K (The) – My flesh reveals millions of souls
Il est enfin arrivé, ce premier album de The K. On attendait le groupe belge au tournant depuis décembre 2010, quand la rumeur courait déjà que les ex-The Kerbcrawlers devenus The K mettaient au point leur premier long format, après avoir mis l’eau à la bouche avec leur premier EP « Hunter’s parade » (2009) et fait chavirer tous ceux qui avaient pu voir sur scène leurs prestations explosives. Le trio (Sigfried Burroughs, batterie ; Sébastien von Landau, guitare et chant ; Geoffrey Mornard, basse) a eu raison de prendre son temps, car le résultat final est tout simplement excellent.
The K distille un punk hardcore expérimental déviant, malsain et furieux, façon Melvins rencontrant The Jesus Lizard avec une petite pointe de Dillinger Escape Plan et un soupçon de grunge maniaque. Miam, miam ! diront les gourmands, il y a de l’électricité à se mettre sous la dent. Et vous ne croyez pas si bien dire, les amis, car du triphasé, vous allez en manger dans ce « My flesh reveals millions of souls ».
D’entrée de jeu avec le premier morceau « Bald woman », on sent tout de suite ces coups de guitare nerveux, espacés, tentant de faire craquer la porte pour libérer des kilotonnes d’énergie. Le chanteur arrive par derrière, la bave aux lèvres, le souffle court, compressé comme un ressort prêt à partir dans tous les sens. Et bien sûr, tout pète. Le taureau pénètre à toute berzingue dans l’arène, déchiquète deux ou trois toreros au passage avant de semer de la bidoche partout. Sur « Essential chippendale », ce sont des riffs énormes qui libèrent des ondes d’électricité sauvage fracassant tout, molestant les tympans, creusant des trous béants dans les cervelles. Et ces changements soudains de rythmes, ces breaks carnassiers, ces paroles maniaco-dépressives proférées par un chanteur dont on dit que le séjour en hôpital psychiatrique il y a cinq ans lui a fait le plus grand bien, quelle sublime dévastation !
C’est bien simple, l’album est captivant de bout en bout, extrêmement dur, dense, toujours aéré au bon moment pas des ralentissements angoissants où l’on entend le chanteur énoncer des insanités en geignant, histoire de mettre tout le monde à l’aise. The K jette sur la table ses tripes encore frétillantes de colère sourde. Du tapis de bombes nucléaires sur « Streaks in the sky », en passant les très pressés « Fertile waves » et « Fragrance », un « Dawn riser » funèbre et malsain à souhait, les guitares aux arêtes cisailleuses de « Worthy of the name » ou l’impensable rage de « Maneater », tout dans cet album va laisser des traces. Ceux qui murmurent Nirvana du bout des lèvres n’ont peut-être pas tout à fait tort. En tout cas, The K est à suivre et à soutenir, car ce serait dommage de voir une telle masse de talent se perdre dans la nature.
Un record du titre le plus long est établi avec « Various doubts in the rites of passage and disapproval of damage acts », qui bat également le record du nombre de tympans fêlés en moins de trois minutes. Et le groupe marque encore quelques points supplémentaires en sachant finir son album, ce qui n’est pas toujours évident. En l’occurrence, le bien nommé « The end » vient terminer le carnage sur des paroles démentes et des nappes instrumentales névrotiques, avant qu’une dernière accélération ne balance dans le tas un paroxysme auquel rien ne peut s’opposer.
« My flesh reveals millions of souls » vient de prendre place dans l’antichambre des disques sélectionnés pour le grand concours des meilleurs albums de l’année. Mettre la barre plus haute que ça dans la catégorie punk déchaîné va être très dur. The K sera présent tout l’été en Belgique, notamment aux festivals Bear Rock d’Andenne (29 juin), Dour (15 juillet) et Power Festival de La Louvière (21 juillet). Il n’y a pas à hésiter si on veut découvrir l’un des plus sûrs espoirs de la scène punk noise belge.
Pays: BE
Jaune Orange
Sortie: 2012/06/04
