LIARS – WIXIW

Il est des groupes qui, dès qu’ils ont trouvé une petite idée vaguement originale ou un genre un peu plus spécial que les autres, s’accrochent à tout crin à leur style comme le moribond s’agrippe désespérément à la vie. Les Américains de Liars, par contre, sont passés maîtres dans l’art du brouillage de pistes, totalement indifférents au flot des fans qui rejoignent leur cause le temps d’un album et s’enfuient dégoûtés à l’album suivant car tout a été bouleversé et remis en question.

En douze ans d’existence et six albums, les Liars ont bien dû changer six fois de peau, tels des caméléons en perpétuel mouvement sur des décors chaque fois différents. Du punk acerbe et mécanisé de « They threw us all in a trench and stuck a monument on top » (2001) à la confusion décadente et inquiétante de « Sisterworld » en passant par la sorcellerie de « They were wrong, so we drowned » (2004) et le concept album noisy « Drum’s not dead » (2006), le groupe d’Angus Andrew, Aaron Hemphill et Julian Gross (nouveau venu dans la formation après le départ de Pat Noecker et Ron Albertson) a toujours eu le chic pour désarçonner quiconque cherche à entrer dans leur œuvre avec des conclusions déjà toutes faites.

Avec « WIXIW », le paquet de cartes est à nouveau battu et ce sont de nouveaux atouts qui tombent sur la table et mènent un jeu encore une fois chamboulé. Liars s’attaque à de l’électro expérimental qui distille en un même lieu lenteur céleste (« The exact colour of doubt »), rythmes entêtants et névrosés (« WIXIW », « Brats ») ou litanies primesautières déglinguées (« Flood to flood », « Annual Moon words »). L’auditeur frôle l’étouffement face à cette architecture sonore dense, ponctuée d’un chant tour à tour guilleret et dépressif. Il faut une bonne dose de patience pour entrer dans cet album dont la première écoute est un véritable choc pour qui est habitué aux albums précédents des Liars. Mais, comme c’est souvent le cas avec ce groupe que l’on pourra qualifier de génial sans tomber trop loin de la vérité, c’est le temps qui joue en sa faveur et dévoile peu à peu toutes les subtilités de la musique des New-Yorkais.

Les Liars ne mentent que sur leur nom car ils sont habités par la vérité de leur musique, enfoncés dans leur œuvre au sens le plus noble du terme et en phase avec une spiritualité créatrice qui impose leur monde musical à celui des hommes. Vous y entrez ou vous restez dehors, mais vous ne glandez par sur le seuil de la porte. Il faudra par contre franchir complètement le seuil de l’Ancienne Belgique le 9 juin prochain pour le concert des Liars, en tout cas pour ceux qui ont un billet car le show est complet.

Pays: US
Mute Records
Sortie: 2012/06/04