MICROFILM – AF127
Microfilm est un groupe originaire de la région du Poitou qui signe ici son quatrième album. Il est peut-être nécessaire de procéder à quelques présentations, car cette formation reste encore plutôt confidentielle, ce qui est injuste. Gregory Cadu (basse, samples), Guillaume Chiron (guitare, samples), Mathieu Guérineau (batterie) et Yohan Landry (guitare) ont formé Microfilm au début des années 2000 et ont réalisé jusqu’à présent quatre albums : « A journey to the 75th » (2004), « Stereodrama » (2007), « A bay of future passed » (2010) et cet « AF127 » au titre mystérieux qui fait l’objet de toute notre attention.
Microfilm opère dans un registre post-rock subtil et intello, avec des mélodies feutrées et des interventions instrumentales à la fois planantes et fermes. Ce qu’il commet sur son nouvel album « AF127 » est un voyage passionnant, truffé d’idées saugrenues basées sur des collages sonores extraits de films des années 50 et 60. Mais d’abord, il y a la pochette, également collage de photos de femmes dénudées, ce qui n’était plus arrivé depuis longtemps pour une pochette de disque. Notre époque pudibonde et moraliste préfère tolérer des pochettes de disques regorgeant de têtes de mort et de voitures de sport, mais ne supporte plus le charme du nu et l’appel de la nature. Ici, on revient à de la provocation subtile, sans superflu ni vulgarité.
Ensuite, la musique. Les gens de Microfilm ont bourré leur album jusqu’à la gueule (55 minutes) et proposent une douzaine de titres aux durées variables (d’une minute vingt à treize minutes, la palette est large). L’idée de base est l’insertion de collages sonores où des dialogues de films semblent souvent tourner autour d’un thème récurrent, le sexe (et un peu la drogue, de temps en temps). Il n’y a aucun chant en provenance des musiciens, qui se concentrent sur la musique et fabriquent des tableaux sonores changeants et habiles, développant des paliers musicaux aboutissant à une architecture complexe, digne des plus grands groupes progressifs. Face à Microfilm, Rush ou King Crimson sont interpellés sur leur piédestal : la nouvelle génération vient défier les vieux maîtres avec des idées nouvelles que ceux-ci auraient pu avoir en leur temps.
C’est ainsi que Microfilm parvient à briller sur de magnifiques performances : « Flying guillotine » qui démarre l’album sur des interjections en chinois, « Claude » et ses impayables dialogues en français en provenance directe d’une maison close, le dramatique « The intruder », « Rio » et ses dialogues extraits de La vengeance aux deux visages avec Marlon Brando, l’hyperactif et vertigineux « Dp7 ». La classe et l’imagination sont au rendez-vous et Microfilm ne mérite ici qu’une seule chose : être découvert à tout prix.
Pays: FR
Head Records / Mandaï Distribution
Sortie: 2012/06/15