CLIMAX BLUES BAND – FM/Live
Nous continuons notre voyage à travers l’œuvre du Climax Blues Band avec l’album « FM/Live », réédité par Esoteric Recordings. Après cinq albums, le Climax Blues Band reprend ce nom et laisse tomber l’appellation de Climax Chicago. C’est le succès encore modeste mais réel de « Rich man » aux États-Unis qui permet au groupe de partir en tournée chez l’Oncle Sam et de revenir dans son Angleterre natale avec quelques bandes enregistrées qui vont servir à sortir un album live.
Nous sommes en 1973 et à cette époque, il devient quasiment nécessaire pour les groupes de rock d’éditer un album en public, histoire de montrer aux nombreux fans qui ne peuvent les voir sur scène de quoi ils sont capables en concert. Historiquement, on peut dire que c’est le fameux « Live at Fillmore East » de l’Allman Brothers Band qui lance cette mode en 1971 (quoique les doubles live de Grand Funk et Steppenwolf aient pu être des précurseurs en 1970). Avec le « Made in Japan » de Deep Purple l’année suivante, la tendance s’alourdit et tout le monde doit se fendre de son album en public s’il veut prétendre à être considéré sur la scène rock internationale.
Et si c’est un double album, c’est encore mieux. Ce qui est précisément le cas de ce « FM/Live » qui capte un concert du Climax Blues Band à l’Academy Of Music de New York en 1973. Le groupe a sélectionné ce concert en raison des versions exceptionnelles de certains de ses morceaux et en a confié la production et le mixage à Richard Gotterher, qui avait précédemment produit l’album « Rich man » en 1972. Le Climax Blues Band joue précisément quelques morceaux de cet album sur scène, auxquels il faut ajouter deux titres de « A lot of bottle« (« Seventh son » et « Country hat ») ainsi qu’un morceau de « Plays on« (« Flight »). Signalons aussi « I am constant », pas encore sorti sur disque en 1973 et qui trouvera une destination sur « Stamp album » en 1975. Une reprise du « Goin’ to New York » de Jimmy Reed et une autre de « Let’s work together » de Wilbert Harrison constituent ce qui était à l’époque la quatrième face du double album vinyle.
Ceux qui se sont mis à l’écoute des albums studio du Climax Blues Band ont pu apprécier la qualité de la musique du groupe. Mais en live, le groupe de Peter Haycock et Colin Cooper prend des dimensions dantesques. Après une petite mise en jambes constituée par « All the time in the world » et « I am constant », le Climax Blues Band lâche son premier morceau dépassant les dix minutes (sur les trois présents dans l’album). C’est une version jazzy et dynamique de « Flight » qui laisse soudainement partir la guitare de Peter Haycock, aux prises avec un saxophone qui ne veut pas la lâcher. Combat de titans à l’ombre d’une furie funk rock qui déboule à toute berzingue. Haycock reprend l’initiative, démantèle son manche sous une pluie de notes nerveuses et groovy. Première sommation.
Pour ceux qui n’ont pas encore compris, le groupe remet le couvert deux morceaux plus loin, en mode blues larmoyant et mystique, avec une version de onze minutes de « So many roads ». En mode recueilli, Peter Haycock place à nouveau des trainées de notes chagrinées et nerveuses. L’auditeur, qui avait jusqu’à présent la bouche ouverte d’ébahissement, voit perler quelques larmes au coin de son œil. Désormais, Peter Haycock vient de conquérir ses lauriers de grand guitariste. Il va falloir bousculer un peu les listes des guitar-heroes pour lui laisser une petite place, quelque part entre Johnny Winter et Albert Collins. Deuxième sommation.
Il faut laisser aussi un petit espace d’expression pour le batteur John Cuffley avec « Mesopopmania », prétexte à un solo de batterie démoniaque. Peter Haycock revient avec ce qu’il faut bien considérer comme la troisième sommation, celle qui déclenche le feu nourri : un solo de guitare de plus de six minutes sur « Country hat », véritable tour de force entièrement dédié à l’art du bottleneck. L’auditeur, la bouche ouverte et les larmes aux yeux, est maintenant le cul par terre, en train de signer son bulletin d’adhésion au club des adorateurs de Peter Haycock.
Comme si tout cela ne suffisait pas, le Climax Blues Band continue à épater avec ses excellentes versions bien secouantes de « You make me sick » et « Shake your love », du pur blues rock ‘n’ roll lâché toutes guitares dehors. Et voici maintenant le troisième titre de plus de dix minutes, un « Goin’ to New York » de Jimmy Reed destiné à séduire le public de la Grosse Pomme, une opération d’autant plus réussie que les boys du Climax ouvrent à nouveau les vannes et balancent à tout va de la rythmique haletante, des interventions lumineuses d’harmonica et du solo de guitare slide en rafales.
Le public est achevé avec une version titanesque de « Let’s work together », un titre de Wilbert Harrison d’abord édité sous le nom « Let’s stick together » en 1962 et qui sera rendu populaire sous son nouveau nom avec des reprises de Canned Heat (1969) et surtout Bryan Ferry (1976). Il ne faut pas oublier non plus cette version fabuleuse jouée par le Climax Blues Band sur son album live qui, on l’aura compris, est plus qu’indispensable dans les bonnes discothèques rock et blues. Le « FM/Live » va grimper à la 107e place des charts américains et se maintenir dans ces hauteurs durant trente semaines, ce qui est en 1973 la meilleure performance commerciale du Climax Blues Band.
Pays: GB
Esoteric Recordings ECLEC 2387
Sortie: 2013/04/29 (réédition, original 1973)