HEAVEN SHALL BURN – Veto
Avec une existence qui remonte à 1997 (soit seize ans, l’air de rien), Heaven Shall Burn commence à devenir un vieux crocodile de la scène métallique allemande. Avec un line-up ayant peu varié durant toutes ces années (Maik Weichert, guitare ; Matthias Voigt, batterie ; Marcus Bischoff, chant ; Eric Bischoff, basse et le guitariste Alexander Dietz qui remplace Patrick Schleitze depuis 2005), le groupe thuringien affiche au compteur sept albums.
Au cours de ces sept albums, Heaven Shall Burn a eu l’occasion de montrer des évolutions parfois spectaculaires. Il est désormais loin le temps du premier album « Asunder » (2000) où le quintette manipulait un death metal qui faisait penser à du Kreator mal digéré. Dès « Whatever it may take » (2002), le groupe gagne en maîtrise sonore et se tourne avec succès vers des horizons plus metalcore, au point de devenir outre-Rhin un des petits maîtres de ce genre facilement menacé de galvaudage. En ce sens, « Whatever it may take » reste sans doute le meilleur album du combo.
Comme dit, le metalcore est un genre difficile car ses codes stricts peuvent faire sombrer à tout moment ceux qui en jouent dans une routine où l’ennui et l’absence de renouvellement règnent en maître. Heaven Shall Burn a vu passer de très près cette menace sur ses albums de la fin des années 2000, surtout sur « Invictus« (2010) qui terminait l’ambitieuse trilogie « Iconoclast » (un premier CD en 2008 et un DVD en 2009).
Mais avec « Veto », le dernier album qui a mis trois ans pour émerger, on trouve un Heaven Shall Burn renouvelé, ayant mis dans sa musique davantage d’éléments purement death metal par rapport au metalcore qui ne continue à exister ici que par intermittence. C’est le guitariste Alexander Dietz qui s’occupe de la production de cet album enregistré aux studios Chemical Burn à Bad Kösen en Allemagne. Le mixage est assuré par Tue Madsen, vieux compagnon du groupe depuis 2004.
Ce qui frappe d’office, c’est le mur massif de guitares qui viennent cisailler tout ce qui bouge. Les riffs agissent en véritable laminoir, sur lequel la voix rageuse de Marcus Bischoff vient plaquer des textes qui sont loin d’être idiots. Ceux qui peuvent percevoir les paroles au milieu de l’avalanche de décibels pourront écouter des textes politiques contre l’oppression et la dictature. « Land of the upright ones » est dédiée à Thomas Sankara, opposant burkinabé assassiné en 1987, et « Die Stürme rufen dich » est inspirée par une chanson de Victor Jara, chanteur chilien assassiné en 1973 au moment de la prise du pouvoir par Pinochet. « 53 nations » parle des brigades internationales de la guerre d’Espagne en 1936-39. Le groupe prend aussi position contre la chasse (« Hunters will be hunted ») et contre les religions organisées (« You will be Godless »).
La coutume chez Heaven Shall Burn, c’est une reprise par album. Ici, le groupe rend hommage à ses illustres prédécesseurs et compatriotes Blind Guardian, avec une version de « Valhalla » sur laquelle officie le chanteur de Blind Guardian, le grand Hansi Kürsch lui-même. Une autre coutume pour Heaven Shall Burn est de faire une chanson anti-religion par album et d’en faire la plus lourde du lot. Et ça ne manque pas ici avec un assaut thermonucléaire sur « You will be Godless ». Ce morceau sonne le signal d’une montée en puissance de l’album, qui dévaste encore plus durant sa seconde partie. Bien sûr, la reprise de « Valhalla », morceau du deuxième album de Blind Guardian en 1989, est un joyau dans cet ensemble qui n’arrête pas de pilonner. Mais ça chauffe aussi très durement du côté d’« Antagonized », « Like gods among mortals » ou « 53 nations », qui terminent l’album façon tapis de bombes sur l’usine de chars lourds.
Bons princes, les gars de Heaven Shall Burn calment les tympans rougis avec une belle ballade finale, « Beyond redemption ». Leur générosité est aussi marquée par les différentes versions de leur dernier album, qui raviront les collectionneurs et les fans du groupe : édition limitée avec deux CD dont un live, édition triple CD ou version vinyle + CD avec des inédits et des remixes. De quoi s’astiquer les conduits auditifs en toute sérénité.
Pays: DE
Century Media
Sortie: 2013/04/22