CROOKED FIDDLE BAND (The) – Overgrown tales
« The Crooked Fiddle Band est une surprise totale. Leur musique est originale et insensée et elle possède la force des racines les plus profondes et les plus solides. Je peux dire que je n’ai jamais entendu quelque chose comme ça auparavant ». Cette citation que l’on trouve dans la fiche de promotion accompagnant le premier album de ce groupe australien aurait pu avoir été faite par un agent publicitaire de label toujours prêt à en rajouter pour faire passer les groupes qu’il vend comme les plus grands de tous les temps. Mais cette citation vient de Brian Eno lui-même. Si l’un des musiciens les plus originaux et les plus inventifs de l’histoire du rock vient tresser de tels lauriers à un nouveau groupe, c’est qu’il faut prendre ce Crooked Fiddle Band très au sérieux.
Et en effet, ces Australiens assemblés en groupe depuis six ans et jusqu’à présent auteurs de deux EP arrivent ici avec une première œuvre déconcertante de folie et d’originalité. L’idée repose sur le violon (fiddle, en anglais) qui sert de base à toutes sortes d’élucubrations musicales allant de la musique traditionnelle tzigane au punk et du progressif déviant à la musique classique languissante.
Jess Randall (violon, chant), Gordon Wallace (guitare, bouzouki, mandoline, chant), Mark Stevens (contrebasse, chant), et Joe Gould (percussions, guitare, chant) sont partis d’un constat simple : les musiques qu’ils aiment ont toutes en commun une énergie brute, que ce soit la musique tzigane, le punk, le folk balkanique ou scandinave, le post rock ou les danses celtiques. Alors, pourquoi ne pas extraire ce principe énergétique fondamental et le faire circuler dans une fusion entre les genres ? Pari fou, mais pari gagné avec ce disque qui bouscule toutes les idées reçues, déconstruit pour reconstruire différemment et fabrique de la fusion d’un nouveau genre.
Les tentatives de classification de la musique du Crooked Fiddle Band ont abouti aux dénominations les plus zinzins : folk tronçonneur, métal roumain du 14e siècle, thrash folk, tempête bohémienne ou ce qu’aurait produit Sepultura si on lui avait demandé d’écrire la bande-son d’une version hyperactive du film O’ Brother. Le petit côté punk mâtiné de tzigane rappellera les comiques troupiers de Gogol Bordello. Mais The Crooked Fiddle Band va au-delà et visite aussi bien du Django Reinhardt ligoté à un câble électrique de 3000 volts que du po-go de moujiks décalqués à la vodka de contrebande, sans oublier les quadrilles de cow-boys en proie à l’épilepsie et le rock progressif version corrida mélangé à du grégorien tribal. Il va falloir s’accrocher et surtout remettre les tympans à zéro si on veut entrer pleinement dans cette nouvelle dimension découverte par The Crooked Fiddle Band.
Et alors, les titres, plus timbré, tu meurs : « Countess Bathory’s finishing school for girls », « The ruination of Junkyard Joe », « All these pitchforks make me nervous », « The mountain hag’s advice »… Ne vous inquiétez pas, les gars, ça va aller, juste un peu de surmenage. Mais cette folie savamment distillée trahit surtout un groupe au niveau technique irréprochable et aux conceptions musicales parfaitement assumées. Les types partent à l’aventure avec tous les plans en tête et savent parfaitement où ils vont, même si l’auditeur a parfois des doutes à ce sujet.
Le groupe viendra se produire au festival de Dranouter en Belgique (près d’Ypres et Poperinge) le 5 août prochain. Avis aux amateurs de sensations folles…
Pays: AU
Autoproduction CFB003
Sortie: 2012/06/10