, cet opus ambitieux intitulé «Murther» propose 15 titres.
D’entrée de jeu, «Can I Be Saved» donne le ton. On est dans un morceau bien rythmé de métal prog à tendance symphonique. Deux voix qui se complètent et des riffs de guitare tout à fait classiques dans ce genre d’exercice. «Come To Me» embraie avec un morceau rythmé d’un tempo légèrement plus lent que le premier. Des chœurs à la Epica et des sons de guitare à la Stream of Passion, ce qui n’est pas fait pour me déplaire, un morceau très mélodique à nette connotation prog.
Après l’intermède instrumental de «Is This What We Really Are» qui finit sur le son de la mer et d’une cloche sonnant dans le lointain, «Delirium» attaque sur un rythme de guitare rapide et saccadé. La voix de Beatrice n’est pas sans rappeler Simone Simons dans ce morceau. La construction guitare/batterie rappelle elle aussi Epica. Après le délire, la décadence. «Decadence» commence par un passage voix claire de Federico, rejoint ensuite par Beatrice. La mélodie a un côté médiéval en phase avec l’artwork de la pochette. On repart ensuite vers la ballade prog.
«What Have I Become» commence par des cordes classiques avant d’évoluer vers une mélodie très inspirée par Stream of Passion… Le tempo s’accélère en fin de morceau. Instrumental à la guitare. C’est propre et bien fait, même si cela manque d’originalité. Nouvel interlude instrumental avec «Awareness Suddenly» avant le déferlement de guitare qui ouvre le morceau «Lady Of Time». On est ici dans un univers très proche de celui des comédies musicales à l’anglaise ou des opéras rock. Les sources d’inspiration ne sont pas bien difficiles à détecter.
«My Sweetest Pain» arrive comme une respiration, une ballade mid-tempo et toujours cette impression de déjà vu, ou plutôt déjà entendu, dont je n’arrive pas à me défaire. «Something Beautiful» est un nouvel interlude qui évoque furieusement Ayreon, tout comme le début du morceau suivant «Confession». Il y a pire comme modèle, mais les Milanais donnent l’impression de céder à une certaine facilité, sans verser pour autant dans le plagiat pur et simple. Les voix ne sont pas désagréables, mais manquent un peu de personnalité.
Nouvel intermède musical, au piano cette fois avec «Remembrance». Le morceau le plus sympathique pour moi est sans conteste la très jolie berceuse «Lullaby», qui permet à la voix de Beatrice d’exprimer tout son talent. L’album termine en apogée avec les deux plus longs morceaux. «Dust And Shadows» ouvre par une partie chorale soutenue par la guitare électrique. Le morceau prog musclé dans toute sa splendeur avec des guitares qui déchirent bien, des claviers qui assurent la mélodie avec la voix. Un des morceaux les plus originaux de l’album. Le dernier morceau «Lilith» retombe dans le travers déjà évoqué : trop copié collé de groupes comme Epica.
Au total, un album largement inspiré par d’illustres prédécesseurs, mais qui ne parvient pas à se détacher de ses modèles, au risque de manquer cruellement de personnalité. Il y a bien sûr quelques sursauts d’originalité, mais il faudra que Deva trouve sa marque de fabrique et qu’il parvienne à se détacher de ses influences pour développer un style plus personnel. De ce point de vue, la fin de l’album montre clairement que tous les espoirs sont permis. Je suis curieux d’entendre comment ils vont évoluer…
Pays: IT
RNC MUSIC 8 019991 877586
Sortie: 2014/02/25