WHITLEY, Trixie – Fourth Corner
Il y a un moment étonnant sur « Breathe You in My Dreams », un morceau phare de « Fourth Corner », le premier album solo de Trixie Whitley, lorsque le verset cède la place à un chorus dramatique. Plutôt que d’aller dans la gamme supérieure pour se transformer en diva, Whitley va dans la direction opposée, se déplaçant dans un registre grave et révélant un baryton. C’est certainement inattendu, mais Whitley n’est pas une chanteuse prévisible. Là où d’autres chanteuses tenteraient le tout pour le tout, elle reste légèrement en retrait et renverse la chanson.
Pour correspondre à son style d’interprétation paradoxal, Whitley a une voix extrêmement dramatique qui peut sembler démesurée. Sa voix rauque tamisée rappelle Kim Carnes mais elle peut rappeler aux auditeurs celle d’Erika Wennerstrom, de la formation blues-rock The Heartless Bastards. C’est presque trop, trop puissant, trop démonstratif, trop baroque. Mais seulement presque. Qu’elle se donne dans Black Dub, le projet de Daniel Lanois, ou qu’elle chante ses propres chansons, Trixie Whitley parvient à écrire des morceaux avec des émotions vives et des sentiments désespérés.
« Fourth Corner » intègre rock et R & B, soul et jazz, « torch songs » : elle emprunte à Janis Joplin, Anita Baker, Van Morrison et Robert Johnson. La fille du chanteur / compositeur américain Chris Whitley a grandi en Belgique, a chanté sur les enregistrements de son père, est partie en tournée avec une troupe de ballet et a été DJ au Musée Belge des Arts Modernes (alors qu’elle n’avait que 11 ans). Elle a évidemment été exposée à beaucoup de musique dans sa vie, et une grande partie est présente sur « Fourth Corner ».
La batterie est largement absente (ce qui est étrange quand on sait que Whitley est elle-même batteuse), mais ce sont des percussions troubles et inquiétantes qui propulsent « Irene » et « Need Your Love », donnant à ces titres une tension étonnante.
Travaillant avec Thomas Bartlett (mieux connu sous Doveman), Whitley crée une atmosphère sombre, nocturne, comme si « Fourth Corner » avait été créé pendant les petites heures du matin dans le salon enfumé d’un sous-sol. Sur « Oh, joy », elle se dépouille entièrement, laissant juste sa voix et son jeu de guitare formidable. Comme si elle profitait un peu d’une sérénité durement gagnée et qu’elle réalise qu’elle dispose des instruments parfaits pour l’exprimer.
Pays: US
Unday Records UNDAY015CD
Sortie: 2013/02/11