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NO SUN IN SAN FRANCISCO – Principles and particles

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Au risque de me répéter, je me dois d’insister : la Suisse, musicalement, c’est génial. Pour ceux qui aiment le hardcore et le post-hardcore, s’entend. Parce que les amateurs de Stephan Eicher ne seront sans doute pas les premiers à apprécier ces combos furieux du genre Yog, Spylown, Bagheera ou Prométhée. Et dans la petite famille underground helvétique, voici un nouveau pion qui vient s’ajouter sur l’échiquier : No Sun In San Francisco. Enfin, pion, c’est un peu péjoratif car ces gaillards-là seraient plutôt du genre fou ou tour, les pièces qui vous tombent dessus d’un coup sans prévenir et vous mettent au tapis.

Comme son nom ne l’indique pas, No Sun In San Francisco vient de Lausanne et réalise son premier album avec ce « Principles and particles » qui, pour une première œuvre, est un joli coup de maître. Le seul point dommageable est l’absence totale d’informations circulant sur le Net au sujet du nom des musiciens, les circonstances de leur association, leurs influences (mais en prêtant l’oreille, on sent quand même bien Isis et Neurosis, il ne faut quand même pas exagérer) ou le plat préféré du batteur (à mon avis, vu ce qu’il développe sur les fûts, ça doit être le chili con plutonium avec une petite sauce à la testostérone de rhinocéros).

Il ne nous reste que la musique, brute de décoffrage, mais cela sera bien suffisant pour vous annoncer que nous tenons encore ici des gens doués en matière de boucan triste et de constructions engluées dans la vase dépressionnaire. No Sun In San Francisco place entre nos oreilles neuf morceaux remarquables par leur cohérence neurasthénique, leur puissance pessimiste et leur tristesse envahissante. Parfois, les choses vont flirter du côté des dix minutes (« Stranglehole », « Northern State activity », « Mind the axe, care for them », « Swelling shores »), ce qui permet variété des climats et digressions intéressantes, y compris sur des morceaux plus courts comme « The great failure », un des morceaux les plus puissants du lot.

On remarque aussi l’étrangeté de certains titres aux noms abscons (« They thought it could tame the horsewill », « Mind the axe, care for them », « They looked at each other knowing J.F. would defeat them all »). Le chant hurlé reste néanmoins civilisé mais le captage des paroles n’est pas très évident. On sent cependant que les types ne parlent pas de la cueillette des pâquerettes dans le canton de Vaud ou de la fabrication du chocolat du côté de Berne. C’est plus triste, le genre tourmenté.

No Sun In San Francisco n’a pas son pareil pour élaborer des ambiances sonores angoissantes, qui démarrent dans la fragilité cristalline de notes en quarte augmentée et qui prennent peu à peu de l’ampleur, jusqu’à exploser dans une catharsis magmatique, affolant les neurones et terminant de dissoudre les restes de bonne humeur qui pouvaient encore subsister çà et là chez l’auditeur. À ces éclats de rage froide viennent se greffer des chœurs sépulcraux ou des barrages de riffs glacés, très bons pour le teint et la paranoïa.

On reste dans les limites d’un post-hardcore classique mais qui sait aussi très bien jouer avec des éléments empruntés au sludge metal, au doom ou au métal progressif (dans une veine Black Cobra ou Mastodon, pour illustrer un peu les propos). Il ne reste plus qu’à espérer que No Sun In San Francisco quitte bientôt sa vallée pour répandre son désespoir un peu partout en Europe, avec si possible un passage en Belgique, où on pratique également le « no sun ».

Pays: CH
Autoproduction
Sortie: 2013/02/28

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