EYE OF SOLITUDE – Canto III
L’automne qui bat son plein, avec son cortège de pluie, de vent, de feuilles mortes et de brumes, est la saison idéale pour écouter Eye Of Solitude, un groupe anglais plongé dans les affres du doom metal à tendance funéraire et à option death/black metal désespéré. Les membres de cette formation donnent à Eye Of Solitude un petit aspect cosmopolite, puisque très peu de noms semblent sonner typiquement anglais : on y trouve en effet Daniel Neagoe (chant), Indee Rehal-Sagoo (guitare), Mark Antoniades (guitare), Pedro Caballero Clemente (claviers), Chris Davies (basse) et Adriano Ferraro (batterie). Chris Davies et Mark Antoniades viennent de Sidious, formation black metal symphonique londonienne ayant sorti un EP cette année (« Ascension to the throne ov self », si vous voulez tout savoir ou briller en société).
Eye Of Solitude commence à attirer l’attention des spécialistes puisqu’il en est ici à son troisième album en trois ans et que ses précédents « The ghost » (2011) et « Sui cadere » (2012) ont discrètement mais certainement séduit les amateurs du genre qui sont tombés sur ces albums. Avec « Canto III », le groupe devrait continuer sa montée en puissance puisqu’il s’attaque avec ambition (et réussite) à l’immense « Enfer » de Dante, dans un album concept dégoulinant d’ambiances glauques et tristes.
Six morceaux, 66 minutes : l’affaire est dense, lourde de conséquences. Les musiciens d’Eye Of Solitude ont composé ici une somme musicale et ont atteint des sommets. En fait de sommet, il faudrait davantage parler d’abysses et de profondeurs, car les types d’Eye Of Solitude n’ont rien d’alpinistes mais feraient plutôt dans la spéléologie partie explorer les dédales les plus enfouis de la noirceur et du pessimisme.
Les morceaux de l’album, oscillant entre huit et quatorze minutes, ont le temps de déployer des ambiances poisseuses et de tisser des toiles symphoniques morbides et tristes, sans pour autant être dépourvues d’une certaine beauté. Le groupe opère selon une méthode que l’on retrouve sur à peu près tous les morceaux : chant typiquement death fait de growlings caverneux et de grésillements telluriques qui démarre le titre, puis passage à un chant clair (en anglais ou italien) qui exprime d’insondables tristesses sur des nappes de guitares massives et lentes, parfois déchirées par des accès de furie black metal ou ornées de sanglots. Une petite influence Paradise Lost peut être remarquée de temps à autre.
Le voyage effectué au long de ces six titres épiques est fascinant. Eye Of Solitude associe désespoir, force et grâce sur cet ensemble tout en lourdeur écorchée et en déshérence classieuse. On évitera de passer ce disque à l’occasion du repas de communion du petit dernier ou du drink de Noël au bureau, mais les amateurs de doom funéraire et de sludge sépulcral trouveront en Eye Of Solitude un compagnon fidèle pour leurs rêveries nécrologiques et leurs réflexions gothiques. Une édition de luxe de « Canto III » est également disponible, avec un CD bonus de sept titres supplémentaires. Nous ne pouvons en parler en détail car nous ne l’avons pas reçu mais je pense qu’on peut faire confiance au groupe pour ces bonus, vu qu’il brille déjà sur le disque principal.
Pays: GB
Kaotoxin Records
Sortie: 2013/12/03