MAUDLIN – A sign of time
La comptine inquiétante qui démarre cet album est extraite de « The innocents », excellent film de fantômes et de maison hantée sorti en 1961, avec Deborah Kerr dans le rôle de la gouvernante aux prises avec deux enfants visités par des spectres. Cette référence cinéphilique de haut vol place immédiatement Maudlin dans le clan des fins lettrés, des connaisseurs, des amateurs de tragédie et des adhérents au chagrin.
Mais qui sont-ils, que font-ils, dans quelle étagère errent-ils ? Maudlin est formé à Ostende en novembre 2004 avec un objectif clair : apporter sa contribution à l’édifice du doom psychédélique, du postcore et du sludge. Option Isis, Neurosis, Type O Negative, donc. Le groupe ne perd pas de temps et s’ébroue sur scène à peine deux mois après sa naissance, avec une première partie de The White Circle Crime Club. La scène est un milieu où Maudlin se sent à l’aise. Il n’y a guère que les moments où il enregistre qui le tiennent écarté des planches. Ici aussi les choses vont plutôt vite. Une première démo est transformée en EP par le label Offerandum et voit le jour en juillet 2005 sous le nom de « Solitary echo ».
L’étape suivante s’appelle « Ionesco », premier album long format qui sort en juin 2008 après une longue incubation de la part du groupe, qui a construit son propre studio dans sa salle de répétition pour accoucher de ce projet ambitieux. « Ionesco » raconte l’histoire d’un médecin qui met au point un remède pour lutter contre la dépression dans le Washington des années 50. L’album décrit les émotions et les sentiments d’un patient qui subit la lobotomie transorbitale inventée par le médecin, prétexte à des divagations psychédéliques et spirituelles qui séduisent la critique. L’album est produit par A. Zec (Customs, Death Before Disco, Diablo Boulevard) et masterisé par Magnus Lindberg (Cult Of Luna, Khoma), ce qui en fait un objet à ne pas négliger.
Maudlin s’embarque pour deux tournées successives à travers l’Europe en 2009, en compagnie de groupes comme Russian Circles, These Arms Are Snakes, Kylesa, Cult Of Luna, Callisto, Misery Index, Amen Ra… Après une période un peu plus calme en 2010 et 2011, Maudlin se met à la préparation de son nouvel album. Après plusieurs mois de travail, voici donc « A sign of time », qui joue totalement la carte d’un doom atmosphérique peu enclin à la joie de vivre mais magnifique de sonorités lourdes, d’ambiances gluantes et ventilé par un gaz cosmique venu du fin fond de la galaxie.
Maudlin propose à plusieurs reprises des morceaux qui peuvent s’aventurer dans les 7 à 8 minutes et qui sont donc l’occasion de multiples changements de tempos, de successions de montées en puissance et de transitions spatiales. Bien des titres sont remarquables : « She whispers treason » et son mid-tempo colossal laissant place à l’angélisme de chœurs masculins, « Lilith » et ses débuts diaphanes qui tournent à des ambiances titanesques, « A perfect sky of black » qui ouvre la voie à d’imposantes constructions de guitares et de voix, « Goddess of the flame » au gothisme rappelant Paradise Lost ou un « Chasing shades » pas très éloigné de l’univers d’Opeth. Maudlin termine son album avec 35 secondes de silence (« Turn to seconds »), comme le symbole de la vanité de tout effort face au silence qui finit toujours par l’emporter à la fin.
« A sign of time » est donc une excellente surprise, bien construit, bien pensé, au classicisme rassurant dans une veine doom et sludge du meilleur aloi. On pourra se rendre compte des talents du groupe sur scène lors de son passage programmé au 4 AD de Dixmude le 9 mars prochain (avec les excellents Steak Number Eight), ou à la JH Terlinden d’Alost le 30 mars.
Pays: BE
Consouling Sounds
Sortie: 2013/02/15
